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Je ne veux parler que de cinéma, pourquoi parler d'autre chose ? Avec le cinéma on parle de tout, on arrive à tout. Jean Luc Godard

Ambre "Forever Amber"

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 Ambre.jpg


Réalisé par Otto Preminger

 
Avec Linda Darnell, Cornel Wilde, Richard Greene,

George Sanders, Glenn Langan, Richard Haydn,

Jessica Tandy, Anne Revere, John Russell, Jane Ball, Robert Coote


Genre Drame


Production Américaine

 

Titre original Forever Amber

 

Date de sortie cinéma : 29 octobre 1948

 

 

Le film est inspiré d'un volumineux roman de Kathleen Winsor paru dans les années 40. Ce qui dérange les critiques, c’est que les scénaristes n’ont pas réussi à améliorer leur matière première. "Ils ont  fait leur adaptation à la manière d’un condensé et au lieu de construire une intrigue, leur seul souci a été de ne pas rater une seule page d’un volume qui en compte plus de huit cents"Ambre-copie-1.jpg s’agace Jean-Pierre Vivet dans Combat. Même reproche dans Le Soir, pour qui Ambre "n’aurait rien perdu à être ramené à des proportions plus normales". "Au cinéma, surtout, les histoires les plus longues ne sont pas toujours les meilleures" persifle Olivier Delville. Le journaliste regrette que Otto Preminger  n’ait pas "su opérer le dépouillement nécessaire, la simplification qu’impose cet art de synthèse par l’image qu’est le cinéma". En plus d’une fabrication laborieuse, Ambre a dû essuyer les foudres de la censure. Comme le rappelle Positif, le film, même s’il n’a pas le caractère audacieux du roman, a subi des coupes sous l’insistance de la Catholic League of Decency. Pourtant, "ce film n’a rien de provocant" s’étonne La Nation Belge, "inutile de se hérisser".

 

C’est une presse désenchantée qui accueille Ambre à sa sortie, d’autant plus déçue qu’elle attendait de retrouver sur l’écran la maîtrise et la finesse des précédentes réalisations de Otto Preminger.

 

Cependant, avec le recul, Ambre a sensiblement reconquis le cœur des critiques français.

 

À l’occasion de sa ressortie en salles en 1976, Michel Marmin de Valeurs Actuelles salue paradoxalement "l’un des plus beaux films" d’Otto Preminger, évoquant les "péripéties" qui s’enchaînent, diverses "splendeurs" et une "sorte d’efficacité féérique qui place le film en marge de son œuvre."

 

"L’auteur de Laura réussit, une fois de plus, un troublant portrait de femme (...). Pourtant, moins qu’une opposition tranchée entre sentiments et calcul, c’est l’enchevêtrement de ceux-ci qui semble la définir. Pour représenter un tel désordre de la conscience, Otto Preminger a obtenu du chef opérateur du film, Leon Shamroy, une image toute en violents clairs-obscurs. L’invisible fluidité de la mise en scène qui privilégie les longs plans témoigne de cette maîtrise redoutable qui caractérise l’art du cinéaste ». écrit Jean-François Rauger, pour Le Monde 21 décembre 2011


Synopsis 

 

Angleterre, 1644. Le pays traverse un désordre politique considérable, le parlement et Cromwell s'insurgent contre Charles 1er. Un bébé, dont le linge dans lequel il est enrobé porte le nom de Ambre, est déposé chez un couple de paysans du Comté d'Essex.

 

En 1660, Cromwell est mort et la royauté est rétablie en la personne de Charles II. Ambre a grandi et ses parents adoptifs la destinent à un mariage auquel elle ne veut pas se résigner. Elle souhaite une autre vie, plus palpitante, à la ville, lieu de tous les raffinements. Une nuit, un détachement des soldats du Roi, avec à leur tête le baron Bruce Carlton (Cornel Wilde), vient demander aux parents d'Ambre (Linda Darnell) la direction de l'auberge la plus proche.

