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2 septembre 2016 5 02 /09 /septembre /2016 19:53

 

Date de sortie 31 août 2016

 

Nocturama


Réalisé par Bertrand Bonello


Avec Finnegan Oldfield, Vincent Rottiers, Hamza Meziani, Manal Issa,
Martin Guyot, Jamil McCraven, Rabah Nait Oufella, Laure Valentinelli,
Ilias Le Doré, Robin Goldbronn, Luis Rego, Hermine Karagheuz
Et la participation de Adèle Haenel


Genre Drame, Thriller


Production Française, Allemande, Belge

 

Synopsis

 

Paris, un matin. Une poignée de jeunes, de milieux différents.
Chacun de leur côté, ils entament un ballet étrange dans les dédales du métro et les rues de la capitale.
Ils semblent suivre un plan. Leurs gestes sont précis, presque dangereux.
Ils convergent vers un même point, un grand magasin, au moment où il ferme ses portes.
La nuit commence.

 

Nocturama

Propos de Bertrand Bonello, relevés dans le dossier de presse.



Le film est venu à la fois d’un ressenti du monde dans lequel nous vivons et de désirs formels cinématographiques. J’ai écrit la toute première version il y a cinq ans, tandis que j’étais en train de travailler sur L’Apollonide, un film d'époque, romanesque, tout en opiacé, et j'avais envie, en contrepoint, de faire ensuite un film ultra contemporain, pensé de manière inverse, très direct, plus comme un geste.
J’ai donc écrit très vite une version, qui répondait à ce climat que je ressens depuis longtemps, que je qualifierais "d’effet cocotte minute", c’est-à-dire quelque chose qui frémit et face auquel je me pose souvent la question de "Pourquoi ça n'explose pas" ? Évidemment, le propre du comportement humain, c'est de s'adapter, d’intégrer et d’admettre des choses qui, finalement, sont inacceptables. Puis de temps en temps dans l'Histoire, il y a une insurrection, une révolution. Un moment où les gens disent stop. Il y a un refus.
Je suis parti de ce postulat que j'ai eu envie de tirer vers le cinéma de genre. Dans le sens où très vite, j’ai voulu m’intéresser à la question du Comment plus que celle du Pourquoi. Le Pourquoi, la scène avec Adèle Haenel le prend en charge : "Ça devait arriver" dit-elle. Oui, il suffit de marcher dans la rue, de sentir la tension extrêmement palpable, ou d’ouvrir le journal pour se dire qu’en effet, ça pourrait arriver. C’est pour cela que le film démarre sans préambule.
Comment on passe à l'acte, de quelle manière ça se fait, dans le film, le geste est, pour moi, plus important que la parole. L'action face au discours, c'est le "comment" face au "pourquoi". Le mystère fait aussi partie du cinéma et je ne voulais pas essayer de rationaliser des choses qui ne sont pas toujours ni explicables ni justifiables.
Le scénario s’est tout de suite appelé Paris est une fête. Cette antiphrase correspondait complètement au film que je voulais faire. Je l’ai mis de côté pour tourner Saint Laurent, puis j’ai repris la préparation pour un tournage à l’été 2015.

Pendant la post production, le titre Paris est une fête a pris un tout autre sens et il fallait évidemment en changer, je me suis alors tourné naturellement vers la musique. Nocturama est le titre d’un album de Nick Cave. J’aimais l’idée de cet hybride entre le latin et le grec qui voudrait dire vision de nuit, je lui ai demandé l’autorisation. Il a accepté, et m’a expliqué qu’en fait le mot désignait dans un zoo la zone créée spécifiquement pour les animaux nocturnes. Ça m’allait très bien. Nocturama renvoie aussi à l’idée de cauchemar.

 

Nocturama

Du réel à la fiction


En tant que cinéaste, je ne suis pas là pour me substituer à un journaliste, un sociologue, ou un historien. Mon but n’est pas de décrypter l’actualité, ni de la commenter. De toute manière, l’actualité est trop rapide pour le cinéma, qui sera toujours dépassé s’il essaie d’y coller. La force de la fiction est ailleurs. Dans la recréation d’un monde, avec ses règles, ses logiques, des lignes de force qui lui sont propres. Poser un regard plus qu’une analyse.
Qu’on ressente ou s’inspire du réel est pour moi une nécessité, mais il faut ensuite s’en dégager et se l’approprier. Se sentir libre. Le réel, on le retrouve de toute manière ailleurs : le choix d’un acteur, d’un décor.

 

De l’extérieur à l’intérieur


La structure est la première chose qui est venue. Ça a été la base. Une première partie avec des personnages isolés, à l’extérieur, en mouvement, seulement soutenue par des trajets et des actions, des personnages à peine réunis le temps de deux flashbacks impressionnistes. Puis une partie où ils sont ensemble, non plus dans l’action, mais dans l’attente. Le passage de l’extérieur à l’intérieur permet aussi un passage d’une réalité à une abstraction, d’un monde réel à un monde fantasmé.


Nocturama.

Dès que les personnages rentrent dans le grand magasin, il n'y a plus d'extérieur, il n'y a plus de fenêtre. Il n'y a plus de portable, il n'y a plus rien et on se réinvente quelque chose. La fiction et le mental prennent le dessus sur l'extérieur.
 

 

 

Et puis, à un moment, un personnage ressort à nouveau. Il tente presque de s’échapper, pour s’apercevoir in fine, qu’il n’appartient plus au monde extérieur. Qu’il n’a plus rien à y faire. Et il revient.

 

Le hors-champ


J’ai immédiatement fait le choix de n’être qu’avec mon groupe de personnages. Tout est de leur point de vue. Et nous, comme eux, nous ne savons pas exactement ce qui se passe à l’extérieur, excepté parfois via les écrans de télés. Je ne voulais pas de montage parallèle.
D’une part, pour me concentrer sur l’idée du temps qui passe, et d’autre part, parce que ce qui m’intéresse, ce sont eux, c’est cette micro société qu’ils forment, obligée de se reconstruire pour survivre. Le hors-champ nous rapproche d’eux.

Paris


Je voulais filmer Paris de manière réaliste, y compris dans ses aspects les plus durs. C’est une ville extrêmement difficile à filmer, une très belle ville mais abîmée par sa vie interne, par ses signalétiques, panneaux, pubs, travaux, etc . Mais j’ai décidé de composer avec tout cela. Les trajets des personnages font partie de ce réalisme.
Pour les scènes dans le métro par exemple, nous avons tourné en mode quasi documentaire. Sans rien privatiser. Nous sommes partis, au milieu des gens. Je voulais montrer la richesse du métro, toutes ces atmosphères différentes, via ce ballet du début.
Le choix des "cibles" répond quant à lui à ce besoin qui traverse le film de passer de l’effet de réel à celui de déréalisation. Je n’ai rien contre HSBC ni contre le Ministère de l’Intérieur. Mais ils sont là. Ils font partie de notre vie, de notre environnement, de notre quotidien. C’est une idée de la répression, du capitalisme, de l’étouffement. Le face-à-face entre une gamine de banlieue et Jeanne d’Arc est l’une des toutes premières images que j’avais dès l’écriture. C’est pour moi une certaine idée de la France. Je ne voulais pas d’attaques aveuglément meurtrières. Je préférais aller sur des symboles.
Au départ, je craignais que mes jeunes acteurs me disent que cela ne leur évoquait pas grand chose mais en en discutant avec eux, j’ai compris au contraire que cela leur parlait beaucoup et que je n’étais pas tombé bien loin. Dans un discours politique et critique, ils évoquaient spontanément des institutions financières, le Ministère de la Justice, les médias, l'oppression économique et tout ce qui leur semble aujourd’hui être une prise de pouvoir sur leurs pensées, sur leurs libertés.

 

Le grand magasin


Les grands magasins de ce genre sont des lieux fascinants. De vrais lieux de fiction. Dans le sens où ils sont la recréation du monde à l’intérieur du monde. Tout y est. Toute la "vie" est là, de la baignoire à la nourriture, du lit aux télévisions ... c’est aussi un symbole du consumérisme de notre époque, y compris dans sa virtualité.
Après avoir attaqué violemment le monde extérieur, les personnages se retrouvent enfermés dans ce monde intérieur. Et ils se font happer. C’est inévitable. Chacun, en effet, se retrouve à un endroit de ce magasin. Parce que c'est ce qu'il voudrait être, ça le fait rêver, c'est facile, il en a besoin, ou bien encore parce que c'est tout simplement lui-même...

 

Nocturama.

Il y a deux scènes, par exemple, où un personnage se retrouve face à un mannequin habillé comme lui. La première, on est dans le consumérisme et la seconde on est dans la mort. Dans la disparition de soi-même.

 

 


Alors que les choses sont si difficiles à obtenir dans la vie, ici, tout est simple. Ça devient un lieu de liberté, même si factice. Du coup, ils se permettent tout, allant jusqu'à prendre un bain, faire du kart ou encore un spectacle. Parmi toutes les idées que j’avais, j’ai gardé les choses les plus incongrues car ce sont pour moi les plus belles. J’ai préféré le rêve au trivial ou au matérialisme.

