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25 avril 2015 6 25 /04 /avril /2015 16:55

 

Date de sortie 22 avril 2015

 

Caprice


Réalisé par et avec Emmanuel Mouret

 

Anaïs Demoustier, Virginie Efira, Laurent Stocker,

Michaël Cohen, Thomas Blanchard, Mathilde Warnier, Olivier Cruveiller


Genre Comédie dramatique


Production Française

 

Synopsis

 

Clément (Emmanuel Mouret), instituteur, est comblé jusqu'à l'étourdissement : Alicia (Virginie Efira), une actrice célèbre qu'il admire au plus haut point, devient sa compagne.

 

Tout se complique quand il rencontre Caprice (Anaïs Demoustier), une jeune femme excessive et débordante qui s'éprend de lui.

 

Entretemps son meilleur ami, Thomas (Laurent Stocker), se rapproche d'Alicia...

Caprice

Emmanuel Mouret  croise Virginie Efira

Relevé sur unifrance.org


Caprice pose l’une des grandes questions amoureuses : doit-on se fier à l’instinct ou au destin pour trouver son âme soeur ?


Virgine Efira : À mon sens, les deux sont fortement liés. Alicia est obsédée par une prémonition selon laquelle elle va rencontrer quelqu’un qui ne sera pas du même milieu qu’elle. Mais elle y est réceptive parce que cela correspond à une envie, un instinct profond. Autour de moi, j’entends beaucoup de gens évoquer ces fameux "signes" mais c’est ce que l’on en fait qui m’intéresse vraiment. À partir du moment où ces "appels du destin" résonnent en soi, il y a une certaine beauté à se laisser guider. Dans le film, Emmanuel n’impose jamais au spectateur une direction, ne tranche pas entre instinct et destin, ce qui me convient tout à fait !


Emmanuel Mouret : Personnellement je ne crois ni au destin, ni à l’instinct. Je ne suis sûr de rien, et c’est peut-être ça qui rend les histoires amoureuses si passionnantes ! Est-ce que j’éprouve réellement tel sentiment envers une femme ou est-ce parce que j’ai follement envie de l’éprouver ? Lorsque l’on se raconte nos histoires amoureuses, on parle sincèrement de magie, puis quand elles s’achèvent, on se dit qu’on se racontait des histoires ! Ces deux sentiments sont justes, authentiques. L’amour est peut-être un honnête mensonge ! Une rencontre amoureuse un heureux malentendu ! Dans Caprice, Clément et tous les personnages portent, de façon plus ou moins apparente, un rêve. Et la personne "élue" doit forcément coïncider avec ce rêve. Et, quand elle ne rentre plus dans le cadre assez rigide de notre rêve, c’est là que les problèmes commencent !

 

Le couple Clément/Alicia s’établit sans se soucier des préoccupations habituelles, comme celle de la famille recomposée...


Emmanuel Mouret : Le sujet est ailleurs, ce n’est pas de ça que parle le film. Pour Clément un rêve est en train de se réaliser, c’est tellement beau pour être vrai qu’il attend lui-même quand ça n’ira plus. Comme dans les débuts des films d’horreur, tout va bien, trop bien !


Virgine Efira : À la place d’Alicia, j’angoisserais que tout se construise si joliment avec Clément et leurs enfants. On a envie de gratter sous le vernis, soulever la moquette, sonder les coins obscurs…

 

Caprice - Virginie Efira & Emmanuel Mouret Cela peut correspondre aussi à une quête de sérénité, si tant est qu’elle existe : il arrive un moment dans le film où Clément fait le choix de cette vie-là mais la sérénité n’accompagne pas éternellement l’amour. Sinon, ça ressemble à une bulle prétendue invincible. Et je n’y crois pas. Le film parle de la véritable beauté de la vie : celle où ce sont les difficultés, les obstacles, la fluctuation des sentiments, les revirements du cœur qui stimulent le mystère amoureux.

 

Comme dans la plupart des films d’Emmanuel Mouret, Caprice s’inscrit dans un ton subtilement décalé par rapport au réel...


Virgine Efira : C’est le cinéma que j’aime le plus et c’est ce que j’ai dit à Emmanuel lors de notre premier rendez-vous, avant même d’imaginer pouvoirtravailler avec lui. Je crois davantage à la vérité de l’émotion qu’à l’assurance du "vrai" : il existe une obsession un peu pénible pour un cinéma de l’ultra-réalisme comme si lui seul était garant de sincérité. Révéler des paradoxes souterrains, des élans que l’on ne maîtrise pas, est plus émouvant, plus authentique.

 

Emmanuel Mouret : Me concernant, le cinéma n’est pas la réalité, le cinéma c’est avant tout du cinéma. De la même façon que lorsque nous écoutons de la musique, nous sommes dans un monde parallèle.

 

Caprice - Évidemment nous éprouvons, en regardant un film, des sensations, des émotions qui résonnent avec notre intimité, parfois si profondément que nous avons l’impression que le cinéma c’est la vie. En faisant le film, j’ai été essentiellement guidé par la notion de plaisir que j’ai éprouvé adolescent devant certains films, beaucoup plus que par celle de réalisme.

 

 

Plaisir d’être avec les personnages, les décors, la musique, mais également plaisir de géométrie dans la construction dramatique et plaisir des paradoxes.


Virgine Efira : Emmanuel a la délicatesse de ne pas trouver des réponses mais d’élargir le champ des questions. À travers son prisme, le monde et les gens sont un peu plus ronds, plus riches, plus fragiles forcément.

 

Vous suscitez une forte empathie envers tous vos personnages…


Emmanuel Mouret : Je le souhaite en tous cas. Je tente de révéler leur charme. Je dois mon éveil intellectuel et sensible à des rencontres que j’ai faites adolescent.

Je suis tombé amoureux ; ça n’était pas partagé mais j’étais conquis... Dans un film comme dans la vie, charmer peut engager le rire, le cocasse, même la tristesse.

Virgine Efira : En tant qu’acteur, il ne faut surtout pas chercher à la susciter...


Emmanuel Mouret : ... Comment ? Tu n’as pas conscience de l’empathie que tu peux susciter (rires) ?

Virgine Efira : Très peu (rires). On se sent parfois très étranger à ce que l’on communique à l’écran. Voire très seule quand, par exemple, un film devient une entreprise commerciale qui calcule son effet et fait tout pour l’atteindre. Caprice est l’inverse de cela : avec Emmanuel, on est partis de l’envie d’échanger ensemble, de célébrer la complexité humaine à travers une fiction.

