Date de sortie 22 avril 2015

Réalisé par et avec Emmanuel Mouret
Anaïs Demoustier, Virginie Efira, Laurent Stocker,
Michaël Cohen, Thomas Blanchard, Mathilde Warnier, Olivier Cruveiller
Genre Comédie dramatique
Production Française
Synopsis
Clément (Emmanuel Mouret), instituteur, est comblé jusqu'à l'étourdissement : Alicia (Virginie Efira), une actrice célèbre qu'il admire au plus haut point, devient sa compagne.
Tout se complique quand il rencontre Caprice (Anaïs Demoustier), une jeune femme excessive et débordante qui s'éprend de lui.
Entretemps son meilleur ami, Thomas (Laurent Stocker), se rapproche d'Alicia...
Emmanuel Mouret croise Virginie Efira
Relevé sur unifrance.org
Caprice pose l’une des grandes questions amoureuses : doit-on se fier à l’instinct ou au destin pour trouver son âme soeur ?
Virgine Efira : À mon sens, les deux sont fortement liés. Alicia est obsédée par une prémonition selon laquelle elle va rencontrer quelqu’un qui ne sera pas du même milieu qu’elle. Mais elle y est réceptive parce que cela correspond à une envie, un instinct profond. Autour de moi, j’entends beaucoup de gens évoquer ces fameux "signes" mais c’est ce que l’on en fait qui m’intéresse vraiment. À partir du moment où ces "appels du destin" résonnent en soi, il y a une certaine beauté à se laisser guider. Dans le film, Emmanuel n’impose jamais au spectateur une direction, ne tranche pas entre instinct et destin, ce qui me convient tout à fait !
Emmanuel Mouret : Personnellement je ne crois ni au destin, ni à l’instinct. Je ne suis sûr de rien, et c’est peut-être ça qui rend les histoires amoureuses si passionnantes ! Est-ce que j’éprouve réellement tel sentiment envers une femme ou est-ce parce que j’ai follement envie de l’éprouver ? Lorsque l’on se raconte nos histoires amoureuses, on parle sincèrement de magie, puis quand elles s’achèvent, on se dit qu’on se racontait des histoires ! Ces deux sentiments sont justes, authentiques. L’amour est peut-être un honnête mensonge ! Une rencontre amoureuse un heureux malentendu ! Dans Caprice, Clément et tous les personnages portent, de façon plus ou moins apparente, un rêve. Et la personne "élue" doit forcément coïncider avec ce rêve. Et, quand elle ne rentre plus dans le cadre assez rigide de notre rêve, c’est là que les problèmes commencent !
Le couple Clément/Alicia s’établit sans se soucier des préoccupations habituelles, comme celle de la famille recomposée...
Emmanuel Mouret : Le sujet est ailleurs, ce n’est pas de ça que parle le film. Pour Clément un rêve est en train de se réaliser, c’est tellement beau pour être vrai qu’il attend lui-même quand ça n’ira plus. Comme dans les débuts des films d’horreur, tout va bien, trop bien !
Virgine Efira : À la place d’Alicia, j’angoisserais que tout se construise si joliment avec Clément et leurs enfants. On a envie de gratter sous le vernis, soulever la moquette, sonder les coins obscurs…
Cela peut correspondre aussi à une quête de sérénité, si tant est qu’elle existe : il arrive un moment dans le film où Clément fait le choix de cette vie-là mais la sérénité n’accompagne pas éternellement l’amour. Sinon, ça ressemble à une bulle prétendue invincible. Et je n’y crois pas. Le film parle de la véritable beauté de la vie : celle où ce sont les difficultés, les obstacles, la fluctuation des sentiments, les revirements du cœur qui stimulent le mystère amoureux.
Comme dans la plupart des films d’Emmanuel Mouret, Caprice s’inscrit dans un ton subtilement décalé par rapport au réel...
Virgine Efira : C’est le cinéma que j’aime le plus et c’est ce que j’ai dit à Emmanuel lors de notre premier rendez-vous, avant même d’imaginer pouvoirtravailler avec lui. Je crois davantage à la vérité de l’émotion qu’à l’assurance du "vrai" : il existe une obsession un peu pénible pour un cinéma de l’ultra-réalisme comme si lui seul était garant de sincérité. Révéler des paradoxes souterrains, des élans que l’on ne maîtrise pas, est plus émouvant, plus authentique.
Emmanuel Mouret : Me concernant, le cinéma n’est pas la réalité, le cinéma c’est avant tout du cinéma. De la même façon que lorsque nous écoutons de la musique, nous sommes dans un monde parallèle.