 

Le choix des interprètes


Parmi les acteurs, seule la moitié a déjà eu une expérience de cinéma, l’autre moitié aucune. Je tenais à ce mélange et à cette proportion. Ces derniers amènent, sans les composer, des choses magnifiques, qui sont leur visage, leur manière de bouger, la musique de leur langage. J’adore les acteurs mais j’ai pris ici un plaisir inouï à filmer d’autres visages, des corps nouveaux, des manières de se tenir, parfois maladroites mais nouvelles. Je savais en écrivant que je ne mettais en place que 50% des personnages. Que le reste, ce sont les acteurs qui me l’amèneraient, avec leur personnalité, leur manière d’être, qui ils sont. Je me disais souvent que la mise en scène devait être du côté de la fiction, et que la direction d’acteur devait être du côté du documentaire.
Le casting a duré près de neuf mois. J'ai rencontré toutes sortes de jeunesse. J'étais dans le romanesque et dans le fantasme en écrivant. Mais en les rencontrant, j’ai été surpris de voir à quel point ce que je leur racontais de cette histoire n'était pas du tout extraordinaire pour eux. Ils me disaient : "Ça me semble normal, ça me semble logique, il nous manque juste un peu de courage, un peu d'organisation... Moi je suis non violent mais je pourrais le faire"...

Nos enfants / Une jeunesse perdue


Maintenant que je regarde le film fini, il y a quelque chose dont je ne me rendais pas compte en l’écrivant. Quelque chose en eux qui est encore dans l’enfance et que je trouve assez bouleversant, et le film raconte aussi cela : Voilà ce qu’on a fait de nos enfants. Le point de vue le plus fictionnel du film, c’est son postulat de départ : vouloir rassembler des jeunes d’univers géographiques et sociaux différents, que la société fait tout pour diviser. Les rassembler dans une idée commune. C’est le côté un peu "punk" de la genèse du film, dans le sens d’une utopie quasi adolescente, dans un désir de refus, voire de destruction. Ce qui m’intéressait c’est qu’ils partagent tous cette envie de dire stop... D’une autre manière, on voit depuis quelques semaines, dans les rues, sur les places, des mouvements de jeunes se créer pour exposer à leur manière également un refus.
En préparant le film, j’ai relu Discours de la Servitude Volontaire de La Boétie. Un livre très court mais extrêmement puissant qui est un appel à l'insurrection. Je ne me souvenais plus qu’il avait été écrit par un gamin de vingt ans au XVIème siècle. La Boétie y explique qu'il y a un moment où l'Homme accepte des choses que l'animal n'accepterait pas. Et Nocturama est avant tout un film sur le refus. La seule manière de l’exprimer était de former un groupe hétérogène et d'essayer de trouver une logique, une évidence, dans la manière dans laquelle ils puissent être ensemble. Cet "être ensemble", comme on le dirait du "vivre ensemble", était fondamental. Dans le début du film par exemple, ils fonctionnent seuls ou par deux, trois mais ne sont que rarement ensemble, sauf dans ce flash back pendant lequel il y a une scène de danse. Presque une transe. Je voulais vraiment que quelque chose les réunisse sans passer par le discours ni le dialogue. J’ai enregistré une musique à la fois rythmique et ambiante et je les ai plongés dedans. Et puis, je les ai laissés libres de s’en emparer. Chacun a fini par trouver son espace dans la pièce et dans le son.

 

Nocturama

 

La mise en scène


J'étais obsédé par le mélange d'ultra réalisme et d'abstraction. Le réalisme, avec les trajets, les détails, tous très documentés, HSBC, Manuel Valls…L’abstraction, c’est plutôt l’intérieur, la déconnexion.
J’ai donc beaucoup travaillé sur des mouvements, des gestes. Une forme d'action, qui n'est pas le film d'action à l'américaine, mais qui doit, quand même, apporter de la tension. Et à l’intérieur de cette tension, je savais qu’il fallait prendre du temps, parfois quasiment du temps réel, y compris passer du temps avec les personnages pour ne pas les marionnettiser, que l’on soit vraiment avec eux du début à la fin. Le film est extrêmement préparé. Chaque mouvement, chaque point de vue, chaque changement de point de vue. Il est construit comme une partition.
Le plus délicat était ensuite de trouver une tension dans l’attente, quand ils sont dans le magasin. A partir du moment où on ne sait pas ce qu’il se passe à l’extérieur, il faut gérer le temps qui passe avec le hors champs.
De la même manière, j’ai beaucoup travaillé la place des plans en mouvement et des plans fixes. Par exemple, au moment où le personnage joué par Finnegan Oldfield sort du magasin, j’ai eu envie de tableaux très simples. Des plans fixes, dans un Paris totalement vide, avec un acteur qui traverse le cadre. La séquence apporte du calme. On ne joue pas l'hystérie de l'extérieur mais, au contraire, le vide. Même si ce calme est aussi terrifiant. Est venue enfin l’idée d’une temporalité qui, comme le film, passerait du réel à l’irréel. Je voulais qu’au bout d’un moment dans le magasin, le temps se difracte. On revient un peu en arrière, on change de point de vue, on joue cette idée du "disque rayé"… Plus on avance dans le film, plus le temps explose. Cela instille aussi le déraillement. Et puis, les scènes avec le GIGN. Je les ai mises en place avec un ancien du GIGN. Je ne voulais pas d’un assaut brutal, qu’on appelle "le bouclier", mais plutôt d’une infiltration, lente et implacable, qu’ils appellent "l’enclume et le marteau". Là aussi, le temps s’étire. Dans l’histoire, c’est justifié par le fait que le GIGN ignore le nombre "d’ennemis d’état" (Pour le GIGN, c’est le terme adéquat vu les cibles choisies), s’ils sont armés ou pas. Et cela permet un calme, à mon avis plus fort.
Vient ensuite la question de l’image, de la lumière. C’est la première fois que je tourne en numérique. Je trouve cela très cohérent pour ce film d’avoir une image plus dure, plus froide, plus définie, de ne pas chercher l’esthétique du 35.
Nous avons structuré la lumière dans le grand magasin en cinq parties : Très éclairé, puis totalement sombre puis à nouveau éclairé pleinement, puis à moitié avant que le GIGN ne coupe tout à nouveau. Cela crée des mouvements à l’intérieur du film.
Quant au Scope anamorphique, il amène un côté fiction et la HD amène un effet de réel. C’est toujours le même équilibre délicat à trouver.

 

La musique


Très vite, je voulais que les deux parties du film aient leur propre musicalité, même si parfois l’une se greffe dans l’autre. Un score d’un côté, de l’autre une sorte de juke-box. Ils sont dans le grand magasin, ils passent des disques.
Pour le score, je voulais quelque chose d’électronique, mais qui ne soit pas de l’électro. Quelque chose de mental et de pulsionnel. Que cela passe par des soubassements, par un travail sur les fréquences. Comme j’ai la chance de pouvoir faire ma musique, je m’y attelle dès le travail d’écriture scénaristique, pour avoir la texture musicale en même temps que le script. Sur le choix des disques qu’ils passent, les morceaux se sont imposés très vite pendant l’écriture et n’ont plus bougé. Et puisque le film s’appelait Paris est une fête, il me semblait cohérent qu’il y ait à un moment l’idée de spectacle, d’un spectacle final. J’ai pensé grand magasin, escalier, descente d’escalier… Et donc à My Way. C’est la scène la plus irréelle du film. Elle marque encore plus cette rupture avec l’extérieur et fait basculer le film dans quelque chose de très onirique, de faux, de théâtral. Mais surtout pour moi, de tragique. Là, j’y vois la fin, la mort. De la même manière, la musique de The Persuaders a été une évidence. J’aime la mélancolie qu’elle dégage. Mais l’idée à ce moment-là, alors que l’assaut débute et que la mort approche, était aussi de ramener de l’enfance. La mienne, la leur.

 

Nocturama

Mon opinion

 

La première image survole un Paris magnifique. C'est beau et rapide. Dans le métro, ses couloirs, ses wagons, ses entrées et sorties, des jeunes gens, qui ne semblent pas se connaître, paraissent tous déterminés et pressés. Tout est réglé comme un ballet. C'est assez long.

 

Si le scénario prend son temps pour dévoiler le récit, l'atmosphère devient rapidement étouffante. Nous ne saurons que peu de choses sur chacun des protagonistes qui s'attaqueront à un ministère, une banque ou encore la statue de Jeanne d'Arc. Pourquoi ?

Bertrand Bonello précise :

"J’ai donc écrit très vite une version, qui répondait à ce climat que je ressens depuis longtemps, que je qualifierais "d’effet cocotte minute", c’est-à-dire quelque chose qui frémit et face auquel je me pose souvent la question de "Pourquoi ça n'explose pas" ?

 

Les actes et les crimes commis augmentent le questionnement du le spectateur. L'anxiété de ces "ennemis de l'état" devient contagieuse. La mise en scène est irréprochable. Il en va de même pour les éclairages de Léo Hinstin tout autant que pour les décors de Katia Wyszkop. Avec un bémol toutefois, cette avalanche de marques, de créateurs ou de linge de maison, trop visibles et quasi omniprésentes. Une publicité trop appuyée, gênante, et qui n'apporte rien.

 

Un film prémonitoire ? On peut espérer que non.

Une réflexion sur notre temps, certainement.

 

Avec des moments particuliers et parfaitement réussis.  Tels, le play-back de My Way, chanté par Shirley Bassey, "la scène la plus irréelle du film" précise le réalisateur. Ou encore ces moments de silence angoissants.

 

Ce film est étourdissant, voire hypnotisant, de bout en bout.

1 septembre 2016 4 01 /09 /septembre /2016 20:03

 

Date de sortie 24 août 2016

 

Rester vertical


Réalisé par Alain Guiraudie


Avec Damien Bonnard, India Hair, Raphaël Thiéry,

Christian Bouillette, Sébastien Novac, Basile Meilleurat, Laure Calamy

 

Genre Drame


Production Française

 

Synopsis

 

Léo (Damien Bonnard), sénariste, ou réalisateur est à la recherche du loup sur un grand causse de Lozère lorsqu’il rencontre une bergère, Marie (India Hair). Celle-ci vit avec son père, Jean-Louis (Raphaël Thiéry).

