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13 octobre 2015 2 13 /10 /octobre /2015 18:15

 

Date de sortie 9 septembre 2015

 

Les chansons que mes frères m'ont apprises


Réalisé par Chloé Zhao


Avec John Reddy, Jashaun St. John, Taysha Fuller,

Eleonore Hendricks, Irene Bedard, Cat Clifford, Travis Lone Hill


Genre Drame

 

Titre original Songs My Brothers Taught Me


Production Américaine

 

Synopsis

 

Johnny (John Reddy) vient de terminer ses études.

 

Lui et sa petite amie s'apprêtent à quitter la réserve indienne de Pine Ridge pour chercher du travail à Los Angeles.

 

La disparition soudaine du père de Johnny vient bousculer ses projets.

 

Il hésite également à laisser derrière lui Jashaun (Jashaun St. John), sa petite sœur de treize ans dont il est particulièrement proche. C'est tout simplement son avenir que Johnny doit maintenant reconsidérer…

 

Les Chansons que mes frères m’ont apprises - John Reddy

 

 John Reddy

Interview de Chloé Zhao par Frédéric Strauss.

Publié le 06/09/2015 pour telerama.fr.

 

En compétition à Deauville avec Les Chansons que mes frères m'ont apprises, balade mélancolique dans une réserve indienne du Dakota, Chloé Zhao, née en Chine et installée à New York depuis dix ans, observe avec un regard critique le cinéma indépendant américain.

 

Vous êtes née à Pékin et vous avez tourné Les Chansons que mes frères m'ont apprises dans un réserve indienne du Dakota. Qu'est-ce qui vous a guidée jusque là ?


Je me suis toujours intéressée aux histoires de gens marginalisés dans la société. Je viens de Pékin mais j'ai beaucoup voyagé et je n'ai jamais vécu longtemps au même endroit, je n'ai de racines nulle part. Quand je suis allée au Dakota et que j'ai découvert la réserve de Pine Ridge, je me suis retrouvée comme au fond d'un lac : c'est un monde où rien ne bouge, rien ne change. Même si la culture des Indiens a été en partie détruite par les États-Unis, les choses restent semblables à ce qu'elles ont toujours été et les Indiens qui vivent là sont vraiment enracinés. Pour moi qui vient de Chine, où tout change, où tout est sans cesse modernisé, cet endroit était fascinant.

 

Vous en montrez aussi des aspects très sombres. Il s'agit pour vous de tirer un signal d'alarme sur les conditions de vie de ces Indiens ?


J'ai étudié les sciences politiques et la politique américaine quand je suis arrivée aux États-Unis, je connais donc assez bien l'histoire des Indiens. Mais je n'ai pas voulu faire une démonstration. Ce que je tenais à montrer, c'est une jeunesse livrée à elle-même dans cette réserve où l'espérance de vie est si basse, autour de 45 ans, que la moitié de la population a moins de vingt ans. Il y a de bons parents parmi les adultes, mais il y a aussi beaucoup d'orphelins et les jeunes prennent donc soin les uns des autres. Le suicide parmi eux est malheureusement dévastateur.
Et le danger le plus grand, c'est le diabète, qui tue les gens. Ils mangent essentiellement de la nourriture en boîtes de conserve que leur donne l'État américain. Il y a donc quantité de problèmes et il n'était pas possible pour moi de les aborder tous dans le cadre d'une fiction. Il n'y a de toute façon pas de solution à court terme. Michelle Obama elle-même l'a dit récemment : il ne s'agit plus seulement de donner des aides financières et alimentaires aux Indiens, mais de reconstruire leur nation. Et cela prendra du temps.

 

En tournant dans cette réserve, quel était l'avantage que la fiction vous donnait ?


Il y a eu beaucoup de reportages sur cette réserve. Et beaucoup de mauvais reportages. Tous les chiffres terribles sur l'économie et la santé des Indiens de Pine Ridge ont attiré les télévisions, qui viennent voir ce qui est, en quelque sorte, le "Ground Zero" de la société américaine, l'endroit où les conditions de vie sont les pires de tout le pays. Les journalistes débarquent avec leur liste de problèmes à illustrer : l'alcoolisme, le suicide, la maladie, le chômage...
Et les Indiens sont tellement habitués à ces reportages qu'ils savent comment donner aux journalistes exactement ce qu'ils veulent. Et rien d'autre. Tout est ainsi réduit à un cliché et à un show. Je voulais aller au-delà de ces réflexes, avoir accès à une réalité plus profonde. Pour cela, la fiction était utile, elle cassait les habitudes et ouvrait une autre forme d'expression. Les gens de la réserve étaient très contents quand je leur parlais d'une fiction. Ils pouvaient y mettre leur vérité sans avoir l'impression de devenir des phénomènes de curiosité.

 

Les Chansons que mes frères m’ont apprises - Jashaun St. John &John Reddy

 

John Reddy et Jashaun St. John

Comment avez-vous trouvé les financements pour tourner ce film très différent de tout ce qu'on voit ?