 

L’une des forces d’équilibre du film est de préserver l’intégrité, la vérité de ces deux femmes

amoureuses.


Emmanuel Mouret : Virginie avait une partition très délicate. Alicia est une actrice célèbre, nantie, reconnue dans la profession alors que Caprice est une débutante sans le sou à laquelle le spectateur pourrait plus facilement s’identifier. Il a fallu faire très attention à ne pas perdre Alicia : au final, elle est plus adorable que son image publique et c’est grâce à Virginie. Quand Alicia apprend qu’elle a été trompée, Virginie le joue en douceur, sans élever le ton. Alicia n’est jamais méprisante envers Caprice. C’est dans toutes ces petites inflexions, ces réactions humaines inattendues, que la beauté d’un personnage se dessine.


Virgine Efira : Au départ, je me suis interrogée sur la tranquillité d’Alicia. Au-delà du confort qu’elle représente pour Clément, Alicia aurait pu déraper dans le conformisme, l’humeur égale un peu casse-pieds, la fadeur comparée à la fougue de Caprice. C’est Emmanuel qui m’a montré une image très inspirante de Marilyn Monroe où elle affiche un émerveillement constant. C’est une arme redoutable. Il existe également des possibles qui jalonnent la trajectoire d’Alicia, des pulsions à l’égard de Thomas qu’interprète Laurent Stocker. Et peu importe qu’elle y cède ou non.


Emmanuel Mouret : La retenue est l’un des points communs et cardinaux à tous les personnages. C’est ce qui nous fonde en tant qu’individu civilisé et qui m’émeut au cinéma.


Virgine Efira : En tant qu’actrice, j’aime l’idée qu’il y a des forces qui nous dépassent. Le pire est de se retrouver avec un personnage figé, barbouillé d’une seule couleur.

 

Qu’est-ce qu’Emmanuel a pu vous cacher d’Alicia ?


Virgine Efira : Quelques mots, par-ci par-là. Quand il se lance dans des indications de jeu, il lui arrive de ne pas terminer ses phrases (rires). J’avais parfois l’impression de ne pas comprendre ce dont il me parlait alors que tout était clair. Je n’avais pas besoin d’être rassurée. Emmanuel évoquait souvent l’harmonie et cela me suffisait... Nous étions en phase sur Alicia, en éveil constant, donc je n’ai jamais envisagé que le film pouvait se tromper de ton ou de direction.


Emmanuel Mouret : Sur un tournage, le travail est rarement dans l’analyse, mais dans l’écoute les uns des autres. Je ne cache rien de façon préméditée : au contraire, j’adore m’en remettre à tous ceux qui m’entourent et communiquent dans la même direction.

Caprice

Emmanuel Mouret  croise Anaïs Demoustier

 

À travers le rapport amoureux qui unit Caprice à Clément, le film évoque avec beaucoup d’humour et une dose de cruauté la perte de certaines illusions...


Emmanuel Mouret : C’est un thème qui traverse tout le film jusqu’au dénouement. Trouver la juste fin a été un long processus de réflexion qui s’est accompli lorsque m’est venue à l’esprit cette phrase simple : "On ne peut pas tout vivre"…


Anaïs Demoustier : Caprice est tombée follement amoureuse de Clément. Elle s’accroche à des illusions qu’elle espère transformer en réalité. Emmanuel porte un regard tendre sur cette jeune femme alors qu’elle pourrait être exaspérante : à partir du moment où Caprice est sincère dans son amour et s’entend dire qu’il ne peut pas être vécu, on ne peut qu’éprouver de l’empathie. C’est rare de tomber sur des personnages aussi entiers, généreux dans leur manière de s’exprimer, de se projeter dans une histoire d’amour. Jouer un personnage qui veut tout de l’autre est émouvant. Et les situations n’en sont que plus drôles. Caprice est envahissante et met, souvent sans le savoir, Clément dans un embarras monstre.

 

Pour une fois, c’est la technique de drague féminine qui est mise en valeur.


Caprice - Anaïs Demoustier et Emmanuel MouretAnaïs DemoustierCaprice fait tout ce qu’il ne faut pas faire pour séduire Clément lorsqu’elle le rencontre au théâtre. Le prétexte des lunettes puis l’histoire des sosies, c’est très drôle, très lourd aussi (rires). Au moins, elle arrive à capter son attention. Caprice a un côté frondeur que j’adore, là où trop de filles ressemblent au cinéma à des petites choses frêles. Caprice a autant de pureté et de candeur que de courage, d’entêtement et de pugnacité.


Emmanuel Mouret : Moi, c’est le côté " science fiction" de l’histoire qui m’a plu (rires). J’aime les personnages "bigger than life". Le cinéma est une terre de fantasmes. Par exemple j’ai toujours aimé les films où de très jolies femmes évoluent autour de gars pas terribles. Qu’une fille drague un homme plus âgé comme le fait Caprice. Lorsque j’ai écrit ce personnage, je n’ai voulu développer aucune théorie : avec Caprice, on ne sait jamais sur quel pied danser. Elle agit, réagit avec énormément de générosité, sans se donner de limites. J’aime que l’on ne puisse pas porter sur elle, comme sur tout autre personnage du film, un jugement définitif.

 

À l’inverse d’Alicia qui incarne la réussite, Caprice est la tentation d’un ailleurs hors norme...

 

Emmanuel Mouret : Sauf qu’au fur et à mesure du récit, le cadre de ces deux relations devient plus incertain.


Caprice - Emmanuel Mouret et Anaïs DemoustierL’idée du personnage est née de souvenirs personnels, de rencontres avec des personnes qui ne pensaient pas faire de mal mais qui se montraient excessives. Elles déploient une énergie incroyable qui heurte nos usages, notre retenue, nos modes de vie si balisés. Ces personnes-là disparaissent souvent de nos vies en un éclair ; c’est à la fois troublant et émouvant.

 

 

Anaïs Demoustier : Caprice manifeste un tel enthousiasme, une telle "foi" en Clément qu’elle est désarmante !


Emmanuel Mouret : Qui nous dit que Caprice n’est pas dans la vérité lorsqu’elle prétend qu’ils sont faits l’un pour l’autre ?