Quelques mois plus tard, Léo et Marie ont un enfant. En proie au baby blues, et sans aucune confiance en Léo qui s’en va et puis revient sans prévenir, Marie les abandonne tous les deux.

Léo se retrouve alors avec un bébé sur les bras. C’est compliqué mais au fond, il aime bien ça. Et pendant ce temps, il ne travaille pas beaucoup, il sombre peu à peu dans la misère.

C’est la déchéance sociale qui le ramène vers les causses de Lozère et vers le loup.

 

Rester vertical -

 

India Hair et Damien Bonnard

Entretien avec le réalisateur relevé dans le dossier de presse.

 

Votre cinéma se singularise beaucoup par son goût pour la nature... et par une très forte incarnation sexuelle. vous êtes sans doute l’un des moins pudiques parmi les cinéastes français.


La question du sexe, je tourne autour depuis toujours, et comme pour beaucoup d’entre nous, elle me fascine autant qu’elle me fait peur. C’est même ça qui la rend si intéressante ! Mon approche part donc de très loin, peut-être même d’un point de vue si enfoui qu’elle était parfois difficilement repérable. Mais après avoir surmonté mes premières peurs, j’ai voulu dépasser les suivantes, et ainsi de suite comme un défi. D’où sans doute cette impression d’impudeur, mais ça n’est pas volontaire. Ce qui m’importe c’est que ça ne soit ni grave ni solennel.

 

Au début de Rester vertical, c’est très sage. On entre dans votre film comme dans un conte pour enfants qui se mettrait en place sous nos yeux : un vieil ogre, un jeune homme, l’orée d’une forêt et un noble chevalier qui débarque...


Rester verticalJe crois qu’il a toujours été très important pour moi d’établir des ponts entre ma vie d’hier et celle d’aujourd’hui à travers le conte, la légende, le mythe. C’est important pour moi d’aller chercher dans cette direction. Ça nous est essentiel depuis la nuit des temps. Cela grandit nos vies, les remet en perspective, nous fait communiquer avec ce qui nous dépasse, la grande aventure de l’homme et de l’univers.

 

Le personnage de Jean-Louis est, dans ce sens, tout à fait mythologique, avec son corps et sa tête hors du commun. Beaucoup d’éléments du film rejoignent en effet l’imaginaire du conte : le bourg de Séverac surplombé par un château, les zones mystérieuses du marais poitevin et, bien sûr, le loup...

 

Certaines scènes quittent le registre du conte pour emprunter celui du rêve, voire du cauchemar.

 

Il y a toujours eu dans mon travail une dialectique entre rêve et réalité qui me permet d’y voir plus clair, de dégager les horizons, d’ouvrir des brèches. J’ai toujours fait ça mais je le signale de moins en moins. J’arrive à me passer désormais des panneaux "Attention : rêve". Le processus cinématographique est lui même très proche de celui des rêves, qui incite à prendre beaucoup de liberté. Il y a une part du film qui est une sorte de vie rêvée, parfois cauchemardée, et cette part vient dialoguer avec l’autre, plus réaliste. Être à l’écoute de cette dimension onirique est peut-être un subterfuge pour ne pas perdre de vue mes rêves d’enfant. Et cette injonction que je ressens d’aller si souvent planter ma caméra en plein champ a sans doute aussi à voir avec ça. Enfant, j’ai adoré la nature et ces moments passés à faire des petits barrages sur les ruisseaux. Je vis maintenant en ville mais j’ai toujours besoin de revenir d’une manière ou d’une autre en pleine nature avec mes films.

Ces parfums d’enfance, de mythe, de rêve, n’empêchent pas Rester vertical de croiser de nombreuses questions urgentes qui agitent la société contemporaine. Mais vos intentions ne paraissent jamais intellectualisées ; elles gardent une spontanéité concrète.


Je ne filme pas les choses pour les forcer, mais pour les mettre sur la table, pour aborder des questions en étant le plus fidèle à la façon dont je me les pose vraiment. Forcer les choses ne me mène à rien. Je préfère l’idée de réinventer le réel, y introduire de la marge, du jeu. Cela permet d’échapper à l’idée de fatalité, de destin. Je ne me vis pas comme un intellectuel même si mon activité principale consiste à écrire. Je suis très travaillé par ces nouvelles questions autour du genre, de la procréation, de la GPA ou de l’euthanasie, mais il est vrai que je ne les théorise pas, et de toute façon, je n’ai pas une opinion très tranchée sur tout ça. J’écris et je filme inspiré par la réalité, l’actualité que je trouve souvent abordées au cinéma de façon trop dogmatique ou illustrative.

 

Rester vertical - Damien Bonnard

 

Rester vertical aborde également le thème très débattu aujourd’hui du suicide assisté, que vous traitez d’une façon fort spectaculaire, pourrait-on dire...


En commençant mon scénario, je me doutais que Marcel mourrait et que Léo serait impliqué mais je n’avais aucune idée préconçue du "comment". C’est en l’écrivant que j’ai compris qu’elle devenait naturellement une séquence-clef du film. Je n’avais pas interprété ça comme un "suicide assisté" au moment même où j’y ai pensé. Mais c’est en écrivant la scène suivante, avec les flics constatant le décès, que la formule a surgi de la logique des personnages. Quant au côté spectaculaire, enfin, ce n’est pas une grande nouveauté non plus : le sexe et la mort, c’est déjà dans la Grotte de Lascaux. Au fond, dans ce film comme dans la vie, ce sont des choses qui viennent intuitivement et arrivent à trouver a posteriori leur raison d’être, leur sens, leur nécessité... et ça fait un film très jubilatoire à construire.

 

Le film semble développer une forme de nostalgie sans regrets sur une époque évanouie, disparue.

"Nostalgie sans regrets", c’est une formule qui me plaît beaucoup. Et même si c’est un lieu commun de penser qu’on était davantage ensemble, plus solidaires, plus collectifs dans les années 70 et même 80 qu’aujourd’hui, je ne peux pas m’en empêcher. Je ne sais pas si ça relève d’une réalité ou si c’est un point de vue subjectif. De façon générale, lorsqu’on est jeune, on est plus en bandes, avec les autres dans une envie de proximité. C’est peut-être plus ma jeunesse (qui au fond n’était pas si géniale) que les années 70 dont j’ai la nostalgie. Il y avait un pays et une façon de vivre auxquels j’étais très attaché, comme ce Larzac qui était pour moi un  "ailleurs" très intense de ma jeunesse, un ailleurs à la fois politique, géographique et affectif, mais ce n’est pas du tout ce pays-là que je filme dans Rester vertical, ou alors pour évaluer la distance qu’on a pris avec cette époque, un monde dont j’ai l’impression qu’il pourrait disparaître. Ce parfum seventies, je me le trimballe, je le cultive même. Il y a une part éternelle en moi qui reste du côté de l’internat de mon adolescence, des virées en meule et des bals du samedi soir.

La nostalgie, c’est un peu inévitable : c’était plus émoustillant de découvrir les Pink Floyd à 15 ans que les Wooden Shjips aujourd’hui, mais je sais que c’est subjectif. Avec l’âge, les découvertes ont moins d’intensité.

Rester vertical

 

D’ailleurs votre film est sans doute moins directement politique que les précédents.


Je ressens pourtant quelque chose de fondamentalement politique dans ce film mais je suis incapable de dire quoi. La question politique ne se pose plus sur le même mode. Comme pas mal de monde, plus j’avance, plus je tâtonne, et plus je suis largué. Bien sûr j’ai stabilisé deux ou trois trucs, forgé quelques principes, gardé quelques certitudes, mais dans l’ensemble, je suis dans le doute... Les choses deviennent de plus en plus compliquées, non ? La question politique la plus directe dans le film, c’est la question du loup. C’est une question très clivante et plutôt indémerdable. Qu’est-ce qu’on fait avec cet animal que certains souhaitent protéger et qu’est-ce qu’on fait avec les bergers ? Si on veut encore des brebis élevées en plein air, un pastoralisme traditionnel, il faut supprimer le loup. Le film fait état de mon propre embarras sur une foule de questions qui en découlent. Est-ce que c’est si important d’avoir des loups en France ? En creusant la question du loup, en discutant avec ceux que cette affaire concerne, j’ai découvert combien ce problème concret pouvait devenir une métaphore, une métaphore politique mais aussi existentielle. Elle fait résonner des thèmes ancestraux, bibliques et débouche sur des impasses très contemporaines.

 

C’est aussi un film sur des hommes seuls.


Des hommes et des femmes. Je n’ai jamais vraiment filmé autre chose : des histoires de gens qui sont seuls ensemble. Et puis je voulais inverser l’image du "parent isolé", montrer que cela peut-être le cas, parfois le souhait, d’hommes d’élever leur enfant seuls, exactement comme une femme qui ne choque plus personne lorsqu’elle fait "un bébé toute seule".

 

Rester vertical.

 

Au fond, n’est-ce pas ce que le héros du film voulait : avoir l’enfant sans s’emmerder avec la femme ? Cela permet aussi de faire un sort à certains clichés : toutes les femmes n’ont pas à être sommées d’avoir l’instinct maternel, par exemple. Je me suis plu à retourner ou à triturer ces questions de société.

