Je ne veux parler que de cinéma, pourquoi parler d'autre chose ? Avec le cinéma on parle de tout, on arrive à tout. Jean Luc Godard
Date de sortie 6 février 2013
Réalisé par Haifaa Al Mansour
Avec Waad Mohammed, Reem Abdullah, Abdullrahman Al Gohani,
Ahd, Sultan Al Assaf, Dana Abdullilah, Rehab Ahmed
Rafa Al Sanea, Mohammed Albahry, Mariam Alghamdi
Genre Drame
Production Saoudienne
En Arabie Saoudite, il n'y a aucune salle de cinéma officielle, et très peu de films y ont été réalisés, comme en témoignent les propos de la cinéaste Haifaa Al Mansour : "J'ai grandi dans une petite ville d'Arabie Saoudite. Je ne veux pas que vous pensiez que j'ai grandi dans un endroit coupé du monde, mais on n'était pas ce qu'on appelle une famille "jet-set". Si mes parents ont eux, beaucoup voyagé, en tant que famille, on ne faisait que des excurtions dans la région. Toute mon enfance s'est déroulée autour de notre village. J'ai toujours lu beaucoup de livres, vu beaucoup de films et voulu faire partie de quelque chose de plus grand.
L'Arabie Saoudite est un pays sans salle de cinéma et qui proscrit le cinéma.
Mais mon père nous a facilité l'accès aux films, et nous avions de nombreuses soirées familiales où nous regardions des films tous ensemble. J'aimais tellement ça, mais je ne me serais jamais imaginé finir réalisatrice, et encore moins la première femme réalisatrice en Arabie Saoudite !"
Haifaa Al Mansour rajoute : "Je suis si fière d'avoir écrit et mis en scène le premier long métrage jamais réalisé dans le Royaume. Je viens d'une petite ville en Arabie Saoudite où on trouve beaucoup de petites filles comme Wadjda. Des petites filles qui ont de grands rêves, de fortes personnalités et tant de potentiel. Des petites filles qui peuvent, et pourront re-façonner et re-définir notre nation. Il était important pour moi de travailler avec un casting entièrement saoudien, de raconter cette histoire avec des voix authentiques. Le tournage a été une incroyable collaboration qui a rassemblé des équipes talentueuses, de l'Allemagne à l'Arabie Saoudite, jusqu'au coeur de Riyad. J'espère sincèrement que le film offre une vision intérieure unique de mon pays, et qu'il parlera à tous, à travers ces thèmes universels que sont l'espoir et la persévérance."
Wadjda, bijou cinématographique venu d’Arabie Saoudite.
Un film qui arrive auréolé de l’émerveillement de ceux qui l’ont vu au dernier Festival de Venise, première véritable fiction saoudienne, et, surtout, premier long-métrage réalisé par une femme saoudienne, Haifaa Al Mansour
En une heure trente, c’est un film qui vous change la perception d’un pays. Non pas qu’il mette à bas les images et les idées que l’on peut avoir sur ce pays à l’islam rigoriste, au contraire. Mais il y met de la chair, des visages et des sentiments, et montre la vie, les émotions, les espoirs, les rêves, les frustrations, les petites luttes qui se déroulent derrière le voile (sans jeu de mot).
De la même manière que les films iraniens comme Une séparation ont changé notre perception non pas de la nature du régime iranien, mais de la société iranienne.
Pierre Haski pour rue89.com. Pour lire l'article complet, cliquez ICI !
Wajda a été doublement primé festival du film de Dubaï.
- Muhr du meilleur long métrage arabe,
- Waad Mohammed prix d'interprétation féminine.
"Le fait d'être primée par un festival d'un pays du Golfe représente beaucoup pour moi",
a déclaré, les larmes aux yeux, Haifaa Al Mansour.
Waad Mohammed
Synopsis
Wadjda (Waad Mohammed), dix ans, habite dans une banlieue de Riyadh, capitale de l'Arabie Saoudite.
Issue d'un milieu conservateur, Wadjda est une fille pleine de vie qui porte jeans et baskets, écoute du rock et cherche toujours à en faire plus que ce qui lui est permis. Après une bagarre avec son ami Abdullah (Abdullrahman Al Gohani), elle aperçoit un beau vélo vert à vendre.
Waad Mohammed et Abdullrahman Al Gohani
Mais au royaume wahhabite, les bicyclettes sont réservées aux hommes car elles constituent une menace pour la vertu des jeunes filles.
Elle le veut à tout prix, pour pouvoir le battre à la course. Mais la mère de Wadjda (Reem Abdullah) lui interdit, redoutant les répercussions d'une société qui conçoit les vélos comme une menace pour la vertu d'une fille.