 

Emmanuel, vous vous dites passionné par les personnages féminins. Dans le film, Clément est l’objet de la convoitise de deux femmes sublimes...


Emmanuel Mouret : C’est ce que j’entendais par "science-fiction" (rires).


Anaïs Demoustier : Pas du tout !  Caprice réplique lors d’une scène face à Alicia que Clément est "le genre d’homme avec qui on se sent bien tout de suite". Pour Caprice, et certainement pour Alicia, Clément est le fantasme de l’homme lettré, sensible, fin, subtil...

Emmanuel Mouret : C’est son côté instituteur.


Anaïs Demoustier : Pas seulement. Il est attentionné, délicat. Plus âgé aussi et c’est ce qui séduit Caprice : elle s’est projetée avec un homme plus expérimenté parce qu’elle considère les hommes de son âge dépourvus de profondeur. Clément représente tout ce dont elle rêve !


Emmanuel Mouret : Disons que c’est un homme gentil.


Anaïs Demoustier : Il est tellement rassurant...


Emmanuel Mouret : Quand j’étais adolescent, j’adorais les films avec de grands maladroits comme Buster Keaton, Pierre Richard et Jerry Lewis. Il se trouvait toujours une femme sensible à leur gaucherie, à leur gentillesse et qui tombait amoureuse. Cela a donné beaucoup d’espoir à l’adolescent coincé que j’étais.

 

Autre manifestation du désir féminin, plutôt rare au cinéma, celui où Caprice propose à Clément de tromper Alicia en invoquant cet argument imparable : "Sois infidèle. Ne sois pas égoïste".


Anaïs Demoustier : Je la trouve surtout très pragmatique (rires). Elle est prête à tout pour vivre cette histoire et c’est une proposition tout à fait réfléchie de sa part.


Emmanuel Mouret : Je n’ai pas écrit ces dialogues pour marteler une solution mais pour servir la vérité amoureuse des personnages. Par ce biais de fiction, j’encourage le spectateur à se poser des questions (rires). Pour certains, le mensonge n’est pas viable ; pour d’autres, la solution que propose Caprice mérite d’être examinée.

 

Anaïs Demoustier : Et on comprend que Clément s’interroge (rires). Emmanuel a cette qualité de valoriser l’intégrité de ses personnages : Caprice est dans son droit parce qu’elle aime cet homme ; Clément est dans son droit parce qu’il est mal à l’aise avec la tromperie. On préférerait que ni l’un ni l’autre n’ait à souffrir, à choisir...

 

La position du spectateur est fluctuante, l’empathie envers tel personnage ne cesse d’évoluer. Comme si, en amour, il ne pouvait y avoir ni victime, ni coupable...


Emmanuel Mouret : Le cinéma que j’aime et que je tente de faire est le spectacle de l’acceptation de nos contradictions. C’est une école de l’existence, aussi humble soit-elle, où l’on confronte la conduite à la morale. Les grands principes s’effondrent face à nos errances, nos erreurs mais c’est aussi l’occasion de considérer les autres et le monde avec un regard inédit. Être moins exigeant permet d’être davantage tolérant. Il ne s’agit pas d’excuser ceux qui se fichent de la morale mais de s’épargner les donneurs de leçons. Faire des films autour du désir et des sentiments, c’est accepter la fragilité et la mouvance des êtres. À la fin du film, Clément fait un choix mais les souvenirs et les personnes aimées perdurent en lui.

 

Emmanuel, comment avez-vous travaillé avec Anaïs ?


Emmanuel Mouret : Anaïs m’a semblé très indépendante dans sa manière de préparer, de construire son rôle. Sur le tournage, j’ai eu un vrai plaisir à découvrir le résultat.


Anaïs Demoustier : Je préfère travailler tranquillement dans mon coin, c’est vrai ! Avec Emmanuel, c’est davantage une question de rythme et de musicalité. Il n’est pas dans l’analyse des personnages ; il se laisse guider par des envies, comme celle de voir Caprice bifurquer, s’imposer à Clément au moment où l’on s’y attend le moins... Travailler sur un film d’Emmanuel, c’est une expérience originale : le scénario est très structuré et son écriture porte la singularité du ton comme du rythme. Tout ce que j’avais aimé dans ses films s’est retrouvé sur le papier puis lors du tournage. Pour un acteur, il s’agit de se fondre dans un univers pleinement caractérisé. J’y ai goûté un mélange de tendresse, de burlesque, d’égarements et de mélancolie au service
d’un thème fondateur : les relations amoureuses. Peu de films français reposent à ce point sur les acteurs, le plaisir de la langue, la théorisation du sentiment et sur ce personnage masculin lunaire, hors du temps, qu’Emmanuel décline de films en films.


Emmanuel Mouret : Je n’ai pas cette distance sur moi. Ce qui ne cessera jamais de m’inspirer est que le cinéma permet la confrontation entre ce que les personnages disent (d’eux et du monde) et la réalité de ce qu’ils traversent. Ce décalage m’amuse autant qu’il me fascine et me trouble. Il est pour moi à la fois un chemin de connaissance et de plaisir.

 

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Mon opinion

 

Emmanuel Mouret réalise, scénarise et tient le rôle principal de ce Caprice.

 

Un joli titre pour ce film dans lequel l'amour est roi.

 

L'ensemble d'une apparente légèreté, un rien insolite mais avec une certaine profondeur se veut et reste une sympathique comédie sentimentale. Tout l'univers du réalisateur et ses références cinématographiques offrent quelques beaux moments de pure comédie.

 

Caprice est un agréable divertissement servi par un trio d'acteurs convaincants auquel Laurent Stocker vient apporter son talent et une touche bien particulière. Anaïs Demoustier, d'une belle justesse se fond parfaitement dans les propos du scénario et l'univers du réalisateur

 

Une comédie française qui a le mérite de retenir l'attention tout en restant un sympathique moment de cinéma dans cet univers bien particulier du réalisateur.

 

Un univers qui a le mérite d'exister, d'une part, de nous divertir d'autre part.