 

 

La scène finale avec les loups est baignée dans une lumière très mythologique, avec un petit parfum biblique façon peinture italienne renaissance... elle a un côté bigger than life qui donne une dimension nouvelle à votre cinéma.


Je suis de plus en plus attaché à ça, je crois, le "bigger than life". On en a besoin. Grandir le réel, l’amener vers autre chose. Tout le film tendait vers ça. On dit souvent que toutes les histoires ont été racontées mais je ne trouve pas : Rester vertical, au moins, c’est typiquement le genre d’histoire que je ne vois pas au cinéma. J’ai envie de continuer à pratiquer un cinéma de la rêverie mais aussi, de plus en plus, de le conjuguer avec la brutalité du réel, d’aller chercher l’adversité, les choses pas toujours reluisantes. La contradiction profonde dans laquelle se trouve le héros culmine dans cette scène finale où il voudrait réunir le loup et l’agneau. Il cherche à réaliser une utopie où ils coexisteraient sans dommage. D’une certaine façon, pour résoudre l’équation du film, je me suis davantage laissé porter par l’émotion. Il y a des cas où la logique ne suffit plus. Rester vertical est le premier film où je fais ça aussi clairement.

 

Justement, ce titre...


J’ai lu quelque part que, pour le loup, l’homme est un animal vertical, et que cette verticalité lui inspire la prudence, le respect ou la crainte. En Lozère, j’ai rencontré des gens qui ont entendu dire ça par leurs grands parents : face au loup, il faut rester debout. J’ai aimé la formule. Elle contient aussi cette dimension politique et programmatique qui m’importe beaucoup. Quant à sa connotation sexuelle elle n’est évidemment pas pour me déplaire.

 

Rester vertical

Mon opinion

 

Solitude, instinct paternel, peur du loup, entre autres, sexe, masculin et féminin, baby blues, monoparentalité, gérontophilie, doute, mort assistée, l'étoile du berger, aussi.

 

Tous ces thèmes côtoient l'histoire chaotique d'un scénariste paumé. Entre Brest et la Lozère, la route sinueuse est longue, improbable aussi.

 

Des rencontres incertaines et quelques courts dialogues viendront ponctuer ces allers et retours. Un arrêt chez une naturopraticienne, ou plus simplement guérisseuse, finit par semer un certain scepticisme.

 

L'ensemble est âpre, trouble, souvent cauchemardesque.

 

À la toute fin du film, sous un ciel magnifique, le principal protagoniste, barbu comme les représentations de Moïse, reste debout devant les loups. Un nouveau film de ce réalisateur, libre, très loin de la candeur qui baignait ces premières réalisations.

 

Je suis ressorti de la salle chaos.

 

Rester vertical

31 août 2016 3 31 /08 /août /2016 23:26

 

Date de sortie 31 août 2016

 

Le Fils de Jean


Réalisé par Philippe Lioret


Avec Pierre Deladonchamps, Gabriel Arcand, Catherine de Léan,

Marie-Thérèse Fortin, Patrick Hivon, Pierre-Yves Cardinal


Genre Drame


Production Française et Canadienne

 

"Le Fils de Jean n’est évidemment pas un film à énigme, mais il repose néanmoins sur une révélation que nous tous, comédiens, techniciens et moimême, faisons en sorte de ne pas dévoiler pour conserver intacte sa découverte par le spectateur.
Aidez-nous à la préserver. Merci d’avance."


Philippe Lioret

 

Synopsis

 

À trente-trois ans, Mathieu (Pierre Deladonchamps) ne sait pas qui est son père. Un matin, un appel téléphonique lui apprend que celui-ci était canadien et qu'il vient de mourir. Découvrant aussi qu’il a deux frères, Mathieu décide d'aller à l'enterrement pour les rencontrer. Mais, à Montréal, personne n'a connaissance de son existence ni ne semble vouloir la connaître…

 

Le Fils de Jean - Pierre Deladonchamps

 

Pierre Deladonchamps

Entretien avec Philippe Lioret relevé dans le dossei de presse.

 

D’où vient ce film ?


De la lecture du roman de Jean-Paul Dubois, Si ce livre pouvait me rapprocher de toi. C’est un grand livre, l’un de ses meilleurs. Je l’avais lu il y a longtemps et, même si je ne voyais pas quel film en faire, il m’en était resté quelque chose de fort et je n’arrivais pas à le ranger sur l’étagère. Après Welcome et Toutes nos envies, j’avais envie d’un film solaire et il m’est venu un point de départ qui n’est pas dans ce livre, mais que celui-ci m’a inspiré : celle d’un homme qui découvre qu’il a deux frères inconnus et veut les rencontrer.
Nous avons pris les droits du livre, mais je ne l’ai pas rouvert ; il n’a été qu’une source d’inspiration, un point de départ, donc. Mais sans lui, il n’y aurait pas de film. D’ailleurs, à la lecture du scénario, Jean-Paul m’a dit : “Faites le film, j’écrirai le livre après”. Pourtant, les fondements de son livre sont bien là, mais ce ne sont plus que des mots, comme des mots clés : père, découverte, fratrie, Canada, soeur. L’essentiel en fait. Mis à part le plaisir qu’ils procurent quand on les lit, les livres peuvent aussi servir à ça : inspirer. Les adapter littéralement est rarement possible et surtout assez vain car un bon livre peut susciter une impression de gigantisme qu’aucun écran, si grand soit-il, ne pourra jamais rendre. Et puis cette histoire existait
déjà. Il fallait aller ailleurs. Les personnages du Fils de Jean, je les connaissais bien. Ce garçon qui cherche une famille qu’il n’a pas connue et en trouve une autre de substitution, il m’accompagne depuis longtemps. Et paradoxalement, cette histoire-là, il n’y a pas mieux qu’un film pour la raconter. Le cinéma a une telle force d’immersion que, si l’on parvient à s’identifier aux personnages, ils nous embarquent avec eux.

 

Il y a une technique pour cela ?


Personnellement, je n’en ai pas. Je connais mes limites et, pour les dépasser, je travaille. Je sais juste qu’il faut emmener le spectateur dans un voyage qu’il n’a pas encore fait, alors je le fais d’abord moi-même. Pour Le fils de Jean, j’ai essayé de ne pas me cantonner à “raconter une histoire”, mais de faire en sorte qu’en suivant le parcours de Mathieu, Pierre, Bettina et Angie, il arrive un moment où l’on se sente à deux doigts de percer un mystère qui nous concerne. Je crois que les films qui m’ont troublé, touché et qui sont restés en moi, y sont parvenus grâce à cette sensation de proximité. Et aussi grâce à la rigueur et la simplicité apparente du récit. Alors j’essaie de faire en sorte que le film soit un témoignage que je vais partager. Que celui qui le regarde ait l’impression durable de vivre ces moments-là avec les personnages, d’être à leurs côtés et concerné par ce qu’il leur arrive. Qu’il puisse se dire : "J’y étais". Ma seule "technique" en écrivant le scénario, c’est de ne pas faire version sur version, mais d’avancer avec eux pas à pas. Et tant que les pages derrière moi ne me semblent pas abouties, je n’avance plus ; ça ne sert à rien de construire sur des fondations instables. Et puis, à force de vivre avec eux, il arrive un moment où l’on connait bien les personnages et où ce sont eux qui guident presque le récit, il n’y a plus qu’à les suivre, mais en ayant bien en tête que le moindre détail suspect peut détruire la valeur de l’ensemble ; les dialogues trop explicites, par exemple. "Le mot est dans le regard", disait je ne sais plus qui. C’est peut-être pour ça que ce scénario, même s’il était précis, était moins "vissé" que les précédents. Ce qui nous a donné, aux acteurs et à moi, la possibilité d’y apporter des changements de dernière minute ; j’ai parfois réécrit des scènes la veille de les tourner et, sur le plateau, les propositions nouvelles étaient les bienvenues. Il n’était pas question d’improviser, mais que les acteurs se donnent le droit d’inventer, comme des musiciens qui laissent des allitérations filer sous leurs doigts en oubliant la partition.

Comment avez-vous trouvé ces acteurs ?


Le fils de Jean - Pierre DeladonchampsMathieu devait avoir de l’enfance en lui, c’était la seule chose que je savais. J’ai donc rencontré des acteurs avec cette idée en tête et aucun d’entre ceux qui avaient l’âge du rôle n’en avait suffisamment à mon sens, et je désespérais.

 

Puis j’ai rencontré Pierre Deladonchamps et, dès nos premiers échanges, j’ai cru déceler cette part d’enfance en lui.

 

 

Il a aussi très vite posé les bonnes questions sur Mathieu et nous avons découvert ensemble la nature de cet homme. Après, il n’y avait plus qu’à tourner. Je l’aime beaucoup, il est sensible, impliqué, malicieux et son sens de l’humour m’a plu.

 

Les autres personnages étant canadiens, en écrivant je n’arrivais pas à me projeter, ni à les voir. J’ai visionné beaucoup de films québécois, jusqu’à tomber sur Le Démantèlement le magnifique film de Sébastien Pilote où Gabriel Arcand tient le rôle principal, un film que je vous recommande. Au bout de trois minutes, je savais que Pierre, l’ami de Jean, c’était lui. À tel point que je me souviens m’être dit (et ce n’est pas une formule) : “S’il ne peut ou ne veut pas le faire, je ne le fais pas”.