Je n'en ai pas trouvé ! J'ai travaillé pendant trois ans sur un scénario que j'aurais dû tourner avec un budget trois fois plus important et que j'ai dû finir par abandonner. C'était un scénario où l'action et les intrigues avaient plus de place. J'ai eu beaucoup d'aides institutionnelles pour travailler sur ce scénario mais quand nous avons recherché un financement, de l'argent privé donc, personne ne voulait investir dans le film ! On m'a même dit que si je tournais avec les acteurs de Twilight, je trouverais peut-être un producteur.


Pine RidgeMais j'avais trouvé mes deux jeunes comédiens principaux à Pine Ridge et je les voyais grandir, je voyais qu'ils n'allaient plus pouvoir jouer leurs personnages. Alors, j'ai décidé de tourner sans attendre, en organisant les choses de façon à réduire les coûts, car nous n'avions vraiment pas beaucoup d'argent. J'ai adapté l'histoire à mes moyens, j'ai tiré profit de ce qui se passait autour de nous pendant le tournage, j'ai essayé d'exploiter au mieux une situation très difficile. Et j'ai fait mon film.

 

Votre vision du cinéma indépendant est donc critique ?


Je risque de m'attirer des ennuis en vous répondant, mais ce que je vais dire sera heureusement traduit en français. J'ai perdu toutes mes illusions concernant le cinéma indépendant américain. Je ne connais pas assez bien la situation des cinéastes en Asie et en Europe pour faire des comparaisons, mais aux États-Unis, il y a si peu d'argent pour les cinéastes indépendants que la prise de risque n'est plus possible. Les gens veulent être sûrs qu'en mettant de l'argent dans une production indépendante, ils vont récupérer cet argent.
Il y a de grandes institutions comme Sundance qui fonctionnent sur un autre modèle que celui de la rentabilité immédiate mais dès qu'on rentre dans le cercle des vrais investisseurs, on doit pouvoir les rassurer avec un projet sans risque, sinon on n'obtient rien. Même dans les écoles de cinéma, où l'esprit cinéphile était très vivant, c'est la course aux financements qui compte et le cinéma indépendant n'existe plus que dans sa version capitaliste. Mais je suis un cas extrême. Je suis chinoise, je suis jeune, je suis une femme, mon film parle des Indiens de Pine Ridge, n'est interprété que par des non-professionnels et n'a pas une histoire spécialement bien ficelée. En fait, je corresponds à toutes les formes de risque qu'il faut éviter !

 

Vous êtes donc un exemple de résistance ?


Je pense que beaucoup de jeunes cinéastes peuvent être intéressés par une démarche comme la mienne. J'espère que mon film peut représenter un encouragement pour eux mais je me suis sentie très seule dans cette aventure. Les distributeurs américains me disent maintenant qu'ils ne savent pas comment ils pourraient sortir mon film. Parce que j'ai tourné ce film sans entrer dans un moule, je me retrouve à la fin face à des distributeurs qui ne savent plus travailler avec un film indépendant non formaté.
 

Les Chansons que mes frères m’ont apprises - Jashaun St. John

 

 

On va essayer de distribuer nous-mêmes Les Chansons que mes frères m'ont apprises aux États-Unis, pas nécessairement dans les grandes villes mais dans les bonnes villes. C'est important que ceux qui jouent dans le film puissent se voir sur un grand écran. C'est une reconnaissance essentielle. C'est pour ça que je tiens à la sortie en salles. On ira forcément sur une plateforme vod, mais j'espère seulement après la salle.

 

Qui incarne le mieux à vos yeux l'idée d'indépendance ?


Xavier Dolan. J'ai beaucoup pleuré en voyant Mommy et je me suis sentie renaître, c'est un film qui porte de l'espoir pour le cinéma.

 

Jashaun St. John

 

Une définition de l'indépendance ?


C'est comme quand vous allez vous coucher à la fin de la journée et que vous pouvez vous dire que tout au long de cette journée, vous êtes resté fidèle à ce que vous êtes, à ce que vous croyez. Faire un film, c'est être fidèle à une vision, à une approche du cinéma. C'est ça l'indépendance, c'est la seule chose que vous pouvez avoir en dehors de tous les jeux d'argents qui mènent l'industrie du cinéma. Bien sûr, je ne suis pas naïve, il faut trouver un moyen de vivre. Et trouver un public, pas nécessairement énorme, qui s'intéresse à vos films et soit prêt à vous suivre. Mais tout ça peut être possible.

 

Hollywood fait-il toujours rêver ?