Caprice
24 avril 2015 5 24 /04 /avril /2015 20:56

   
Date de sortie 8 avril 2015

 

Jamais de la vie


Réalisé par Pierre Jolivet


Avec Olivier Gourmet, Valérie Bonneton, Marc Zinga,

Jean-François Cayrey, Thierry Hancisse, Paco Boublard

avec la participation de
Julie Ferrier et de Bruno Bénabar


Genre Policier


Production Française

 

C'est le côté très réaliste du personnage de Franck qui a attiré Olivier Gourmet. Il explique : "C’était très excitant de se voir proposer ce personnage (extra) ordinaire, mais tellement concret et proche de la réalité sociale d’aujourd’hui. Cet homme vient du combat syndical, il était engagé, actif. Mais il a poussé le bouchon trop loin, il a eu le tort de se croire le sauveur du monde."

 

Synopsis

 

Franck (Olivier Gourmet), 52 ans, est gardien de nuit dans un centre commercial de banlieue.

Il y a dix ans, il était ouvrier spécialisé et délégué syndical, toujours sur le pont, toujours prêt au combat. Aujourd’hui il est le spectateur résigné de sa vie, et il s’ennuie.

Une nuit, il voit un 4x4 qui rôde sur le parking, et sent que quelque chose se prépare…

La curiosité le sort de son indifférence et il décide d’intervenir. Une occasion pour lui de reprendre sa vie en main…

Jamais de la vie

Entretien avec Pierre Jolivet

relevé sur unifrance.org

 

Comment est né Jamais de la vie ?


D’une envie commune avec mes deux producteurs, Marc-Antoine Robert et Xavier Rigault, celle de retravailler ensemble. Au moment de Mains armées, je leur avais raconté plusieurs histoires qui me trottaient dans la tête, dont celle d’un gardien de nuit, sur un parking de banlieue. Et cette
histoire-là était restée dans leur mémoire, fortement. J’ai été sidéré que la dureté de ce récit, l’histoire de cet homme qui se révolte contre ce que la vie d’aujourd’hui a fait de lui, puisse trouver un écho si fort chez des producteurs de 40 ans. Puis les distributeurs de Ad Vitam qui sont de la même génération, nous ont emboité le pas. Cela m’a permis de réaliser qu’ils avaient compris la force d’actualité que contenait le sujet.

 

Jamais de la vie est votre quinzième film, sans doute le plus sombre. Dans la plupart de ceux qui l’ont précédé, soufflait un vent d’utopie, l’idée qu’on s’en sortirait, malgré tout. Là, on est dans un registre plus douloureux.


Comme l’époque ! Je crois que la conscience des difficultés à affronter, le sentiment d’un avenir bouché n’ont jamais été aussi forts. J’ai donc décidé d’aller jusqu’au bout de ma démarche avec mon personnage principal, Franck. Et je pense que c’est justement en prenant cette option extrême qu’il retrouve quelque chose qui ressemble à l’espoir. Quelque chose qui ranime chez lui une forme de noblesse, de rachat. Le film, en effet est noir, mais je ne l’ai pas voulu glauque ou complaisant. On n’en sort pas accablé, mais je l’espère, saisi d’empathie pour un personnage complexe et attachant.


Jamais de la vie - Oliver Gourmet

Oui, Franck est un anti héros qui devient en quelque sorte un héros. Il est héroïque, parce que la révolte - même anesthésiée - est demeurée en lui. C’est un ancien délégué syndical, sûrement grande gueule, il a eu cette capacité de réagir, de répondre à l’humiliation. Et au début du film, il est en jachère de cette révolte. Sur ce parking, la nuit, il est en jachère de lui-même.

 

 

En fait, il s’est laissé dépasser par les évènements, par les revers, par ce monde numérique, qui
broie les emplois…

 

Franck a quelque chose des héros de Peckinpah, des hommes qui appartiennent à une époque révolue et qui livrent leur dernier combat. Il a accepté d’être gardien de nuit, faute de mieux. Et un gardien de nuit a le temps de penser, de réfléchir, dans le silence et la solitude que la nuit induit. J’ai toujours été fasciné par les gens qui travaillent la nuit, seuls. Par la force de leurs doutes existentiels, pour peu qu’ils aient un cerveau, et qu’ils s’en servent. Or, le personnage de Franck a un cerveau, et il s’en sert. Ses nuits sont longues, il a tout le temps de regarder autour de lui et à l’intérieur de lui-même. Et quelque chose va se réveiller, s’enflammer en lui.

 

Le film est l’histoire d’un homme qui va reprendre son destin en main.

Malgré l’opinion qu’on en a a priori, il se dégage du décor naturel, - cette banlieue nocturne, ce centre commercial désert -, une certaine beauté.


Oui, il y a dans ce décor, sinon de la beauté, du moins un pouvoir d’attraction. Il s’agit de le capter, et ça n’était pas difficile pour moi, j’ai grandi en banlieue et j’ai toujours cherché à trouver une forme d’harmonie - même secrète -, dans le décor où je vivais. J’allais à Paris voir Lawrence d'Arabie et je rentrais au fin fond de Maisons-Alfort avec la conviction que ma vie n’était pas si désespérante, que l’aventure pouvait naître au coin de la rue et que tous les décors ont une âme. Tout dépend de la façon dont on les regarde. Le décor en question, je ne le regarde pas avec amour mais je le regarde comme un lieu où une dramaturgie est possible. Nous avons parcouru beaucoup de kilomètres avant de trouver ce lieu cohérent, aux environs de Roissy, qui rassemblerait tous les éléments nécessaires à notre histoire. C’est assez obsessionnel chez moi, cette attirance pour les zones commerciales !
Je n’avais pas beaucoup voyagé avant que mon premier film, Strictement personnel, fasse le tour des festivals. Partout dans le monde, autour des aéroports, chaque fois que je traversais ce genre de no man’s land étrange réputé anonyme, il m’interpelait davantage qu’un centre-ville regorgeant de monuments et de beaux bâtiments. J’ai toujours eu l’impression qu’il pouvait s’y passer quelque chose de dramatiquement intéressant. Il y a des perspectives, c’est large, la vue porte loin, l’imagination a de la place pour se déployer. C’est ce souffle là que je recherche depuis toujours, en mettant - si j’ose dire -, du souffle dans le minimalisme. Il y a cependant dans l’utilisation de ces décors, une frontière que je ne veux pas franchir : celle de l’esthétisme. Cela a été le souci constant d’Emile Ghigo, mon décorateur, de Jérôme Alméras, mon chef opérateur, et du mien. Mettre l’environnement en accord avec ce qui s’y déroule, le mettre au service de l’humain qui s’y déplace. Le spectateur voit le personnage dans ce décor particulier, mais le personnage ne sait pas l’image qu’il renvoie. Un gardien de parking, la nuit. Il surveille, c’est tout. Il ne sait pas l’émotion qu’il peut renvoyer à quelqu’un qui le regarde, de loin, surveillant le parking. C’est le regard que moi je pose.