 

Forever Amber

 

L'occasion est inespérée pour elle qui tente par tous les moyens de les persuader de l'emmener avec eux. Essuyant un refus de circonstances, elle apprendra le lendemain, avant leur départ, l'adresse de Bruce Carlton dans la capitale où elle va bientôt le rejoindre.

 

D'abord réticent, le baron va vite succomber aux charmes de la belle Ambre. Mais ces jours de bonheur sont comptés : Bruce Carlton entend mener depuis longtemps une vie de corsaire au service de la couronne. Il est venu à Londres rencontrer le Roi pour lui rappeler sa promesse de lui fournir des navires. Il obtiendra satisfaction grâce au soutien de son ancienne maîtresse, Lady Barbara, devenue depuis la favorite du Roi.

 

Forever Amer Cornel Wilde et Lnda Darnell-  Cornel Wilde et Linda Darnell

 

Ce dernier, inquiet de ces retrouvailles, ordonne à Bruce Carlton de partir sur le champ. Ambre se réveille seule et abandonnée le matin. Piquée au vif et désemparée par le départ, sans prévenir, de l'homme qu'elle aime, elle va désormais consacrer sa vie entière à s'élever dans la société afin qu'à son retour Carlton consente à l'épouser. Ambre apprend après le départ précipité de son amant, que Bruce Carlton n'acceptera de l'épouser que si elle est un bon parti, elle connait tout le chemin qui lui reste à réaliser pour se défaire de sa modeste condition.

 

  Forever-Amber---Linda-Darnell.jpg


Linda Darnell


Ambre enceinte et sans argent est jetée en prison car criblée de dettes, elle s’évade grâce à Black Jack Mallard (John Russell), met au monde son fils dans les bas fonds de Londres, et peu à peu, remonte la pente. Après bien des aventures, elle devient comédienne de théâtre pour mieux s’exposer dans la haute société.

 

Fortement courtisée, elle épouse le vieux Lord Radcliffe (Richard Haydn).  Celui-ci l’introduit à la cour.

(Richard HaydnForever Amber -Richard Haydn

 

Le roi Charles II (George Sanders) la remarque au grand dépit de son mari.  


Forever-Amber---George-Sanders--Linda-Darnell--Richard-Hayd.jpg

 

La peste s’abat sur Londres et sachant Bruce revenu, Ambre quitte tout pour le sauver de l’épidémie. Mais son mari la rattrape et informe Bruce de leur mariage. Bruce quitte Ambre de nouveau. D'intrigues en embuches, jusqu'au grand incendie de 1666, la trajectoire d'Ambre St Clair sera très tourmentée. Lord Radcliffe meurt.

 

Ambre devient la favorite du roi.

 

Carlton, marié, revient une dernière fois mais pour reprendre son fils, Ambre reste seule... car Charles II l'a répudiée.   

 

Forever-Amber---Linda-Darnell-et-Cornel-Wilde.jpg

 

Darryl F. Zanuck voulait faire de l’adaptation du roman sulfureux de Kathleen Winsor, le nouvel Autant en emporte le vent. Le tournage commença en mars 1946, avec un budget de 4,5 millions de dollars. Dans le rôle d’Ambre, une actrice irlandaise inconnue, Peggy Cummins, dans celui de Lord Almsbury, Vincent Price, et aux commandes John M. Stahl, réalisateur de grands mélodrames dans les années 1930 : Back Street, Images de la vie, Le Secret magnifique ...

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Forever Amber- Linda Darnell Linda Darnell

 

Mais très vite, Darryl F. Zanuck arrête le tournage, après 39 jours de production et un coût de 500 000 dollars, prétextant le mauvais travail effectué par John M. Stahl. Il semblerait que la véritable raison soit plutôt le manque de métier et le côté juvénile de Peggy Cummins.  

 

Otto Preminger est sollicité par Darryl F. Zanuck, pour reprendre la réalisation.

