Dans le cadre de la semaine Coréenne de Chris.
J’ai vu ce film, il y a plusieurs années, grâce à l’invitation réservée à une personne qui ne pouvait se rendre à la projection privée, réservée à un public "averti". Curieux de découvrir le cinéma coréen, j’y suis allé, sans rien connaître de l’ensemble de ses productions et encore moins de celles du réalisateur, Im Sang-soo. Je suis resté scotché par la force et le réalisme de la mise en scène. Les images sont à couper le souffle. Le scénario solide nous entraine dans les vies entremêlées des principaux protagonistes. À la fin de la projection j’ai entendu des avis dithyrambiques, d’autres beaucoup moins favorables qui jugeaient le film trop pornographique. Tout le contraire de mon ressenti. Je me suis esquivé pour rester avec mes seules impressions. Un certain éblouissement. Toutes les scènes sont fortes et magnifiquement mises en lumière dans tous les instants de ces vies. (De nos vies ?) Du plus horrible avec la mort de l’un des personnages, au désespoir absolu d’une femme insatisfaite. Les acteurs sont tous excellents. J’en retiens, des années plus tard, l’éveil de ces deux femmes qui poussent, avec un certain courage, toutes les portes qui les enfermaient dans leur condition de femmes asservies, pour gagner leur propre liberté. Vers leurs désirs profonds. Vers une libération salvatrice qui donne dans le même temps un grand souffle d’espoir. Plus qu’un film réussi, c’est un grand moment de cinéma, fort, violent et beau. Incroyablement simple et pourtant inoubliable.
En ce qui me concerne c’est un chef d’œuvre.
Réalisé par Im Sang-soo
Avec Hwang Jung-Min, Moon So-Ri, Yun Yeo-Jung,
Kim Inmun, Bong Tae-Kyu, Baek Jung-Rim, Jang Jun-Young
Genre Drame
Production Sud-Coréenne
Titre original Baramnan gajok
Date de sortie en salles 30 mars 2005
Une Femme Coréenne a connu un grand succès en Corée.
De plus, en 2003, le film a été présenté en compétition officielle
à 60e Mostra de Venise et a également reçu
le Lotus d'or au Festival du film asiatique de Deauville en 2004.
"Une Femme Coréenne est l'histoire de ma vie,
celle de ma femme, celle de ma famille, celle de mes amis."
affirme le réalisateur.
Synopsis
La belle Ho-Jung (Moon So-Ri), est mariée à Young-jak (Hwang Jung-Min), un des avocats les plus en vue de Séoul spécialisé dans les affaires criminelles. La jeune femme élève son fils adoptif, Sooin (Jang Jun-Young) pratiquement seule. Son mari, quant à lui partage son temps entre son travail d'avocat, sa jeune maîtresse, Yeon qui débute dans le mannequinat (Baek Jung-Rim) et l'alcool.
Les journées de Ho-Jung sont partagées entre les cours de danse, les balades en vélo, les remontrances de la belle-mère et la lente agonie de son beau-père.
Frustrée sexuellement et humainement, Ho-Jung commence à s'interesser à son jeune voisin Ji-Woo (Bong Tae-Kyu) âgé de 17 ans. Ce jeune homme passe ses soirées à l'épier par la fenêtre en la regardant en cachette avec des jumelles. Elle décide, telle une adolescente, de se laisser séduire.
Le beau-père de Ho-jung (Kim Inmun), fumeur et buveur invétéré, se fiche de sa propre santé, et de celle de son entourage. Il meurt d'une cirrhose du foie, dans d'atroces souffrances. La belle-mère (Yun Yeo-Jung), après le décès de son alcoolique de mari, se débarrasse de son carcan d'épouse "modèle" et refait très vite sa vie, clamant haut et fort son bonheur d'être enfin libérée.
Le mari de Ho-jung continue,malgré les avertissements de sa mère, à mener une vie de plus en plus dissolue qui entraînera la mort tragique du fils adoptif du couple. Young-jak s'enfonce dans l'alcool, la débauche, le mensonge et la violence
Il apprend que sa jeune maîtresse est enceinte. Il décide, dès lors, de lui consacrer plus de temps et l’emmène quelques jours à la campagne. Sur le chemn du retour la voiture de l'avocat tamponne un scooter conduit par un homme ivre. La présence de Yeon à ses côtés est problématique pour Young-jak, qui va user de son influence pour étouffer l'accident. Il achète le silence de l’inspecteur de police présent sur les lieux, s’assure de sa discrétion et témoigne qu’il n’y a eu aucune collision. D’ailleurs il est même prêt à ne pas porter plainte à condition que le tout soit étouffé et qu’aucun rapport n’indique la présence de Yeon sur les lieux.
Ho-jung finit par se donner à son jeune voisin totalement inexpérimenté, va l'initier, avant de quitter son mari, enfin libérée elle aussi.
Young-jak n'ayant pas saisi la perche tendue au décès de son père, est bien parti pour suivre les traces de celui-ci en tombant dans l'avilissement et la déchéance. Il a tout perdu, sa mère qui s'envole vers une autre vie sentimentale, son père décédé mais également sa femme.
La belle Ho-jung va doucement, reprendre sa liberté…
Le réalisateur Im Sang-Soo affirme :
"En Asie - et plus particulièrement en Corée - il n'y a plus beaucoup d'espoir dans le genre masculin. Les hommes ont un trauma, profondément ancré dans leur tête, qu'ils se transmettent de génération en génération. Peut-être pour des raisons historiques, ou à cause d'un vieux complexe d'infériorité vis-à-vis de l'Occident. Les femmes, elles, n'ont pas ce type de complexe. D'après moi il n'y a d"espoir que dans le genre féminin."
Le traumatisme laissé par la guerre civile hante la plupart des films coréens. On en trouve trace, encore, dans Une femme coréenne, lors d'une scène où l'un des personnages principaux, un avocat en vue de Séoul, assiste à l'exhumation de cadavres enterrés dans un trou et fait le coup de poing avec la police, qui souhaiterait éviter que ces morts, jadis fusillés, ne fassent l'objet d'une enquête.
Mais le sujet du film est tout autre explique le réalisateur. L'histoire d'une génération, née dans les années 1960, qui bénéficia de la démocratisation du pays, profita du sursaut économique, vécut l'émergence du féminisme sans y être préparée. Les Coréens ont du mal à assumer un confort et des libertés qui sont longtemps restés pour eux l'apanage des sociétés occidentales.
Ce qui intéresse Im Sang-soo, c'est l'envol de l'épouse vers la liberté. L'aisance avec laquelle elle entretient son corps, faisant sa gymnastique nue dans son salon, prenant la pose du poirier, manifestant un équilibre et un sens très physique de l'harmonie existentielle. Elle a, au propre et au figuré, les pieds sur terre. Le message du film est inscrit dans les scènes sexuelles où la femme est en position dominante, se masturbe afin de compenser l'insuffisance de son partenaire, se plaint d'être devenue asexuée depuis son mariage. En matière de représentation de la sexualité, les Coréens ont moins de complexes que les Occidentaux.
Sources :
http://www.allocine.fr
http://www.cinemovies.fr
http://www.arteboutique.com
http://www.koreanmovie.com
http://www.lemonde.fr Jean-Luc Douin
http://www.imdb.fr