 

Dès l’écriture du scénario, le personnage de Franck avait-il déjà un corps ? Voyiez-vous déjà un comédien qui puisse en prendre possession ?


Bien entendu. Franck est sur la route de la soixantaine, on va lui calculer sa retraite, il faut qu’il soit assez costaud pour être gardien de nuit. À partir de là, le corps du personnage commence à se dessiner. Et l’évidence est apparue, cet homme-là, ce corps-là, cet acteur-là, c’est Olivier Gourmet. On lui a envoyé le scénario. Il a rappelé 48 heures plus tard. Ensuite, tout a été extraordinairement simple. Nous avons eu une lecture très approfondie du scénario. Il n’a fait aucun commentaire. Je l’ai interrogé : "Olivier, vous allez vivre physiquement avec ce personnage pendant huit semaines, il y a peut-être certaines de ses phrases, de ses mots, de ses postures qui ne vous conviennent pas, n’hésitez-pas à me le dire". Non, il n’avait rien à redire.
Et j’ai eu le bonheur de découvrir que j’avais devant moi un acteur hors du commun. Il est à 120%, tout le temps. La nuit, sous la pluie, dans le froid, il ne sort jamais de son personnage, absolument jamais. Il donne son corps, son âme, son talent. À 120%.

 

Jamais de la vue - Olivier GourmetD’autres aussi ont évidemment cette capacité, mais lui, en plus, il le fait avec une discrétion et une amabilité incroyables. Il est belge. Comme les acteurs anglais sont anglais. Une disponibilité totale, un professionnalisme exceptionnel que j’avais croisé avec Alan Bates et Kristin Scott Thomas dans Force majeure et que j’ai retrouvé dans Jamais de la vie avec Olivier Gourmet.

 

Qu’on n’a donc pas à "diriger", mais qui se montre parfaitement réceptif aux indications qu’on lui donne. Ainsi j’ai demandé à ce Franck prisonnier de sa vie, de me donner de rares sourires. Il sourit donc cinq ou six fois dans le film. Des sourires, jamais les mêmes, qui racontent chacun une chose différente, et qui, tout d’un coup, illuminent tout. Au dernier plan du film, il a reçu de la part de toute l’équipe technique une standing ovation de dix minutes.

 

Je n’avais jamais vu ça de ma vie.

Olivier Gourmet est un grand acteur, mais vous lui avez donné un rôle à sa mesure…


J’espère. Je vois un acteur dans un film et si j’aperçois quelque chose de lui qui me plaît mais qu’il n’a jamais vraiment exprimé, je me dis que j’aimerais l’emmener là, c’est à dire un peu plus loin. J’ai la faiblesse de croire que j’ai réussi quelquefois. Olivier Gourmet, toujours à la hauteur de ses rôles, petits ou grands, est évidemment lié pour moi intimement au cinéma des frères Dardenne, où il a endossé magnifiquement des personnages parfois peu sympathiques, y compris, en premier lieu, celui de La promesse où je l’ai découvert. Je l’ai vu ensuite dans beaucoup de films, bien entendu, et j’ai pensé, ce serait formidable si je parvenais à le rendre un peu plus charnel, plus charismatique, plus héroïque. Et je n’ai eu aucun problème pour y parvenir, parce que tout cela est venu de lui.

 

Autour de Franck gravitent des personnages tous attachants, qui n’ont de "secondaires" que le nom.


Ils se mettent à exister dès le début de l’écriture du scénario. J’ai en tête la trajectoire du personnage principal et laisse venir à lui des caractères qui vont le faire réagir positivement ou négativement, qui vont élargir son champ d’action et d’émotions et parlent finalement davantage que lui, le laissant se révéler face à eux mais en creux. Je ne peux me résoudre à faire vivre un caractère sur une scène ou deux, en pensant que ce n’est qu’un faire-valoir.

 

Jamais de la Vie - Valérie BonettonAinsi le personnage de Mylène, la conseillère du centre social, dont on peut dire qu’elle est le deus ex machina inattendu de l’histoire et à qui Valérie Bonneton apporte son don de sympathie immédiat, son naturel plein d’humanité. Le monde dans lequel nous sommes, celui qui rémunère davantage l’argent que le travail, compte sur des gens comme Mylène, compte sur leur compassion pour que l’édifice ne craque pas trop.

 

Mais comme beaucoup, elle est au bord de la rupture. Travailleuse… mais pauvre.

 

Ainsi le personnage de Ketu, le vigile black du centre commercial, encore plus démuni que Franck, incarné par l’étonnant, l’intense Marc Zinga, acteur belge, lui aussi. Ketu est comme la majorité des émigrés, il travaille comme il peut, mais c’est dur. Alors aujourd’hui, il se laisse aller à envisager un casse. Sans oublier la soeur de Franck, Julie Ferrier, son double… en drôle… mais finalement en pire. Ou Thierry Hancisse qui joue Etienne, le copain des luttes syndicales, ou Bruno Bénabar qui nous embarque avec ses oiseaux migrateurs.

 

Dans Jamais de la vie, ils ont des places essentielles, et ont tous trouvé des interprètes qui n’ont pas mesuré l’importance de leur rôle au nombre de leurs jours de tournage.

À la fin, Franck va s’opposer au braquage de "sa" banque, et le film soudain prend le rythme, la noirceur, la couleur d’un vrai polar.


C’est vrai, j’aime le polar. Avec la tension que cela induit. Avec ses bons, ses méchants, mais surtout la porosité qu’il y a entre les deux. Et Franck, finalement, se révèlera du côté des bons. Mais il est fatigué, il n’a plus la force de monter sur des barricades sociales ou politiques, il va s’en prendre à l’ennemi qui passe à sa portée. Il intervient. Il se réapproprie son destin. Il cesse d’être le spectateur de sa vie. Pas un mot ne sera échangé pendant les vingt dernières minutes. On est avec Franck, avec ce corps en action, cet homme qui part à la bataille dans sa vieille voiture avec un oreiller sur le ventre en guise d’airbag. Ce qui me fascine, c’est de montrer un héros qui a pour seule arme un revolver sans balle.