 

Le fils de Jean - Gabriel ArcandDerrière son air bourru – qui était précisément ce que je cherchais pour le rôle de Pierre –, Gabriel est quelqu’un d’une sensibilité immense qui n’est pas pour rien dans son talent. Il a une grande idée de son métier d’acteur de théâtre et regarde le cinéma avec suspicion, mais quand il sent, et je crois que ça a été le cas, que le film qu’on fait va quelque part et que ce quelque part lui plaît, il se met à le défendre comme si c’était le sien.

 

Il a un tel charisme et aussi une telle fusion instinctive avec son personnage, qu’il a rendu très beau ce type qu’on pourrait, au départ, prendre pour un lâche ou un salaud. Après lui, plusieurs semaines de casting à Montréal m’ont permis de rencontrer Catherine De Léan (la grâce, la fêlure et la beauté réunies) ; Pierre-Yves Cardinal (que j’avais vu admirable dans Tom à la ferme de Xavier Dolan) ; Marie-Thérèse Fortin, une merveille de subtilité (que sait exactement Angie et quand a-t-elle su ce qu’elle sait ?) ; Patrick Hivon… Tous des acteurs inouïs. Même s’ils sont francophones, ces “cousins” – tous des premiers rôles là-bas – sont aussi Nord-américains et ils ont l’engagement des acteurs anglo-saxons. Par exemple, Pierre (Gabriel Arcand) doit, dans le film, jouer une valse de Chopin. Gabriel avait commencé le piano à six ans et arrêté à neuf, et il en a aujourd’hui soixante-cinq. Devant la difficulté technique, je lui ai demandé d’apprendre la première mesure en pensant le doubler pour la suite. Après trois mois d’acharnement, il l’a jouée toute entière et très bien. Et Catherine a fait la même chose. Ils m’ont soufflé.

C’est aussi pour travailler avec ces têtes nouvelles que vous êtes allé au Canada ?


Non. Il fallait juste que ça soit loin et qu’on y parle français. C’était donc ça ou à Tahiti… Il fallait partir. Si Mathieu apprend que son géniteur vivait dans le Jura, son engagement pour aller rencontrer ses frères n’est pas le même. Là, il doit prendre l’avion et s’expatrier trois jours, c’est un acte volontaire qui laisse entendre une nécessité intérieure forte. Il débarque aussi dans un monde où les codes sont différents des nôtres et les découvre. Par ailleurs, le Canada est un pays “qui respire“ et cela contribue au voyage que nous allons faire avec le film. Le pays compte plus de deux millions de lacs, dont deux cent cinquante mille rien qu’au Québec. La nature y est un personnage. À ce propos, la scène où Mathieu et ses deux frères (qui ne savent pas qu’il est leur frère) cherchent le corps de leur père dans le lac est l’une des premières qui m’est venue ; c’est une image qui a été déterminante, mais il y fallait cette démesure de la nature.

 

Le Fils de Jean - Gabriel Arcand, Patrick Hivon, Pierre-Yves Cardinal et Pierre Deladonchamps,

 

Gabriel Arcand, Pierre-Yves Cardinal, Patrick Hivon et Pierre Deladonchamps

 

Le tableau légué à Mathieu tient une place importante, aussi…


Il s’appelle Jeune garçon les yeux au ciel. J’ai mis des mois à le trouver. J’ai d’abord pensé : pas de visage, rien d’identifiable. Alors quoi ? Une esquisse, un motif abstrait ? Je cherchais... Et puis j’ai fini par tomber sur ce tableau et il m’a saisi. Son histoire aussi m’a plu : on ne sait pas qui l’a peint. Sa cote n’est pas celle de son peintre, c’est la sienne propre. C’est un tableau unique… de père inconnu. Chez moi, ça vient souvent du père. Dans L’Équipier, dans Je vais bien, ne t'en fais pas. Même dans Tombés du ciel et dans Welcome, il est question de paternité. Je dois avoir un truc avec ça que je n’ai pas réglé. La famille, c’est d’abord le lieu du secret, le monde du silence.

 

Comment voyez-vous la relation entre Mathieu et Pierre ?


Pierre est un “ours chaleureux”. C’est un type qui a acquis une forme de sagesse. Il a par exemple, contrairement à Jean, tourné le dos à l’argent en abandonnant la médecine lucrative pour une autre qui l’est nettement moins. Il sait que l’argent “ça ne se mange pas”, et tout ça impressionne Mathieu qui, sans qu’il n’en dise rien, découvre un type qui lui plaît. Mathieu, lui, est un garçon déterminé. Il a traversé l’Atlantique pour voir qui sont ses frères et est bien décidé à les
rencontrer. Son obstination, son esprit vif et aussi la part d’enfance qu’il a en lui (nous y voilà) plaisent aussi assez vite à Pierre qui, malgré les problèmes que cela lui pose, se résout à l’aider. Mais les choses se passent très mal avec les frères de Mathieu et celui-ci trouve refuge auprès de Pierre, de sa femme, Angie et de leur fille, Bettina, qui pourraient même bientôt devenir pour lui une famille de substitution.

 

Jusqu’à cette découverte… qu’il serait bien dommage pour le spectateur de dévoiler ici.

 

Le fils de Jean - Gabriel Arcand et Pierre Deladonchamps

Mon opinion

 

Le roman de Jean-Paul Dubois, "Si ce livre pouvait me rapprocher de toi" a été une source d'inspiration pour le réalisateur/scénariste.

 

Le film aborde un sujet grave, douloureux et essentiel, connaître ses racines. Tout en pudeur et réserve extrême la subtilité du scénario traite du secret, jusqu'à la toute fin du film et la révélation finale. Aucun pathos. Juste une exposition de faits.

 

Des plans d'une grande beauté. Quand le principal protagoniste, filmé de dos regarde le lac. Une autre encore, sur un balcon après une nuit trop arrosée, ou celle d'un regard insistant au travers d'un rétroviseur. Des scènes toutes simples et magnifiques.

 

L'autre réussite du film, vient d'un casting absolument remarquable. Pour ma part, la découverte de grandes actrices canadiennes. La très belle et convaincante Catherine Léan, et la non moins remarquable Marie-Thérèse Fortin. Deux jeunes acteurs, Pierre-Yves Cardinal déjà connu  pour deux apparitions chez Xavier Dolan et Patrick Hivon.

 

Avec aussi le formidable Gabriel Arcand dans un rôle d'une grande intensité.

 

Et enfin Pierre Deladonchamps, de toutes les scènes. Il est surprenant. À la fois touchant, timide et déterminé il fait preuve d'un grand talent et bouleverse par son seul regard.

27 août 2016 6 27 /08 /août /2016 10:30

 

Date de sortie 3 août 2016

 

Sieranevada


Réalisé par Cristi Puiu


Avec Mimi Branescu, Judith State, Bogdan Dumitrache,

Dana Dogaru, Sorin Medeleni, Ana Ciontea, Rolando Matsangos


Genre Drame


Productions Roumaine, Française, Bosniaque, Croate, Macédonienne

 

Synopsis

 

Quelque part à Bucarest, trois jours après l'attentat contre Charlie Hebdo et quarante jours après la mort de son père, Lary (Mimi Branescu), 40 ans et docteur en médicine, va passer son samedi au sein de la famille réunie à l'occasion de la commémoration du défunt.

L'évènement, pourtant, ne se déroule pas comme prévu. Les débats sont vifs, les avis divergent.

Forcé à affronter ses peurs et son passé et contraint de reconsidérer la place qu'il occupe à l'intérieur de la famille, Lary sera conduit à dire sa part de vérité.

Cristi Puiu est né à Bucarest en 1967. Alors étudiant en cinéma à l’École Supérieure d’Arts Visuels de Genève, il réalise dans les années 1990 plusieurs courts métrages et documentaires. Passionné de peinture, de retour en Roumanie, il continue à peindre. En 2001, il réalise son premier long métrage, Le Matos et la Thune, road movie filmé à l’épaule dans un style quasi-documentaire. Sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs de Cannes, le film remporte plusieurs prix dans les festivals, notamment à Thessalonique. Lauréat de l’Ours d’or du meilleur court métrage à Berlin en 2004 avec Une Cartouche de Kent et un Paquet de Café, Cristi Puiu tourne ensuite La Mort de Dante Lazarescu, qui reçoit le Prix Un Certain Regard à Cannes en 2005, et de nombreuses autres récompenses. Il signe en 2010 avec le film Aurora le deuxième volet de la série Six histoires des banlieues de Bucarest.


Sieranevada est son quatrième long métrage.

 

Sieranevada

Entretien avec Cristi Puiu relevé dans le dossier de presse.

 

Qu’est-ce qui vous a inspiré l’histoire de Sieranevada ?


C’était en août 2012, durant le festival de Sarajevo, j’étais chez moi. Mirsad Purivatra, le directeur du festival m’appelle et me demande si j’ai un scénario. Non, je n’ai pas de scénario, mais je vais en écrire un. Ce sera un huis clos. Il y aura de nombreux personnages.


Ce qui a amené le contexte d’une commémoration ?


En 2007 mon père est mort. J’étais au jury dans la section Un Certain Regard du Festival de Cannes. Je suis immédiatement rentré chez moi, et la première commémoration, qui a eu lieu juste après l’enterrement, s’est passée d’une manière très bizarre. Il y avait des personnes que je ne connaissais pas, des amis de mon père avec lesquels il buvait des coups, des voisins aussi. Je me souviens que je me suis engueulé avec une collègue de ma mère, à propos de l’histoire du communisme.

 

Comme dans le film avec ce personnage qui regrette le temps du communisme ?