Déterminée à trouver l'argent par ses propres moyens, Wadjda décide alors de participer au concours de récitation coranique organisé par son école, avec pour la gagnante, la somme tant désirée.
Waad Mohammed
Wadjda est le premier long métrage saoudien réalisé au coeur du Royaume, les précédents films saoudiens ayant été tournés dans d'autres pays, comme les Émirats Arabes Unis. L'événement est d'autant plus mémorable que c'est un film mis en scène par une femme.
Haifaa Al Mansour est la première femme cinéaste d'Arabie Saoudite. Son travail, dans son pays, suscite à la fois l'admiration et la controverse, puisqu'elle évoque souvent des sujets tabous. Elle tente notamment d'incarner la voix des femmes saoudiennes, dont les conditions de vie sont habituellement passées sous silence. Cependant, elle précise bien qu'avec Wadjda, elle n'a jamais cherché à être dans la caricature, qu'il s'agisse des personnages de femmes ou d'hommes : "Certains me considèrent parfois comme une figure polarisante, puisque certaines personnes pensent qu'une femme réalisant des films ou travaillant dans les médias est polémique. Mais ce n'est pas du tout mon intention d'offenser qui que ce soit. Je ne crois pas que semer le trouble soit une bonne chose, je pense simplement que nous devrions réfléchir à comment apporter des changements qui sont inévitables et moderniser notre culture de façon raisonnable. C'est évident que les menaces de mort et tout ce qui s'y rapporte peuvent faire peur, mais on ne peut pas laisser les extrémistes affecter notre travail et les buts que nous souhaitons atteindre dans notre pays. J'espère avoir fait un film aussi proche que possible des vies des femmes saoudiennes, qui les inspirera et leur donnera la force de questionner et défier les difficultés sociales et politiques qu'elles rencontrent. Bien qu'il soit difficile de déconstruire les traditions si profondément ancrées qui refusent aux femmes une existence digne de ce nom, et d'autant plus depuis que ces traditions se mélangent avec des interprétations approximatives de la religion, c'est un but qui est digne d'être poursuivi."
Le tournage n'a pas toujours été facile pour la réalisatrice. Par le simple fait que c'est une femme : "Un challenge et une récompense à la fois. Chaque étape était difficile et c'était une véritable aventure. Je devais parfois courir et me cacher dans le van de la production quand nous tournions à proximité de lieux plus conservateurs, où les gens auraient désapprouvé la présence d'une femme réalisatrice. Et qui plus est qui se mélangeait professionnellement avec des hommes sur le plateau. J'ai parfois essayé de diriger via un talkie-walkie depuis le van, mais c'était tellement frustrant que je sortais alors pour le faire moi-même. On a parfois rencontré des passants qui manifestaient leur mécontentement de voir ce que l'on faisait, mais rien de trop violent. Nous avions toutes les autorisations et permissions nécessaires. Tout s'est quand même passé relativement sereinement.", explique-t-elle.
Reem Abdullah, Sultan Al Assaf et Waad Mohammed
La réalisatrice de Wadjda confie qu'elle est issue d'une famille très libérale et très encourageante à leur égard. Elle se souvient que lorsque elle était enfant, son père l'avait emmenée avec ses frères pour acheter des vélos. Elle en avait choisi un de couleur verte.
Elle se trouve extrêmement chanceuse d'avoir un père qui voulait que sa fille se sente fière d'être une femme.
C'était une tout autre histoire pour ses camarades de classe et ses amis, qui n'auraient jamais rêvé oser demander une bicyclette à leurs parents. Mais Haifaa Al Mansour pense que le coeur de l'histoire parle à chacun d'entre nous, l'idée d'être montré comme différent pour vouloir quelque chose qui habituellement n'est pas acceptable. La culture saoudienne peut être particulièrement brutale et sans pitié pour ceux qui se démarquent. Il y a donc une réelle peur d'être considéré comme un paria. D'une certaine façon, cette histoire est une part de sa vie et des obstacles qu'elle a rencontrés. Une grande partie de son expérience personnelle, et de celle de sa famille et amis se retrouvent dans le film d'une certaine manière.
Ce ne sont pas juste des concepts sortis tout droit de son cerveau.
Ahd
Haifaa Al Mansour aborde un thème difficile, la situation des femmes en Arabie Saoudite, à travers l'histoire, en apparence toute simple, d'une fillette qui veut s'acheter un vélo.