Pourquoi s’oppose-t-il à ce braquage ? Pas par respect de la loi, pas par engagement citoyen, juste pour ne pas laisser faire. Il le dit lors de sa rencontre avec Etienne, son compagnon de lutte : "Laisser faire ça n’a jamais été mon truc". Aujourd’hui, quand une société se délite, c’est aussi parce qu’on laisse faire… Franck a conservé son porte-voix, relique des manifs d’autrefois. Cet accessoire semble aujourd’hui dérisoire, il est le témoin des luttes anciennes. Je voulais que le titre soit entendu dans ce porte-voix. "Camarades ! Jamais de la vie !". C’est dans ce sens là,
dans le réveil de cette rébellion, que le film n’est pas foncièrement pessimiste. Il professe qu’en chacun de nous, demeure quelque chose qui dit non, qui dit "jamais de la vie !".

 

La musique est très efficace mais parcimonieuse…


C’est la troisième fois que je travaille avec Adrien Jolivet, mon fils, et Sacha Sieff, après Zim & Co.  et Mains armées. J’ai aimé qu’après la vision du film, ils me confortent dans mon choix d’utiliser très peu de musique. Adrien, notamment, m’a tout de suite convaincu de ne surtout pas en mettre sur le générique du début. On est ainsi tout de suite plongé dans le vide de la vie de Franck, pas besoin d’enjoliver. Adrien et Sacha passent beaucoup de temps avec moi, avec le monteur son, ils font cela les oreilles et le coeur bien ouverts. Trouver la couleur, par exemple, de l’instant où Franck découvre le lamentable décompte de sa retraite, n’était pas évident si on ne voulait pas tomber dans le pathos, ils ont réussi.

 

Un contrepoint ironique et tendre, féminin aussi, vient clore le film après les scènes d’action violentes. C’est, dans la version de Stacey Kent, la chanson immortalisée par Louis Armstrong, What A Wonderful World.

Oui, quel monde merveilleux que le nôtre…

 

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Mon opinion

 

Le triste décor d'un centre commercial de nuit. L'enseigne d'une grande surface qui se reflète sous la pluie dans des flaques d'eau d'un parking déserté. Un appartement "sans vie". Des barres d'immeubles et la superbe photographie de Jérôme Alméras pour, d'emblée, plomber l'atmosphère.

 

Autant de décors glauques dans lesquels évolue, pour une grande partie du film, le principal protagoniste. L'excellent Olivier Gourmet. Un homme à la dérive, emmuré dans une grande solitude.

 

Le scénario dévoile habilement l'intrigue. La vie de tous les personnages n'apportera aucun réconfort. L'ensemble reste d'une incroyable noirceur et le triste reflet d'une effroyable réalité.

 

La réalisation, et les dialogues servent parfaitement ce film parfaitement maîtrisé de bout en bout.

 

Aux côtés d'Olivier Gourmet, l'excellente Valérie Bonneton. Julie Ferrier, dans une brève apparition tout aussi parfaite. Marc Zinga, Thierry Hancisse et Bénabar complètent un casting sans faute.

 

Si Pierre Jolivet laisse espérer une ouverture vers une autre vie, pas forcément meilleure, il n'en sera rien.

 

Il réalise un film implacable, lourd et glacial dont on ressort sonné. Un film qui résonne comme un cri de désespoir face à l'indifférence générale.

Jamais de la vie
Jamais de la vie
Jamais de la vie
23 avril 2015 4 23 /04 /avril /2015 13:44

 

Date de sortie 22 avril 2015

 

Entre Amis


Réalisé par Olivier Baroux


Avec Daniel Auteuil, Gérard Jugnot, François Berléand,

Zabou Breitman, Mélanie Doutey, Isabelle Gélinas,

Jean-Philippe Ricci et Justine Bruneau de la Salle


Genre Comédie


Production Française

 

Synopsis

 

Richard (Daniel Auteuil), Gilles (Gérard Jugnot) et Philippe (François Berléand) sont amis depuis près de cinquante ans.

 

Le temps d’un été, ils embarquent avec leurs compagnes sur un magnifique voilier pour une croisière vers la Corse. Mais la cohabitation à bord d’un bateau n’est pas toujours facile. D’autant que chaque couple a ses problèmes, et que la météo leur réserve de grosses surprises...

 

Entre rires et confessions, griefs et jalousies vont remonter à la surface. Chacun va devoir faire le point sur sa vie et sur ses relations aux autres. L’amitié résistera-t-elle au gros temps ?

 

Entre Amis

Entretien avec Olivier Baroux

relevé sur unifrance.org

 

Entre amis est votre 7e film de réalisateur. Comment en est née l’idée ?


L’idée et même l’envie de ce film vient de Richard Grandpierre, qui en est à la fois le producteur et l’auteur à la base. Cela fait un moment qu’il rêvait de réunir à nouveau à l’écran Daniel Auteuil et Gérard Jugnot, qu’il connait depuis longtemps, et de leur associer François Berléand. Richard a donc écrit le scénario avec Eric Besnard, avec qui j’avais travaillé sur L’Italien. Je n’ai plus eu au final qu’à mettre ma patte. Mais au départ, il était même question que Richard réalise le film. Je l’ai poussé très longtemps en lui disant que c’était une belle opportunité mais au final il a eu l’honnêteté de reconnaîitre qu’il ne se sentait pas de le faire parce que le projet était trop lourd. Richard m’a donc offert ce cadeau merveilleux et c’est moi qui ai réalisé Entre amis

 

Qu’est-ce qui vous plaisait tant ?


J’y suis allé parce que le sujet me parlait.
J’ai eu l’occasion de faire pas mal de croisières sur des petits bateaux de ce genre, dont une mémorable avec Kad dans les Grenadines. Comme Gérard Jugnot dans le film, j’avais à l’époque décidé d’arrêter de fumer et ça s’est très mal passé ! Dès la lecture du début du scénario, je savais que je pouvais raconter tout cela mais aussi la promiscuité sur un bateau, la difficulté de devoir rester en mer pendant des jours, le mauvais temps, les gens malades à bord ou ceux qui, comme Isabelle Gélinas dans le film, préfèrent rester dehors quelles que soient les conditions météo…

Tout est exacerbé dans ce contexte-là : les deux premiers jours c’est super mais quand on sait qu’il en reste six, ça peut virer au cauchemar ! Au-delà de l’histoire, je dois dire que l’aspect technique m’excitait beaucoup aussi. On n’a pas tous souvent l’occasion de mettre en scène une tempête…

 

C’est aussi ce qui fait l’intérêt de Entre amis : ce côté spectaculaire sur lequel nous reviendrons et le huis-clos très vaudeville entre les personnages…


Absolument j’aimais ce double aspect mais également la possibilité de parler de la nostalgie.