Oui. Des années plus tard, j’en parle avec mon frère, je lui dis : "j’écris un scénario sur la commémoration de Papa, tu te souviens comme on s’est engueulés à propos du communisme ?". Mon frère qui avait participé à ce débat enflammé, me répond qu’il ne se souvient de rien. Pourtant la discussion a été si animée que cette femme a fini par quitter les lieux ! Je commence à exprimer ma version des faits à mon frère, qui persiste : "excuse-moi, mais je ne me souviens vraiment pas de ça". Ça m’a rendu malade, fou furieux, parce que je voulais qu’il me donne des détails supplémentaires. Ça m’a pas mal déprimé. Donc, parfois on retient ou on enregistre différemment les choses.

Les souvenirs, justement, la mémoire des faits sont au coeur de votre histoire. Une mémoire qui constitue et impose une société, comme celle que l’on voit dans le film ?


SieranevadaAu moment où on prend conscience de nous-mêmes, vers l’âge de dix ans, on est déjà éduqué, formaté par l’histoire de notre pays. On va voir les choses d’une manière déjà très balisée. Tout cela mène vers l’inertie. On est prêt à accepter une vérité donnée. On ferme les yeux face aux erreurs possibles.

 

 

C’est le prix pour devenir un membre de la communauté, en être accepté.

 

C’est très important pour vos personnages d’appartenir à la communauté ?


C’est une question de structure. Comme les abeilles, comme les fourmis, les humains vivent en communauté. Si l’on retire un élément de cette communauté, on doit tout reconfigurer. Tout va se recomposer. Quelqu’un meurt, et tout change pour les petites communautés que sont les membres d’une même famille. Il y a une lutte de pouvoir. On va chercher à savoir qui va finalement gagner ce pouvoir. Et chacun vient avec son propre discours, comme dans une campagne électorale.

 

Un discours qui peut aussi évoquer les grands événements historiques comme le personnage qui parle du 11 septembre 2001.


Il est perturbé par tout ce qui se dit autour de cet événement et il a raison de l’être dans le sens où il faut discuter de tout. Mais lorsqu’il construit son raisonnement avec des éléments dont certains sans doute conspirationnistes, trouvés sur internet, là il a tort. Plus généralement, on ne sait jamais qu’une parcelle de la réalité dans l’Histoire. On ne peut pas trouver de réponses définitives. Au fond, la fiction la plus présente dans notre vie, c’est l’Histoire, l’Histoire telle qu’on la raconte à l’école. Moi, je suis très bien placé pour parler de ça, parce que j’ai appris à l’école une certaine Histoire durant le communisme. Le Mur de Berlin est tombé quand j’avais vingt-trois ans. Avec lui une Histoire a disparu, et aussitôt une autre Histoire a surgi, une autre version des faits. Des choses que je ne connaissais pas, moi qui ai beaucoup aimé l’Histoire. J’étais vraiment bouleversé.

 

Le 11 septembre n’est qu’un prétexte pour parler de l’Histoire ?


Oui, j’aurais pu prendre la seconde guerre mondiale. Il se trouve que jusqu’au 11 septembre 2001, mes lectures portaient sur des témoignages des prisons communistes. Je voulais revisiter l’histoire communiste. Les communistes ont falsifié l’Histoire, avec un programme bien clair. Encore une fois, depuis, je pense que personne ne peut croire à une stabilité quelconque de l’Histoire, ni à une vérité immuable. Je crois que l’histoire de l’Homme bouge sans fin et que l’on doit perpétuellement effectuer des réajustements sur ce que l’on croyait être les événements du passé. Tout le temps, tout le temps, tout le temps. Car ce sont des approximations.


Sieranevada.

On est dans la confusion la plus totale. Aujourd’hui il y aurait peut-être une issue de secours, la foi. Mais je ne suis ni catholique, ni orthodoxe.... Mais même si on a tous beaucoup d’idées sur toutes les religions, en réalité on ne sait rien de la spiritualité. On ne fait pas ce chemin-là.

Vos personnages ne font pas qu’échanger, argumenter ou s’invectiver, ils s’intéressent aussi beaucoup à la nourriture, élément très important et très convivial du film !


Oui, et pourtant personne ne réussit à manger, finalement ! Le repas, c’est une ritualisation des choses, c’est compréhensible pour toutes les cultures car c’est présent dans toutes les cultures. Il y a la table, on s’y retrouve. Pour simplifier, la récurrence de la table est une tradition, mais cela donne aussi un faux sentiment de solidarité. Il ne s’agit pas seulement de nourriture, de tout ce dont le corps a besoin, et qui dans le film devient urgent car ils finissent tous par avoir vraiment faim, non, ça devient urgent pour montrer que lorsqu’ils ont faim, ils oublient tout sentiment de solidarité, d’amitié. Cela dit, j’ai montré le film à des amis et ils étaient très contents, car ils avaient envie de manger après l’avoir vu.

 

Les rituels scandent votre film (préparation du repas, bénédiction du pope…), à quoi cela sert-il ?


Cela permet au débat d’être centré sur des sujets qui n’ont rien à voir avec la commémoration du mort, comme avec celle de mon père. En Roumanie, ça se passe comme ça : il y a l’enterrement, on se retrouve après. Puis on se retrouve à nouveau quarante jours plus tard pour commémorer une première fois. Puis un an après l’enterrement, on se réunit à nouveau. Et enfin sept ans plus tard. En ce qui concerne mon père, nous avons fait la commémoration des sept ans en 2014.

 

Pourquoi avoir situé pratiquement tout le film dans un seul lieu : un appartement ?


On vit dans un monde dont on connaît les limites. Ce qui veut dire que le film ne peut pas être conçu autrement que comme un monde en soi, géographiquement limité. C’est pour ça que l’espace est fermé, que cela se déroule dans un appartement en vase clos. Cet espace est la réflexion d’un miroir du monde à l’échelle réduite. Le jour comme la nuit : il y a les deux dans cet appartement. Il y a des pièces plus sombres, d’autres plus claires, avec des décorations différentes, comme des paysages. On ne peut pas s’échapper de cet appartement comme on ne peut pas s’échapper de la planète. Donc il faut assumer et entrer dans toutes les pièces, aller au-devant de l’Autre. La chose la plus importante alors, c’est la rencontre avec l’Autre. Il y a un sens à tout cela. Créer un monde alvéolaire sans communication où chaque individu est enfermé dans sa bulle, sans savoir qu’il y a un autre, ou aller à la rencontre des autres, choisir parmi cette alternative peut tout changer.

 

Sieranevada

 

Et quand un personnage hésite à entrer dans une pièce ?


Il décide d’arrêter la réflexion au moment où ça l’arrange, d’une manière artificielle. Il s’arrête sur le palier du confort. Dès que ça devient inconfortable, on n’y va pas, et là il y a plein de questions qu’on se pose, et qu’on n’ose pas soumettre, débattre… L’appartement permettait d’exprimer tout ça.

Il a été difficile à trouver ?


Avec l’appartement, des choses étranges se sont passées. On a trouvé un logement dont le propriétaire venait de mourir, et le jour où je l’ai visité, on commémorait les quarante jours de sa mort. Cet homme habitait avec ses deux chats. Il est mort, il a laissé les chats dont un qui pleurait. C’était un appartement envahi par la poussière, les poils et les toiles d’araignée, un lieu sans doute intouché depuis longtemps. On a gardé beaucoup d’éléments d’origine pour le film, dont une grande partie du mobilier, des tableaux et même la photo du propriétaire que l’on peut voir à certains moments. Le grand avantage de ce lieu était que l’on pouvait imaginer la trajectoire des personnages dans un espace où très vite on intègre les frontières, les limites de chaque pièce qui renferment toutes un monde. Tout un concert de portes qui s’ouvrent et qui se ferment. Les portes sont très présentes dans le film. Ce ne sont pas seulement des portes qui s’ouvrent pour laisser passer, ce sont des portes qui enferment aussi, qui empêchent. Cela construit visuellement mon histoire.

 

Il y a aussi un travail sur le son que font ses portes, et la résonance en général de cet appartement.


Le premier plan du film est très important parce qu’on entend des choses et pas d’autres, ce qui oblige le spectateur à construire l’histoire avec l’information parcellaire dont il dispose. À l’intérieur de l’appartement, les portes ouvertes ou fermées produisent exactement le même effet : ça on l’entend, ça on ne l’entend pas. Ce sont des bouts d’histoires, des bouts de paroles, avec lesquels on compose des événements. Et on en revient toujours à cela, dans la vie, on ne détient pas toute l’histoire, l’histoire de la communauté ou l’histoire d’un événement personnel. C’est un puzzle mais la plupart des pièces nous manquent, et quand je dis la plupart des pièces, c’est qu’on a seulement dans nos mains une poignée de pièces issue de la montagne de pièces que représente l’histoire de l’humanité. Nous n’avons à notre disposition que des pièces disparates et nous allons supposer qu’entre ses pièces il faut tout imaginer, c’est ça la fiction. La fiction de notre vie, notre histoire personnelle, et nous sommes convaincus de détenir toute la vérité.

 

Pourquoi avoir choisi une caméra en permanence à hauteur d’hommes ?


Le cinéma permet de faire en sorte, de manière tacite, que la place du spectateur soit celle de la caméra. C’est très intéressant parce que chaque spectateur pense que c’est lui qui voit l’histoire. On se trouve dans la peau de l’observateur. C’est très drôle. La caméra est donc un homme invisible, ou dans le cas de mon film : le mort ! Moi j’ai des choses à régler avec la mort, et là je me suis dit : "c’est l’histoire idéale !". Dans la tradition orthodoxe, l’âme du mort est en liberté pendant quarante jours, elle bouge. Je me suis posé la question de comment faire pour raconter l’histoire à travers les yeux du mort qui circule ? En mettant la caméra à la place du mort, cet homme invisible. C’est ce que j’ai voulu voir, c’est le regard du mort.

