Synopsis :
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Ce mardi est "Chahar shanbeh souri", une fête du feu plurimillénaire.
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Rouhi vit un bonheur complet. Future mariée, Rouhi est employée à Téhéran comme aide-ménagère chez un couple assez aisé, Modjeh et son mari Morteza. En venant travailler chez ce couple, Rouhi accède à un milieu social qui lui est étranger.
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On ne sait s’ils partent ou arrivent, mais l’espace domestique semble en suspens : le désordre du domicile conjugal correspond à celui de ce couple en crise. Et pour cause, Modjeh soupçonne son mari de la tromper avec Simin, la voisine divorcée. À partir de cette situation, La Fête du feu s’organise en un théâtre de l’intime et un cruel triangle amoureux : indices, éclats de voix, stratégies, malentendus, portes qui claquent...
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Et ambiguïtés aussi dans une perspective de brouillage, le cinéaste laisse longtemps planer le doute sur la réalité de la relation adultère entre Morteza et Simin.
Taraneh Alidousti
Rouhi va s'impliquer dans l'histoire de ce jeune couple au bord de l'explosion, incapable de se parler autrement qu'en criant. Mais vouloir le bien des autres ne va pas de soi et la fête qui se prepare, et qui est de plus en plus presente au fil de la journee, génère nervosité et tension supplémentaires. Confrontée à ce traditionnel triangle adultérin, elle est un élément extérieur, un œil et des oreilles conviés malgré eux.
Cette position de Rouhi ne manquera pas de modifier, du fait de sa jeunesse et de son inexpérience, son regard sur l’amour au terme de ce périple d’un jour. Ce dernier ne sera assurément plus le même, et elle perd sans doute en chemin quelques illusions ainsi qu’une innocence.
Taraneh Alidousti (Rouhi, avec son fiancé dans le film)
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Au début du film un jeune couple à moto, Rouhi et son ami parcourent avec insouciance une route montagneuse et sinueuse des environs de Téhéran. Ce pourrait être le début d’un nouveau. De longs segments de La Fête du feu se déroulent dans un appartement dont les protagonistes entrent et sortent, toujours pour y revenir, comme s’il aimantait les protagonistes mais aussi la caméra : la logique du huis clos se trouve à l’œuvre.
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La fête du feu a obtenu (entre autres ... )
Festival des 3 Continents de Nantes en 2006
- le Prix Spécial du jury pour le Meilleur Scénario
Festival International de Chicago en 2006
- le Gold Hugo du Prix du Meilleur Film .
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La situation même du film met le hors champ à l’honneur puisque l’appartement du couple légitime jouxte précisément celui de Simin. Une bouche d’aération de la salle de bain offre même à qui veut l’entendre quelques bruits parvenant de l’autre côté de la cloison.
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Ce film d’intérieur se déroule sur une journée lors de Nôrouz, le nouvel an iranien. Celui-ci est fixé au premier jour du printemps et son origine remonte au temps de Persépolis et du zoroastrisme, la religion persane pré-islamique.
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Une ville en fête, et en feu, maintenue hors champ, si ce n’est lors d’une stupéfiante déambulation nocturne tournée en "conditions réelles". Les constantes déflagrations de pétards constituent une matière sonore oppressante et obsédante venue du dehors, à laquelle les déchirements du couple répondent de l’intérieur.
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Le fait qu’Asghar Farhadi vienne du théâtre étonne peu. Le réalisateur sait assortir ce sens de la dramaturgie d’idées de cinéma avec une belle limpidité.
"Certains acteurs viennent du théâtre et font en plus du cinéma. En particulier la comédienne qui joue Simin, Pantea Bahram, et Farokh Nejad, dans le rôle du mari, qui a fait du théâtre avec moi car nous étions dans la même promotion à l'école.
La jeune fille qui tient le rôle de Rouhi, l'employée de maison, Taraneh Alidousti, n'est pas une débutante. Elle a joué dans beaucoup de films et a remporté le Prix d'Interprétation au Festival de Locarno pour Je Suis Taraneh, j'ai quinze ans, de Rassoul Sadr-e Ameli."
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Les mœurs d’Iran sont observées et interrogées; dans la première scène, le trajet du jeune couple est stoppé pour cause de tchador pris dans l’essieu de la roue arrière de la moto, cette scène fut censurée en Iran. Asghar Farhadi fait la part belle aux beaux visages, évidemment couverts lorsqu’ils sont féminins; s’organise une sorte de typologie des stratégies du port du voile.
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Celui de Simin, la femme divorcée soupçonnée d’adultère avec Morteza, est coloré, notamment l’un d’un bleu éclatant, et encadre un visage maquillé.
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Modjeh, sans fard, le porte noir et sévèrement, peut être davantage dans un souci plus normatif que religieux.
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Quant à Rouhi, elle affiche la cagoule traditionnelle à l’intérieur et le tchador en extérieur. Résonne dans ces variations un principe d’enfermement dans un impitoyable carcan social.
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Le film se passe pendant le Nouvel An Iranien. Le cinéaste explique cette fête :
"Il s'agit d'une fête très ancienne, de tradition persane. Autrefois, toutes les personnes sortaient les affaires usagées, inutiles, les morceaux de bois cassés, qu'ils brûlaient dans la rue, dans la cour de l'immeuble ou regroupées par quartier. Il y avait des feux partout, des pétards, des feux d'artifices, et les gens faisaient la fête, sautaient pardessus le feu.
À la fin de l'année, les gens sont fatigués et en enjambant le feu, ils avaient coutume de dire, en défiant les flammes et afin de prendre de nouvelles forces : " Je te laisse ma couleur jaunâtre et je te prends ta couleur rougeâtre."
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Hedieh Tehrani
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Sources :
http://www.critikat.com - Arnaud Hée
http://www.allocine.fr
http://www.fichesducinema.com
http://www.atmospheres53.org
http://distribution.memento-films.com
http://www.cinemovies.fr