Entre AmisJ’ai aujourd’hui 51 ans et c’est un âge où l’on commence à évoquer ses souvenirs. J’ai des amis de longue date, (les fameux amis de 30 ans !), et je voulais aborder l’idée du temps qui passe et la raison ou la façon dont on reste amis malgré cela. C’était aussi passionnant d’imaginer comment ce groupe de potes réagirait si l’un d’entre eux divorçait et leur présentait sa nouvelle femme, beaucoup plus jeune que lui !

 


Comment ses amis accepteraient-ils cette intruse ?

 

Avec d’ailleurs la tempête en métaphore : l’amitié a parfois besoin d’une bonne bourrasque pour perdurer…


Ça c’est certain, même si là, nous avons poussé le curseur un peu loin : heureusement, on se dispute rarement aussi durement entre potes ! Ceux du film vont vraiment régler tous leurs comptes dans une scène assez violente autour du personnage de Richard, joué par Daniel Auteuil…

 

Le fait de tourner avec des comédiens venus ou abonnés à la scène est également un atout j’imagine ?


Entre AmisOui et tous ont vraiment nourri le film. Zabou Breitman, par exemple, a été une collaboratrice essentielle pour qu’on ne déteste pas totalement son personnage. C’est elle qui nous a aidés à trouver des nuances. Tous l’ont fait et à l’arrivée c’est un véritable travail en commun, ce qui n’arrive pas sur tous les films. Certains acteurs préfèrent se laisser porter par le scénario.

 

Ici, il y a eu beaucoup de questionnements et pas mal d’évolution qui ont servi le film…

 

Sans trop en dire, entrons dans le secret de la fabrication de Entre amis.

Comment avez-vous procédé entre ce qui se passe réellement en mer et ce qui se déroule en studio ?

 

En amont du tournage, nous avons revu pas mal de films et notamment All is lost avec Robert Redford. Rapidement, il a été décidé de faire autrement ! Nous avions donc un vrai bateau et une réplique un peu plus petite du voilier, montée sur vérins pour simuler le roulis en studio. Au-delà des scènes de tempête, elle nous a été très utile pour des séquences plus paisibles mais qui posaient problème en termes de lumière. Quand vous tournez sur un vrai bateau, entre la sortie du port, l’installation du matériel, les changements de cadres, de plans, etc vous n’avez en fait que 4 heures pleines par jour pour tourner. C’est possible bien sûr mais ça dure quatre mois, ce qui n’était pas envisageable côté budget ! Alors ce dispositif studio était formidable mais techniquement très compliqué, d’autant qu’il a fallu ensuite rajouter de la mer en images de synthèse. Ça m’inquiétait beaucoup mais j’ai vite été rassuré par les prouesses d’Alain Carsoux de La Compagnie des Images qui, juste avant  Entre amis, venait de signer les effets spéciaux de En solitaire. En fait, l’aspect comédie du film reste le plus important. La technologie nous a juste permis durant sept semaines de travail de rendre les choses plus spectaculaires… Quant aux scènes du début, de l’arrivée et de la sortie du port par exemple, elles ont été tournées à Marseille sur un vrai voilier pendant trois semaines.

Un mot au passage de la lumière du film qui est très soignée et maintient parfaitement l’illusion entre le "vrai" et le "faux"…


Elle est signée Régis Blondeau qui est un excellent chef opérateur et qui a beaucoup travaillé pour que tout soit raccord, par exemple la scène du dîner qui comporte des plans sur le vrai bateau et d’autres en studio…

 

Entre Amis

 

À propos de vrai bateau, vos comédiens ont eu à souffrir du tournage en pleine mer ?


Non pas du tout, c’est en studio que ça a été difficile ! Ils ont eu très froid à force de passer des jours à recevoir des litres et des litres d’eau à 16°C… Pour tourner la tempête, on leur envoyait 1000 litres par vague ! C’était donc extrêmement contraignant mais ils ont formidablement joué le jeu en s’amusant des nombreuses contraintes du tournage car en plus de l’eau et des différents modèles de pompes pour la projeter, il y avait aussi des ventilateurs et un bruit infernal sur le plateau !

 

En tant que réalisateur, entre devoir faire avec ces aspects techniques et ne jamais oublier le texte et la comédie, qu’est-ce qui été le plus difficile ?


En fait, nous avons tourné le film en deux parties: d’abord la comédie et ensuite la tempête. Ces scènes d’action étaient presque chorégraphiées: les comédiens savaient exactement ce qu’ils avaient à faire ce qui nous permettait de pouvoir les "oublier" un peu afin de nous concentrer sur la technique.

 

Êtes-vous d’accord si je vous dis que Entre amis est sans doute votre film le plus abouti en termes de réalisation ?


D’abord ça me fait très plaisir mais je crois que c’est surtout dû à l’histoire. C’est le genre de film qui ne peut pas se contenter d’être mis en scène basiquement et j’avais l’envie de tourner des beaux plans de ce bateau magnifique et ceux plus complexes de la tempête. En plus, j’ai eu la chance de disposer de tout le matériel pour donner une certaine amplitude au film. Je crois enfin que le fait de n’avoir qu’un seul décor, le bateau, m’a obligé à être plus imaginatif…

 

Vous parliez de All is lost en référence aux films En mer. En avez-vous revu d’autres avant le tournage ?


Oui, notamment Master and commander de Peter Weir qui utilisait une technique différente, en bassin sur vérins. Le making-of est passionnant. J’ai également regardé Calme blanc de Phillip Noyce qui avait été entièrement tourné en mer sur un voilier. Côté documentation, j’ai lu quelques récits de mésaventures en croisière et surtout le cauchemar du tournage des Dents de la mer de Spielberg !