Elle souhaitait ainsi donner à ce débat intellectuel un visage humain, une histoire à laquelle on peut s'identifier et que les gens peuvent comprendre. Le film ne raconte pas une "grande" histoire, mais une histoire simple, celle de la relation entre une mère et sa fille, et leurs vies dans la société. La réalisatrice ne croit pas que les spectateurs veuillent regarder un film en se voyant dicter une leçon, ils préfèrent un voyage émotionnel et touchant. Aussi simple que cette histoire puisse paraître, des thèmes plus complexes y sont présents.
C'était très important pour Haifaa Al Mansour de dresser un portrait précis de la situation des femmes en Arabie Saoudite, et de rendre crédibles les personnages qui sont des gens comme tout le monde qui doivent naviguer à travers le système en place.
Haifaa Al Mansour est réellement impressionnée par toutes ces jeunes femmes qu'elle a rencontrées en Arabie Saoudite. Elles ont grandi dans des villes différentes de la sienne, avec tellement plus d'opportunités. Elle veux aider à bâtir une plate-forme pour ces voix qui ne se font pas entendre, et les aider à raconter leurs histoires au monde entier. "C'est difficile pour les femmes d'être elles-mêmes. Si elles sortent des sentiers battus, elles deviennent controversées, et ce partout dans le monde, mais d'autant plus dans un pays socialement très conservateur comme l'Arabie Saoudite. On attend toujours des femmes qu'elles se comportent de telle manière. Si elles ne le font pas, on les stigmatise. J'espère que mes films aideront certaines à avoir le courage de prendre des risques et parler des choses qui sont importantes pour elles." rajoute la réalisatrice.
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Wadjda est peut-être un film de femmes ! Mais Haifaa Al Mansour ne l'a pas forcément voulu comme tel. Elle souhaitait réaliser un film sur des choses qu'elle connaissait Une histoire qui fasse écho à ses expériences, mais aussi à celle des Saoudiens. Il était important que les hommes dépeints dans le film ne soient pas des caricatures ou seulement des méchants.
Les femmes et les hommes sont dans le même bateau, tous soumis à la pression de la société pour se comporter d'une certaine façon, forcés à agir avec les conséquences du système à chaque décision prise.
La réalisatrice aime vraiment les scènes où on retrouve ensemble Wadjda et sa mère. Je pense que beaucoup d'amour et d'émotion surgissent dans leur relation lorsqu' elles chantent ou cuisinent ensemble.
Les acteurs du film sont exclusivement saoudiens, comme l'explique Haifaa Al Mansour : "Il était important pour moi de travailler avec un casting entièrement saoudien, de raconter cette histoire avec des voix authentiques (...) [que le film] offre une vision intérieure unique de mon pays (...) à travers ces thèmes universels que sont l'espoir et la persévérance."
Les familles saoudiennes ne voulant pas, pour la plupart, autoriser leurs filles à apparaître à l'écran, il a été très compliqué de trouver la bonne actrice pour le rôle le Wadjda. C'est dans les toutes dernières auditions que Waad Mohammed, âgée de 12 ans, s'est démarquée des autres candidates, avec son attitude rebelle et ses Converses qui marquent son identité dans le film : "Toutes les filles que nous avions vues avant n'avaient pas ce truc en plus. Elles étaient trop douces, pas assez effrontées. Et soudain Waad est apparue, avec ses écouteurs sur les oreilles, portant un jean et des tatouages sur les mains. Je cherchais également une fille avec une jolie voix, capable de chanter avec sa mère, de mémoriser et psalmodier le Coran.
Waad a une voix très mélodique et très douce. Et je savais qu'elle formerait un bon duo avec Reem Abdullah, qui interprète sa mère dans le film. Reem a su s'adapter. Je trouve sa performance très forte., se remémore la réalisatrice Haifaa Al Mansour.
Bien qu'elle ait déjà joué dans quelques pièces de théâtre locales, Wadjda est le tout premier film de Waad Mohammed.
Reem Abdullah, qui interprète la mère de Wadjda, est une comédienne très célèbre en Arabie Saoudite. Issue d'un milieu traditionnel, et ayant vécu toute sa vie dans le Royaume, elle est plébiscitée pour ses choix qui questionnent le rôle des femmes dans la vie privée. Elle débute sa carrière dans le programme "Tash Ma Tash", une comédie saoudienne célèbre pour ses dialogues libéraux et sa critique des idéologies extrêmes et intolérantes qui circulent dans la société. Sa carrière télévisuelle connaît toujours un grand succès. Wadjda est son premier film au cinéma.
Sources :
http://ilovefilmdoyou.wordpress.com
http://www.cinemovies.fr
http://www.imdb.com
http://www.allocine.fr