 

Alors sous contrat à la Fox, il accepte à la condition de choisir Lana Turner pour le rôle d’Ambre qui, selon Otto Preminger, est fait pour elle. Mais le producteur Darryl F. Zanuck ne veut pas d’une star de la MGM et impose Linda Darnell.

Linda Darnell Forever-Amer---Linda-Darnell.jpg

 

Linda Darnell dut se teindre en blonde pour le film. L’actrice irradie de sa beauté tout l’écran qu’elle soit de haillons vêtue, en crinoline couleur or ou en taffetas et tulles blancs, avec de plus, l’appui du technicolor ! Avec ce rôle, Linda Darnell obtient d'ailleurs la consécration, et c'est justice tant on n'imagine pas un instant une Ambre plus à propos.

 

C'est d'ailleurs la première fois dans la carrière d'Otto Preminger, qu'une femme est ainsi le personnage central du film, chose assez peu surprenante si l'on en juge par ces propos : "Les femmes sont et seront toujours un sujet fascinant. Peut-être parce qu'on n'en trouverait pas deux semblables. Peut-être est-ce parce qu'elles sont sans cesse en train de changer d'apparence et de personnalité."

 

Ambre cristallise en effet le désir, l'amertume, la frustration et une secrète jalousie qui finiront par lui faire perdre tout ce qu'elle avait initialement désiré, l'amour mais aussi le fruit de cet amour. Car même conscients du très probable échec de leur entreprise, bien souvent les héros "premingeriens" se doivent d'aller jusqu'au terme de leur obstination. Ce sentiment désabusé s'exprime d'une manière infiniment juste lorsque le sourire irradiant le visage d'Ambre glisse insidieusement vers une expression d'incompréhension figée par le trouble. Attitude qu'elle empruntera d'ailleurs à chaque fois qu'elle sera sommée par ses amants, ou Bruce lui-même, d'expliquer ses intrigues ou cachotteries.

 

 

Après l'éviction prématurée au casting de Peggy Cummins, ce fut au tour de Vincent Price. Price, qui avait soutenu Peggy Cummins dans son combat contre la production, il en a donc rapidement fait les frais !

C'est Richard Greene qui a finalement été choisi pour incarner Lord Harry Almsbury.

 

Le tournage reprend en octobre 1946, pendant dix-sept semaines et le coût du film se monta à six millions de dollars. Il rapporta la même somme en bénéfices, dès la première semaine de sortie.

 

Ambre-copie-2.jpgIl faut souligner le grand soin apporté par Otto Preminger à la mise en scène dans ces tableaux d'ensemble du Londres de cette seconde moitié de XVIIème siécle, grouillante de vie, de couleurs, d'ombres et de silhouettes. Chaque plan large est en effet travaillé du premier jusqu'au deuxième plan, troisième plan, etc. Très peu de détails sont négligés à tel point qu'on a parfois le sentiment, telle cette représentation à travers un épais brouillard d'un pont encombré de Londoniens quittant la ville pour fuir l'épidémie de peste, de scruter une oeuvre de Jerome Bosch.

 

La reconstitution de l’Angleterre de Charles II est fastueuse. Leon Shamroy, l’un des meilleurs directeur de la photographie d’Hollywood éclaire magnifiquement de nombreuses scènes de façon très sombre tout en utilisant à merveille le Technicolor. Dans la première partie, Otto Preminger montre une belle maîtrise des ellipses, concentrant le récit sur les moments essentiels; cette vivacité est hélas moins présente dans la seconde partie et la fin semble quelque peu abrupte. Dans cette minutieuse reconstitution des détails, on comprend tout le bénéfice que l'homme de théâtre apporte à l'homme de cinéma, par le travail effectué sur les décors mais également la façon dont les personnages investissent ces décors. 