J'ai grandi dans la Chine communiste, Hollywood m'a sauvé la vie ! Hollywood m'a permis de rêver et si je suis partie aux États-Unis, c'est sans doute grâce à ce rêve. J'avais onze ans quand, en 1995, la Chine a autorisé la diffusion de MTV, Michael Jackson et Madonna sont aussi entrés dans ma vie. Mais la Chine n'a pas autorisé la sortie des trois premiers Star Wars car des films où le méchant est un empereur envoyaient un mauvais message et ne pouvaient pas être montrés ! Je pense que j'aurais été une personne différente si on m'avait autorisé à voir Star Wars, L'Empire contre-attaque et Le Retour du Jedi ! Il a fallu que j'attende La Menace fantôme, qui a pu sortir, en 1999. Je ne suis donc vraiment pas contre Hollywood. C'est un rêve en soi. Ça pourait être un plus beau rêve, un rêve de meilleure qualité. L'imagination devrait être sans limite et ça, Hollywood pourrait le montrer davantage. Mais j'ai de grandes espérances pour le prochain Star Wars, je crois qu'ils ont compris qu'ils devaient revenir à ce qu'est vraiment cet univers qu'on aime tant, ils ne vont pas refaire la guerre des clones !

 

Dans dix ans, quelle cinéaste serez-vous ?


Wong Kar-wai était mon héros mais il tourne maintenant des films à gros budgets en Chine et je ne crois pas que ça sera mon chemin. La carrière de Lars von Trier est très intéressante à mes yeux, même si sa personnalité est controversée. Il fait les films qu'il a envie de faire et il en trouve les moyens. Il a beaucoup d'audace, il se lance dans des projets très différents tout en défendant toujours sa sensibilité propre. J'aimerais pouvoir un jour me retourner sur mon travail et avoir les mêmes choses à en dire.

 

Songs My Brothers Taught Me

 

Chloé Zhao et John Reddy  (pendant le tournage.)

PhotoEléonore Hendricks

Mon opinion

 

Un film porté à bout de bras par Chloé Zao, à la fois réalisatrice, scénariste et co-productrice. Un financement difficile, quasi inexistant. "Si je tournais avec les acteurs de Twilight, je trouverais peut-être un producteur" a-t-elle révélé.

 

L'ensemble est d'une grande pudeur, d'une extrême simplicité, d'un profond réalisme et magnifié de bout en bout par les deux jeunes principaux protagonistes.

 

Cette région des États-Unis, tout aussi angoissante que belle, est particulièrement mise en valeur par une très belle photographie. Ces "badlands" font penser à La balade sauvage de T. Malick.

 

Pendant toute la durée du film nous suivons, dans un certain désordre, des destinées d'enfants, femmes et hommes, vivant tels des exclus. Entre misère totale, drogue et alcool, leur espérance de vie tourne autour de 45 ans. "Il y a de bons parents parmi les adultes, mais il y a aussi beaucoup d'orphelins et les jeunes prennent donc soin les uns des autres. Le suicide parmi eux est malheureusement dévastateur" indique Chloé Zao.

 

Avant de reconnaitre :"Il n'y a de toute façon pas de solution à court terme. Michelle Obama elle-même l'a dit récemment : il ne s'agit plus seulement de donner des aides financières et alimentaires aux Indiens, mais de reconstruire leur nation. Et cela prendra du temps."

 

Un brin d'espoir avec ce qui reste une prédiction.  Celle de Crazy Horse, leader à son époque des Lakotas. "Le renouveau viendra avec la septième génération". Les regards magnifiques des deux jeunes acteurs poussent à y croire.

 

Ce film a le grand mérite de mettre en lumière ces être humains, qui semblent oubliés par l'ensemble de leurs concitoyens. À souhaiter aussi qu'il bouscule les consciences.

 

Pour ma part, un moment de cinéma, fort, rare et qui restera mémorable.

commentaires

A
J'ai beaucoup entendu parler de ce film et j'ai très envie de le voir. C'est un sujet poignant. Il est passé lors du Festival du film américain de Deauville et j'espérais qu'il aurait au moins le prix du public. Eh bien non ! Celui-ci lui a préféré un navet. Bien décevant... triste époque !
Répondre
R
Ce n'est pas la joie ce film, mais utile pour prendre conscience de ce peuple et porteur d'espoir
Répondre
E
J'espère qu'on le donnera ici... Je connais "bien" (enfin, mieux que beaucoup parce que j'ai eu des amis amérindiens aux USA et ai lu beaucoup de leur littérature, vu leurs films - Chris Eyre - etc...) leur monde, sans jamais avoir été une "wannabe", et j'en suis fascinée. Touchée. J'espère vraiment pouvoir voir ce film!
Répondre
J
Je crois qu'il est passé au Royal, mais maintenant un peu tard. Je vais regarder quand même. tu me donnes envie de le voir. Biz
Répondre
J
À te lire je regrette de ne pas avoir vu ce film. Bises
Répondre
C
Massacres, humilies puis abandonnes, les indiens d'Amerique ont tout subi. Il est temps de reconnaitre leurs vraies valeur de fraternite et de respect de la nature. Si ce film peut y contribuer c'est bien entendu indispensable. Merci de le faire savoir, Alain.
Répondre
B
Many thanks to share
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