Évidemment nous éprouvons, en regardant un film, des sensations, des émotions qui résonnent avec notre intimité, parfois si profondément que nous avons l’impression que le cinéma c’est la vie. En faisant le film, j’ai été essentiellement guidé par la notion de plaisir que j’ai éprouvé adolescent devant certains films, beaucoup plus que par celle de réalisme.
Plaisir d’être avec les personnages, les décors, la musique, mais également plaisir de géométrie dans la construction dramatique et plaisir des paradoxes.
Virgine Efira : Emmanuel a la délicatesse de ne pas trouver des réponses mais d’élargir le champ des questions. À travers son prisme, le monde et les gens sont un peu plus ronds, plus riches, plus fragiles forcément.
Vous suscitez une forte empathie envers tous vos personnages…
Emmanuel Mouret : Je le souhaite en tous cas. Je tente de révéler leur charme. Je dois mon éveil intellectuel et sensible à des rencontres que j’ai faites adolescent.
Je suis tombé amoureux ; ça n’était pas partagé mais j’étais conquis... Dans un film comme dans la vie, charmer peut engager le rire, le cocasse, même la tristesse.
Virgine Efira : En tant qu’acteur, il ne faut surtout pas chercher à la susciter...
Emmanuel Mouret : ... Comment ? Tu n’as pas conscience de l’empathie que tu peux susciter (rires) ?
Virgine Efira : Très peu (rires). On se sent parfois très étranger à ce que l’on communique à l’écran. Voire très seule quand, par exemple, un film devient une entreprise commerciale qui calcule son effet et fait tout pour l’atteindre. Caprice est l’inverse de cela : avec Emmanuel, on est partis de l’envie d’échanger ensemble, de célébrer la complexité humaine à travers une fiction.
L’une des forces d’équilibre du film est de préserver l’intégrité, la vérité de ces deux femmes
amoureuses.
Emmanuel Mouret : Virginie avait une partition très délicate. Alicia est une actrice célèbre, nantie, reconnue dans la profession alors que Caprice est une débutante sans le sou à laquelle le spectateur pourrait plus facilement s’identifier. Il a fallu faire très attention à ne pas perdre Alicia : au final, elle est plus adorable que son image publique et c’est grâce à Virginie. Quand Alicia apprend qu’elle a été trompée, Virginie le joue en douceur, sans élever le ton. Alicia n’est jamais méprisante envers Caprice. C’est dans toutes ces petites inflexions, ces réactions humaines inattendues, que la beauté d’un personnage se dessine.
Virgine Efira : Au départ, je me suis interrogée sur la tranquillité d’Alicia. Au-delà du confort qu’elle représente pour Clément, Alicia aurait pu déraper dans le conformisme, l’humeur égale un peu casse-pieds, la fadeur comparée à la fougue de Caprice. C’est Emmanuel qui m’a montré une image très inspirante de Marilyn Monroe où elle affiche un émerveillement constant. C’est une arme redoutable. Il existe également des possibles qui jalonnent la trajectoire d’Alicia, des pulsions à l’égard de Thomas qu’interprète Laurent Stocker. Et peu importe qu’elle y cède ou non.
Emmanuel Mouret : La retenue est l’un des points communs et cardinaux à tous les personnages. C’est ce qui nous fonde en tant qu’individu civilisé et qui m’émeut au cinéma.
Virgine Efira : En tant qu’actrice, j’aime l’idée qu’il y a des forces qui nous dépassent. Le pire est de se retrouver avec un personnage figé, barbouillé d’une seule couleur.
Qu’est-ce qu’Emmanuel a pu vous cacher d’Alicia ?
Virgine Efira : Quelques mots, par-ci par-là. Quand il se lance dans des indications de jeu, il lui arrive de ne pas terminer ses phrases (rires). J’avais parfois l’impression de ne pas comprendre ce dont il me parlait alors que tout était clair. Je n’avais pas besoin d’être rassurée. Emmanuel évoquait souvent l’harmonie et cela me suffisait... Nous étions en phase sur Alicia, en éveil constant, donc je n’ai jamais envisagé que le film pouvait se tromper de ton ou de direction.
Emmanuel Mouret : Sur un tournage, le travail est rarement dans l’analyse, mais dans l’écoute les uns des autres. Je ne cache rien de façon préméditée : au contraire, j’adore m’en remettre à tous ceux qui m’entourent et communiquent dans la même direction.
Emmanuel Mouret croise Anaïs Demoustier
À travers le rapport amoureux qui unit Caprice à Clément, le film évoque avec beaucoup d’humour et une dose de cruauté la perte de certaines illusions...