 

Qu’est-ce que ça veut dire le regard du mort ?


C’est le regard d’un homme qui a ce privilège de dire au revoir d’une manière silencieuse à ceux qu’il laisse derrière lui, c’est-à-dire les observer. Comment regarde-t-on les choses en sachant qu’on ne va pas revenir ? Qu’est-ce qu’on  va regarder ? Ou pas ? Les sentiments que je souhaitais obtenir alors, c’était l’émotion, c’était la curiosité, mais aussi une sorte de déroute de la caméra. J’imagine que les choses sont comme ça.

Comment interpréter votre titre Sieranevada ?


C’est venu d’une réflexion : "pourquoi selon les nationalités change-t-on les titres du film ?" Ça m’énerve tellement. Au départ je me suis même dit : "je vais faire moi-même les titres pour chaque langue". Et puis j’ai tranché pour un titre qui ne peut pas être changé. Ce qui est intéressant dans Sieranevada c’est de voir que le nom habituellement est séparé : Sierra Nevada. Mais en roumain normalement, c’est en un mot, comme quand on le prononce. J’ai altéré le titre en y mettant un seul "r", pour qu’on me dise : "mais ça ne s’écrit pas comme ça". Alors comment ça s’écrit ? Et en japonais ? Et en géorgien ? C’est complètement idiot, cela me fait penser à cette expression "le diable est un comptable".

 

Alors c’est un jeu, cette altération/intervention dans l’orthographe de Sieranevada ?


Le fait que le diable soit un comptable, que des gens comptabilisent et viennent me dire sur le tournage : "cela ne s’écrit pas comme ça", ça m’a plu. Mais la vérité, au fond, c’est que : on s’en fout ! Mais notre cerveau a un tel besoin de sens qu’il va construire du sens là où il n’y en a pas, où il n’y a rien. En réalité n’importe quel titre peut convenir, mais ça on ne peut pas le dire, donc il faut livrer un titre et c’est celui-là ! C’est une question personnelle, c’est un titre qui est apparu dans ma tête. Comment il est apparu ? Ça, c’est mystérieux, et beaucoup de choses sont mystérieuses.

 

Ce titre évoque effectivement du mystère, de l’aventure. L’aventure de la vie de ces personnages agités.


Oui, il fallait que cela parle d’un endroit, d’un espace. C’est la seule chose rationnelle qui m’a tenu jusqu’à la fin de ma recherche du titre. Le titre Sieranevada possède des résonances de western, même s’il n’y a pas de western célèbre qui porte ce titre. Ça évoque la neige, une autre langue : l’espagnol, la musique de cette langue. Sieranevada, c’est beau. Ça évoque enfin les chaines de montagnes enneigées qui ressemblent aux immeubles communistes, des chaines de blocs de pierre claires. Pour l’affiche roumaine du film, j’ai photographié ces chaines de blocs d’immeubles, ce monde alvéolaire avec ces fenêtres, sont autant de symboles du manque de confiance de la communauté des Roumains.

 

Sieranevada

Mon opinion

 

Tourné essentiellement dans un petit appartement, bien réel, la mise en scène, parfaite, arrive à s'imposer entre portes qui s'ouvrent et claquent, sans cesse.

 

Le réalisateur a déclaré : "La caméra est un homme invisible, ou dans le cas de mon film : le mort ! ". Il faut supporter la première scène d'une longueur excessive et patienter un bon moment avant de savoir qui est est qui.

 

Étouffant pour la plus grande partie, ce film n'offre que quelques bouffées d'air venant d'un extérieur bien maussade et triste. Les plans séquences souvent trop longs et n'apportent pas grand chose. Ils restent les témoins d'un flot de dialogues dont certains sont savoureux, parfois drôles, à l'instar de certaines situations comme celles d'un costume trop grand, qu'il faut garder, puisque béni par un pope, ou une sérieuse altercation pour une voiture mal garée.

 

Le scénario survole des sujets difficiles parmi lesquels, la politique, celui de l'ancien régime en Roumanie, auxquels viennent s'ajouter l'adultère, les attentats du 11 novembre ou encore la situation au proche Orient, sans toutefois approfondir aucun d'eux. Compte tenu de la longueur, cela aurait été un plus.

 

La plus grande réussite de ce film, résolument trop long, reste sans contexte un casting remarquable.

 

Un autre avis, celui de Dasola en cliquant ici.

 

Sieranevada

20 août 2016 6 20 /08 /août /2016 12:43

 

Date de sortie 17 août 2016

 

Toni Erdmann


Réalisé par Maren Ade


Avec Peter Simonischek, Sandra Hüller,

Michael Wittenborn, Thomas Loibl, Trystan Pütter, Hadewych Minis, Lucy Russell


Genre Drame


Production Allemande, Autrichienne

 

Synopsis

 

Quand Ines (Sandra Hüller), femme d’affaire d’une grande société allemande basée à Bucarest, voit son père débarquer sans prévenir, elle ne cache pas son exaspération.

Sa vie parfaitement organisée ne souffre pas le moindre désordre mais lorsque son père lui pose la question "es-tu heureuse ?", son incapacité à répondre est le début d'un bouleversement profond.

Ce père encombrant et dont elle a honte fait tout pour l'aider à retrouver un sens à sa vie en s’inventant un personnage : le facétieux Toni Erdmann (Peter Simonischek)

 

Toni Erdmann - Peter Simonischek et Sandra Hüller

 

Peter Simonischek et Sandra Hüller

Comment est née l'idée du film et celle de ce personnage haut en couleur inventé par le père d'Ines : Toni Erdmann ?

 

Ma famille est souvent ma première source d'inspiration, elle nourrit mon récit et peut influencer les liens entre les personnages.

Winfried, le père d'Ines s'invente un alter ego, comme une tentative désepérée et audacieuse de bousculer leur relation père-fille. Toni Erdmann prend alors vie !

L'humour est souvent le meilleur moyen pour transcender la réalité. Winfried, incapable de communiquer avec sa fille, trouve ici un moyen d'échapper à cette situation en créant ce personnage. L'humour est sa seule arme, et elle va lui permettre de communiquer à nouveau ...

 

Vos personnages féminins sont constamment en prise avec leurs paradoxes. Est-ce pour vous une caractéristique des femmes que vous rencontrez dans notre société actuelle ?

 

Ines travaille dans un environnement où la domination masculine règne en maître, et c'est un état de fait qu'elle a intériorisé. Elle se considère certainement aussi comme l'un des leurs dans ce "groupe de mecs". Le problème, c'est qu'eux ne le voient pas de cet œil-là. J'ai interrogé un certain nombre de femmes qui occupent un poste de direction et la plupart d'entre elles affirment qu'elles aiment être l'exception qui confirme la règle, même si cela signifie souvent pour elles un certain isolement. Je pense qu'Ines est une véritable femme d'aujourd'hui.

 

Toni Erdmann - Sandra HüllerAu moment où elle a démarré sa carrière, elle était convaincue que l'autodétermination et l'égalité étaient acquises pour les femmes de sa génération et que par conséquent, le féminisme n'avait plus lieu d'être. Quand elle déclare "Je ne suis pas féministe, sinon, je ne tolèrerais pas des gars comme toi" elle le pense vraiment. 

 

Elle parle de l'atelier "paroles de femmes" et de l'association "non au harcèlement au travail" avec mépris et elle prend le même ton sarcastique, voire sexiste, quand elle parle d'Anca qui "sait y faire". Mais en toute franchise, je n'avais absolument pas l'intention de dénoncer le sexisme dans le monde du travail. Je souhaitais simplement montrer les choses telles qu'elles sont, et il se trouve que le sexisme fait partie intégrante du monde dans lequel on vit. Toutes ces histoires d'égalité des sexes, c'est un sujet qui a plutôt tendance à me taper sur les nerfs, vu 'importance qu'on lui accorde. En tant que femme j'ai l'habitude de m'identifier à des personnages masculins. Je veux dire que quand je regarde un James Bond, je ne m'identifie pas à la James Bond girl mais à James Bond lui-même. Il vaut donc peut-être mieux considérer Ines comme un personnage moderne et donc d'un genre "neutre", un peu comme un homme qui s'autoriserait à pleurer de temps en temps et qui avouerait avoir des problèmes avec la figure paternelle.

 

Avec Everyone Else, c'est le deuxième film que vous tournez en dehors des frontières allemandes. Pourquoi avoir choisi Bucarest pour Toni Erdmann ? Qu'y avait-il de si intéressant pour vous en Roumanie ?

 

Tourner une grande partie du film dans un autre pays présentait deux grands avantages par rapport à l'histoire que je souhaitais raconter. En effet, ce qu'endurent les deux personnages principaux qui se retrouvent loin de chez eux, isolés et dégagés des contraintes de leur vie quotidienne habituelle, met en exergue le conflit père-fille qui va ainsi prendre une ampleur supplémentaire.

 

Toni Erdmann - Peter SimonischekEt le fait que Winfried rende visite à sa fille dans un pays étranger en amenant ainsi quelque chose de l'Allemagne montre bien combien cette appartenance à l'Allemagne est devenue un élément éloigné de la vie d'Ines.  Pour ces deux films, je me suis simplement sentie plus libre en tournant ailleurs. Parfois, ça aide de manquer de repères.