 

Otto Preminger garde un assez mauvais souvenir de ce film pourtant flamboyant, et l’on se demande pourquoi, poursuit-il, car Ambre "est l’un des portraits de femme les plus cyniques et les plus poussés, doublé d’une véritable leçon de mise en scène".Ambre 1 Même impression enfin pour Jean-François Rauger dans Le Monde, qui admire la réussite de ce "troublant portrait de femme" et s’attarde sur la forme, détaillant les clairs-obscurs et "l’invisible fluidité de la mise en scène" qui signent finalement le "talent redoutable" du maître.  Otto Preminger  n'évoque pas une seule fois Ambre dans son autobiographie. Et ce même si, comme déjà pour Laura, et comme il aura toujours coutume de procéder, il réécrit totalement le scénario du film tel qu'il avait initialement été entamé par John Stahl, en étroite collaboration avec ses scénaristes, puis au terme de ce travail d'écriture seulement envisage la distribution des rôles.

 

Forever Amber n'en demeure pas moins une oeuvre caractéristique de son réalisateur. Par les thèmes qu'il aborde, un cynisme désabusé et fallacieux comme obstacle aux sentiments les plus purs, une volonté obstinée et vaine d'infléchir sur le destin de l'entourage de ses héros. Ce film porte en germe, peut être de façon plus démonstrative que Laura, l'oeuvre ultérieure d'Otto Preminger constellée de caractères solitaires et manipulateurs. 

 

Ambre met en scène sa vie, convaincue qu'ainsi elle demeurera maîtresse de son destin et par conséquent qu'elle agira selon sa volonté sur celui de ses proches. Dès la seconde séquence du film d'ailleurs, en préambule à toutes les intrigues dont elle sera l'instigatrice, on voit la jeune Ambre s'observer devant un miroir et adopter les mêmes attitudes que les dames galantes illustrant une gravure. C'est à travers ce regard fascinant et troublant qu'elle porte à ses "objets" qu'on devine par avance la persévérance qui l'animera durant le long parcours la conduisant d'une modeste ferme de l'Essex jusqu'à la cours de Charles II.

 

Forever-Amber---Linda-Darnell-copie-1.jpg

 

 

Ambre fut condamné aux États-Unis, par les ligues de décence "pour encouragement à l’immoralité et à la licence". La meilleure des publicités fut celle de l’archevêque de New York qui demanda aux catholiques de ne pas aller voir le film.

Ce fut un énorme succès !  

 

A noter qu'une dernière scène est souvent absente : Après avoir regardé à la fenêtre Bruce s’éloigner, Ambre accepte l’invitation de l’écuyer du roi et retourne à sa coiffeuse pour se préparer et se regarde longuement dans la glace.  

 

 

 

La version présentée en Europe,  fait se terminer le film sur le dernier regard que porte Linda Darnell sur son fils et Bruce Carlton partant pour l'Amérique, avant de refermer la fenêtre. À cela, l'explication est toute simple : Otto Preminger avait dû négocier avec la Ligue catholique de décence, une fin moins immorale que celle prévue à l'origine où, en plus de cette ultime scène, on voyait Ambre, devant sa table de coiffure se regardant longuement tout en se maquillant, comme si déjà le souvenir des deux êtres qui lui étaient les plus chers s'était estompé.

 

Ambre-2.jpg.Ambre---Linda-Darnel-.jpg

 

Néanmoins, par sa prodigieuse sécheresse de ton, cette fin ajoute un caractère inéluctable à la trajectoire météorique d'Ambre St Clair, dont la vie, elle-même, fut une tragédie.

 

 

Sources :

http://films.blog.lemonde.fr

http://fr.wikipedia.org

http://www.dvdclassik.com - Yann Gatepin

http://www.notrecinema.com

http://www.allocine.fr

http://www.cinemovies.fr

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J
<br /> Hello Alain, comment vas-tu ? J'ai revu ce film chez une amie qui l'avait en dvd. Personnellement même si un peu daté j'ai passé un excellent moment. Et Chris l'a découvert car il ne l'avait<br /> jamais vu. Il n'a pas détesté du tout. Comme quoi on va finir par avoir les mêmes goûts, je rêve un peu quand même. Bises . Johane<br />
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