Emmanuel Mouret : C’est un thème qui traverse tout le film jusqu’au dénouement. Trouver la juste fin a été un long processus de réflexion qui s’est accompli lorsque m’est venue à l’esprit cette phrase simple : "On ne peut pas tout vivre"…
Anaïs Demoustier : Caprice est tombée follement amoureuse de Clément. Elle s’accroche à des illusions qu’elle espère transformer en réalité. Emmanuel porte un regard tendre sur cette jeune femme alors qu’elle pourrait être exaspérante : à partir du moment où Caprice est sincère dans son amour et s’entend dire qu’il ne peut pas être vécu, on ne peut qu’éprouver de l’empathie. C’est rare de tomber sur des personnages aussi entiers, généreux dans leur manière de s’exprimer, de se projeter dans une histoire d’amour. Jouer un personnage qui veut tout de l’autre est émouvant. Et les situations n’en sont que plus drôles. Caprice est envahissante et met, souvent sans le savoir, Clément dans un embarras monstre.
Pour une fois, c’est la technique de drague féminine qui est mise en valeur.
Anaïs Demoustier : Caprice fait tout ce qu’il ne faut pas faire pour séduire Clément lorsqu’elle le rencontre au théâtre. Le prétexte des lunettes puis l’histoire des sosies, c’est très drôle, très lourd aussi (rires). Au moins, elle arrive à capter son attention. Caprice a un côté frondeur que j’adore, là où trop de filles ressemblent au cinéma à des petites choses frêles. Caprice a autant de pureté et de candeur que de courage, d’entêtement et de pugnacité.
Emmanuel Mouret : Moi, c’est le côté " science fiction" de l’histoire qui m’a plu (rires). J’aime les personnages "bigger than life". Le cinéma est une terre de fantasmes. Par exemple j’ai toujours aimé les films où de très jolies femmes évoluent autour de gars pas terribles. Qu’une fille drague un homme plus âgé comme le fait Caprice. Lorsque j’ai écrit ce personnage, je n’ai voulu développer aucune théorie : avec Caprice, on ne sait jamais sur quel pied danser. Elle agit, réagit avec énormément de générosité, sans se donner de limites. J’aime que l’on ne puisse pas porter sur elle, comme sur tout autre personnage du film, un jugement définitif.
À l’inverse d’Alicia qui incarne la réussite, Caprice est la tentation d’un ailleurs hors norme...
Emmanuel Mouret : Sauf qu’au fur et à mesure du récit, le cadre de ces deux relations devient plus incertain.
L’idée du personnage est née de souvenirs personnels, de rencontres avec des personnes qui ne pensaient pas faire de mal mais qui se montraient excessives. Elles déploient une énergie incroyable qui heurte nos usages, notre retenue, nos modes de vie si balisés. Ces personnes-là disparaissent souvent de nos vies en un éclair ; c’est à la fois troublant et émouvant.
Anaïs Demoustier : Caprice manifeste un tel enthousiasme, une telle "foi" en Clément qu’elle est désarmante !
Emmanuel Mouret : Qui nous dit que Caprice n’est pas dans la vérité lorsqu’elle prétend qu’ils sont faits l’un pour l’autre ?
Emmanuel, vous vous dites passionné par les personnages féminins. Dans le film, Clément est l’objet de la convoitise de deux femmes sublimes...
Emmanuel Mouret : C’est ce que j’entendais par "science-fiction" (rires).
Anaïs Demoustier : Pas du tout ! Caprice réplique lors d’une scène face à Alicia que Clément est "le genre d’homme avec qui on se sent bien tout de suite". Pour Caprice, et certainement pour Alicia, Clément est le fantasme de l’homme lettré, sensible, fin, subtil...
Emmanuel Mouret : C’est son côté instituteur.
Anaïs Demoustier : Pas seulement. Il est attentionné, délicat. Plus âgé aussi et c’est ce qui séduit Caprice : elle s’est projetée avec un homme plus expérimenté parce qu’elle considère les hommes de son âge dépourvus de profondeur. Clément représente tout ce dont elle rêve !
Emmanuel Mouret : Disons que c’est un homme gentil.
Anaïs Demoustier : Il est tellement rassurant...
Emmanuel Mouret : Quand j’étais adolescent, j’adorais les films avec de grands maladroits comme Buster Keaton, Pierre Richard et Jerry Lewis. Il se trouvait toujours une femme sensible à leur gaucherie, à leur gentillesse et qui tombait amoureuse. Cela a donné beaucoup d’espoir à l’adolescent coincé que j’étais.