 

Je ne suis pas certaine que j'aurais osé tourner la scène avec les costumes traditionnels, les kukeri, de la même manière si nous nous étions trouvés dans le centre de Berlin par exemple. Pour finir, et c'est une raison importante, je dois dire que le fait que de grands films de Corneliu Porumboiu, Cristi Puiu et de notre productrice, Ada Solomon, aient été tournés à Bucarest avait aiguisé ma curiosité. D'ailleurs, ce tournage roumain a été une expérience magnifique.

 

Donc ce qui peut passer au départ pour un simple conflit de famille s'avère aller bien au-delà... S'agit-il d'un conflit de générations ?

 

Oui, en situant l'action du film en Roumanie, ça m'a permis de souligner l'aspect politique du conflit que se joue entre les deux protagoniste avec d'un côté, le père qui a tout fait pour s'assurer que sa fille bénéficie de l'assurance et de l'indépendance d'esprit nécessaires à sa réussite d'adulte, et de l'autre, cette fille qui a choisi une vie très éloignée des idéaux de son père en privilégiant une carrière dans un domaine extrêmement conservateur où tout est axé sur le rendement et le profit, c'est à dire toutes les valeurs qui lui a méprisées sa vie entière. La liberté qu'a voulu obtenir la génération de Winfried a finalement ouvert la porte à un capitalisme débridé où règnent en maîtres, libre concurrence et profit. Paradoxalement, il a su transmettre à Ines tous les outils nécessaires à la réussite dans ce monde libéral, c'est-à-dire la flexibilité, la confiance en soi et la ferme croyance qu'il n'y a pas de limites.  Pour Ines, en revanche, le politiquement correct qui gouverne la pensée et les certitudes de Winfried lui paraît bien trop simpliste. Il était plus aisé pour sa génération à lui de s'affirmer afin de se différencier de la génération précédente qu'aujourd'hui. Même si depuis cette époque, Winfried a plutôt sombré dans la résignation, son côté rebelle va pouvoir resurgir sous les traits de Toni. Quand Ines le plonge délibérément dans une situation qui le projette au cœur de son activité professionnelle, les vieilles questions politiques prennent un tour personnel et sont toujours autant d'actualité. Sa réaction démontre que l'incertitude a pris le dessus sur sa vision naïvement humaniste.

Beaucoup de réalisateurs témoignent de la difficulté à faire une bonne comédie.

Partagez-vous ce constat ?

 

C'est vrai qu'il n'a pas été facile de tourner ces scènes. Ce qui était important pour ces moments comiques et pour le film dans sa globalité, c'était de s'assurer que Toni soit crédible tout en laissant transparaître qu'il s'agit bien de Winfried sous le personnage? Toni ne pouvait pas être un personnage de science-fiction, il n'était pas possible de passer d'un genre à l'autre comme ça en plein milieu du film. On a passé trois jours complets à répéter en long et en large cette scène au bar. Avec Peter on a essayé toutes les approches possibles et imaginables. Le plus difficlle pour lui, c'était de dissimuler son extraordinaire don d'acteur. Winfried est censé être un professeur ordinaire qui joue un rôle, il ne devait en aucun cas donner l'impression d'être un acteur professionnel. Or rien n'est plus difficile pour un bon acteur que d'en jouer un mauvais. Peter avait bien sûr toutes les cartes en main pour faire de Toni un personnage beaucoup plus vrai, pour ajouter au drame et le rendre encore plus drôle, mais l'humour du film provient précisément du fait qu'il s'agit de Winfried, et non pas d'un acteur professionnel, dans le rôle de Toni. Trouver ce juste équilibre, c'était vraiment un défi.

 

Toni Erdmann -  Sandra Hüller

 

Comment vous êtes-vous préparée avec Patrick Orth, le directeur de la photographie ?

 

Notre objectif était d'offrir autant de liberté que possible aux acteurs en restant suffisamment ouverts à la créativité de tous, tout au long du tournage. D'un point de vue technique, cela signifie qu'on a le plus souvent utilisé un éclairage à 180 degrés et qu'on était tous prêts à surfer sur la vague quand les choses prenaient un autre cours, comme par exemple quand une scène durait plus longtemps que prévu. Au cours de la phase de préparation, Patrick Orth a toujours été présent, que ce soit dans le cadre des répétitions, des prises de vues, des essais de décors et des lumières. Le travail avec les acteurs et les caméras était prenant. On a passé énormément de temps sur le plateau à travailler chaque scène dans le moindre détail, ce qui ne nous a jamais empêché non plus de tout changer de fond en comble le jour du tournage. Je suis persuadée qu'il faut passer beaucoup de temps avec les acteurs en amont du tournage pour qu'il arrive un moment où la caméra se joue d'eux sans non plus tomber dans le documentaire.

 

Vous avez donc cherché à faire en sorte d'être le plus réaliste possible ?

 

Je n'aime pas rogner sur la forme narratrice ... j'ai besoin que chaque décision, prise par les protagonistes au fur et à mesure du film, paraisse crédible. Sans être forcément probables, il faut au moins que ce soient des décisions possibles. Même si le réalisme primait sur le reste, je voulais quand même qu'il y ait des surprises et des moments magiques qui sont la définition même du cinéma. Mais je voulais que ça vienne des personnages et non pas de moi en tant que réalisatrice. C'est pour cette raison que j'ai décidé de créer cette situation qui fait que les personnages donnent le sentiment de jouer dans le film. Toni apporte cet élément de fraîcheur dans la vie d'Ines et de Winfried, de l'espièglerie, de l'audace et de la liberté. Cela va leur permettre de se réapprivoiser d'une autre manière. Grâce à cette idée loufoque de Winfried, soudain, tout redevient possible. Je pense qu'on peut dire qu'en temres de cinématographie et de décors signés Silke Fischer, nous cherchions une forme d'hyperréalisme qui ne soit pas trop marqué.

Le film est-il un appel au lâcher prise ?

 

Pour moi, le "lâcher prise", c'est trop proche du mot "abandon", ça me fait trop penser à ces expressions tirées de bouquins de développement personnel. Mon film est moins un appel au lâcher prise qu'une injection à s'assumer pleinement. Ce que fait Ines à la fin du film, c'est quelque chose d'assez radical et il faut un certain courage pour le faire. Ça peut paraître un peu dingue, mais c'est un nouveau départ pour elle : à partir de ce jour-là, elle sera toujours la femme qui a ouvert la porte de chez elle à son boss en tenue d'Eve.

 

Toni Erdmann - Sandra Hüller

 

Elle ne lâche rien du tout, en réalité, on peut dire qu'elle reprend les rênes. À la toute fin, on est face à deux personnes qui ont peut-être su mûrir et s'accepter un peu plus telles qu'elles sont. On pourrait également considérer que Toni "se cache" derrière le rôle, comme on dit, mais moi, je pense plutôt que Winfried se dévoile pleinement dans les rôles qu'il interprète. C'est particulièrement vrai pour la partie kukeri qui est l'illustration de son vrai moi, il est cette créature de grande taille pleine de mélancolie avec une drôle de tête.

 

Le film ne montre-t-il pas également que tout a une fin ?

 

Toute relation parents-enfants est faite de ruptures. Quand un nouveau chapitre s'ouvre pour un enfant, cela veut souvent dire, pour les parents, que quelque chose arrive à son terme. Je l'observe avec mes propres enfants actuellement. Mon fils est ravi à chaque centimètre qu'il prend sur moi, c'est la mélancolie qui me gagne. C'est pour cette raison qu'il y a quelques scènes de ruptures dans le film.

 

Winfried a un étudiant qui décide d'arrêter ses études, son chien meurt, lui et sa fille se disent au revoir un certain nombre de fois sans jamais vraiment se dire adieu. Leur embrassade à la fin du film est un moyen de transmettre cette idée d'un adieu. Le costume kukei transforme Winfried, et ainsi, pendant un court instant, Ines a l'impression de se retrouver devant son père d'avant, grand et maladroit, ce père qu'elle a connu quand elle était enfant. L'espace d'un instant, elle peut redevenir la petite fille qu'elle était.

 

Toni Erdmann -  Peter Simonischek

Mon opinion

 

Si le film aurait gagné à être amputé de quelques minutes, il n'en reste pas moins un formidable moment de cinéma d'un genre tout à fait particulier, oscillant en permanence entre rires et émotions.

 

Dans un Bucarest envahi par les multinationales, les carriéristes et la réussite à tout prix, une femme se veut être l'égale des hommes qui l'entourent. Entre hôtels au luxe clinquant, galerie marchande réservée aux fortunes étrangères, appartements design ou boîtes de nuit dans lesquelles le champagne coule à flot, un père s'imposera sous des accoutrements divers et variés pour partager l'univers de sa fille.

 

Celle-ci s'est éloignée des valeurs dans lesquelles elle semble avoir été élevée. Le bonheur, ou une simple question "es-tu heureuse ?" se heurteront à son incompréhension totale.

 

À la belle écriture du scénario s'ajoute à une mise en scène parfaitement maîtrisée. Un excellent casting à la tête duquel deux immenses comédiens que je découvre dans ce film, Peter Simonischek et Sandra Hüller.

 

La réalisatrice a déclaré : "Mon film est moins un appel au lâcher prise qu'une injection à s'assumer pleinement."

 

Elle y réussit pleinement en plongeant le spectateur dans un questionnement permanent.

 

Ce film est à la fois perturbant et magnifique.

 

Welcome

 

"Le bonheur est la chose la plus simple,

mais beaucoup s'échinent à la transformer

en travaux forcés !"

 
François Truffaut

 

 

 

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