Autre manifestation du désir féminin, plutôt rare au cinéma, celui où Caprice propose à Clément de tromper Alicia en invoquant cet argument imparable : "Sois infidèle. Ne sois pas égoïste".
Anaïs Demoustier : Je la trouve surtout très pragmatique (rires). Elle est prête à tout pour vivre cette histoire et c’est une proposition tout à fait réfléchie de sa part.
Emmanuel Mouret : Je n’ai pas écrit ces dialogues pour marteler une solution mais pour servir la vérité amoureuse des personnages. Par ce biais de fiction, j’encourage le spectateur à se poser des questions (rires). Pour certains, le mensonge n’est pas viable ; pour d’autres, la solution que propose Caprice mérite d’être examinée.
Anaïs Demoustier : Et on comprend que Clément s’interroge (rires). Emmanuel a cette qualité de valoriser l’intégrité de ses personnages : Caprice est dans son droit parce qu’elle aime cet homme ; Clément est dans son droit parce qu’il est mal à l’aise avec la tromperie. On préférerait que ni l’un ni l’autre n’ait à souffrir, à choisir...
La position du spectateur est fluctuante, l’empathie envers tel personnage ne cesse d’évoluer. Comme si, en amour, il ne pouvait y avoir ni victime, ni coupable...
Emmanuel Mouret : Le cinéma que j’aime et que je tente de faire est le spectacle de l’acceptation de nos contradictions. C’est une école de l’existence, aussi humble soit-elle, où l’on confronte la conduite à la morale. Les grands principes s’effondrent face à nos errances, nos erreurs mais c’est aussi l’occasion de considérer les autres et le monde avec un regard inédit. Être moins exigeant permet d’être davantage tolérant. Il ne s’agit pas d’excuser ceux qui se fichent de la morale mais de s’épargner les donneurs de leçons. Faire des films autour du désir et des sentiments, c’est accepter la fragilité et la mouvance des êtres. À la fin du film, Clément fait un choix mais les souvenirs et les personnes aimées perdurent en lui.
Emmanuel, comment avez-vous travaillé avec Anaïs ?
Emmanuel Mouret : Anaïs m’a semblé très indépendante dans sa manière de préparer, de construire son rôle. Sur le tournage, j’ai eu un vrai plaisir à découvrir le résultat.
Anaïs Demoustier : Je préfère travailler tranquillement dans mon coin, c’est vrai ! Avec Emmanuel, c’est davantage une question de rythme et de musicalité. Il n’est pas dans l’analyse des personnages ; il se laisse guider par des envies, comme celle de voir Caprice bifurquer, s’imposer à Clément au moment où l’on s’y attend le moins... Travailler sur un film d’Emmanuel, c’est une expérience originale : le scénario est très structuré et son écriture porte la singularité du ton comme du rythme. Tout ce que j’avais aimé dans ses films s’est retrouvé sur le papier puis lors du tournage. Pour un acteur, il s’agit de se fondre dans un univers pleinement caractérisé. J’y ai goûté un mélange de tendresse, de burlesque, d’égarements et de mélancolie au service
d’un thème fondateur : les relations amoureuses. Peu de films français reposent à ce point sur les acteurs, le plaisir de la langue, la théorisation du sentiment et sur ce personnage masculin lunaire, hors du temps, qu’Emmanuel décline de films en films.
Emmanuel Mouret : Je n’ai pas cette distance sur moi. Ce qui ne cessera jamais de m’inspirer est que le cinéma permet la confrontation entre ce que les personnages disent (d’eux et du monde) et la réalité de ce qu’ils traversent. Ce décalage m’amuse autant qu’il me fascine et me trouble. Il est pour moi à la fois un chemin de connaissance et de plaisir.
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Mon opinion
Emmanuel Mouret réalise, scénarise et tient le rôle principal de ce Caprice.
Un joli titre pour ce film dans lequel l'amour est roi.
L'ensemble d'une apparente légèreté, un rien insolite mais avec une certaine profondeur se veut et reste une sympathique comédie sentimentale. Tout l'univers du réalisateur et ses références cinématographiques offrent quelques beaux moments de pure comédie.
Caprice est un agréable divertissement servi par un trio d'acteurs convaincants auquel Laurent Stocker vient apporter son talent et une touche bien particulière. Anaïs Demoustier, d'une belle justesse se fond parfaitement dans les propos du scénario et l'univers du réalisateur
Une comédie française qui a le mérite de retenir l'attention tout en restant un sympathique moment de cinéma dans cet univers bien particulier du réalisateur.
Un univers qui a le mérite d'exister, d'une part, de nous divertir d'autre part.