Prenons maintenant les personnages un par un, à commencer par Richard, celui joué par Daniel Auteuil…


Déjà, le fait d’évoquer la possibilité de tourner avec Daniel Auteuil m’a un peu fait trembler ! J’avais eu la chance de le croiser sur le tournage de La fille du puisatier dans lequel jouait Kad, lequel m’avait dit qu’il appréciait mon travail. Nous nous sommes vus chez lui et il m’a confirmé tout cela, ce qui m’a apaisé !

 

Daniel est un grand acteur de comédie : il a commencé par-là, avant d’avoir la chance de croiser la route de Claude Berri et de devenir Ugolin, ce qui a transformé sa carrière. C’est quelqu’un de généreux, de bon, de sympathique, d’inventif. Il fait en plus partie d’une génération de comédiens que je ne connaissais pas en tant que metteur en scène et c’est passionnant de travailler avec des gens qui ont ce parcours… Autant vous dire que je n’ai pas dirigé Daniel par exemple sur la scène du pétage de plomb ! Il y est allé tout seul, presque dans une sorte de folie… Richard, son personnage, est un type qui a réussi, qui a beaucoup d’argent et qui invite ses potes et sa nouvelle épouse en vacances. Sauf que cette année-là, il vient de divorcer, et pour ne pas retourner dans la maison habituelle occupée par son ex-femme, il loue un bateau. C’est donc le vrai bon copain mais avoir de l’argent pose un problème à ses amis. C’est compliqué de faire plaisir quand on est riche : il faut le faire discrètement, sans en parler, au risque de se le voir reprocher. Il le leur dit à un moment : "vous êtes jaloux"

 

Gilles, interprété par Gérard Jugnot…


Lui, c’est sans doute le plus simple des trois garçons. Quand on lui demande combien il lui faudrait pour ne plus avoir à travailler, il répond "un million" alors que les autres tablent plutôt sur trois ou cinq ! Sa seule vraie problématique, c’est d’arrêter de fumer. Il y en a une autre plus intime et plus grave que l’on découvre vers la fin de l’histoire. Un moment de sa vie très douloureux pour lequel ses copains n’étaient pas là… En le leur avouant, il n’est pas dans le reproche, juste dans le constat. Je connaissais un peu Gérard, qui nous avait invités Kad et moi pour un numéro du "Gala des artistes" au Cirque d’Hiver. J’avais découvert quelqu’un de très simple, assez timide qui apparemment m’aimait bien ! Il a dit oui très vite pour le film car je crois qu’il était aussi ravi de retrouver son vieux pote Auteuil au cinéma.

 

François Berléand est Philippe…


Lui je le connaissais un peu mieux pour avoir partagé quelques sketches en sa compagnie à la télévision. Je l’avais vu plusieurs fois au théâtre où je l’avais trouvé formidable. Autant vous dire que ça n’a pas été le plus facile à gérer sur le tournage : François possède un humour assez rude et nous avons vécu ensemble une sorte d’amour vache pendant dix semaines ! J’ai adoré ce moyen de communication à base de "ouais c’est ça pauv’ con", "casse-toi t’es nul" et moi lui répondant "bouge-toi t’es trop vieux"! Il joue le rôle de Philippe, un type au bord de la rupture, notamment avec sa redoutable femme qui gagne beaucoup mieux sa vie que lui. C’est une vraie souffrance pour lui car il est encore sur le vieux schéma qui veut que l’homme ramène la pitance à la maison ! Au début de la croisière, c’est clairement un couple en fin de parcours…

 

Entre Amis

On passe aux femmes et d’abord à Mélanie Doutey dans le rôle de Daphné…


J’ai fait mon premier film, Ce soir je dors chez toi, avec Mélanie et c’est une actrice que j’adore, qui peut tout jouer et elles ne sont pas si nombreuses que ça ! Quand je lui ai proposé Entre amis, elle a demandé à lire et nous avons ensuite travaillé ensemble son personnage. Elle comme moi ne voulions pas tomber dans la caricature de "la jeune nana un peu écervelée qui épouse un mec blindé" ! Nous avons donc cherché et trouvé des petites nuances qui ont donné une autre épaisseur à Daphné, comme son métier d’ophtalmologiste. Mélanie a 35 ans aujourd’hui, elle ne peut plus et ne veut plus jouer les gamines. Nous lui avons par exemple coupé les cheveux au carré, ce qui la rend plus femme. Ensuite, il y avait également l’aspect comédie et on peut dire sans trop révéler de choses que Daphné n’a pas beaucoup de chance à bord du bateau…

 

Zabou Breitman est Astrid…


Avec Kad, nous avons une histoire assez particulière avec elle. Il y a des années, on nous avait demandé de présenter le Festival du Film de Comédie de l’Alpe d’Huez. Évidemment, vous imaginez bien que nous avons fait les crétins sur scène et à la fin, Zabou est venue nous voir pour nous engueuler comme à l’école ! Quand on m’a proposé son nom pour le film, j’espérais qu’elle ne se souviendrait pas de cet épisode et heureusement, c’était le cas ! On ne s’en est même jamais parlé…

J’ai découvert sur le plateau une actrice formidable, une réalisatrice aussi qui m’a tout de suite assuré de son soutien et de son entière collaboration. Et c’est vrai que Zabou m’a vraiment aidé, en apportant des idées, des répliques comme nous le disions tout à l’heure. Un bonheur ! Elle avait en plus à jouer un rôle délicat : Astrid est une femme très riche, qui travaille dans la pub, qui a consenti à reculons de faire cette croisière et qui en plus est la meilleure amie de l’ex-femme de Richard. Évidemment, d’entrée, elle va détester Daphné ! Bref, un personnage insupportable au bout d’un quart d’heure mais qui cache aussi un vrai problème. Elle aime encore son mari mais elle n’ose pas l’avouer…

 

Enfin Isabelle Gélinas qui interprète Carole…


C’est une comédienne que je suis depuis longtemps et à qui j’avais déjà pensé pour des films précédents. Une fille formidable, adorable, fait confiance et se laisse emporter par un réalisateur. Quand il a fallu aller se baigner dans une mer à 11°C, elle était la première dans l’eau ! Carole son personnage est très proche de Gilles son mari. 0 bord, c’est un véritable marin : une révélation alors qu’elle n’a jamais fait de bateau…
C’est aussi la seule qui apprécie vraiment cette croisière et qui n’arrête pas de dire merci et combien elle a de la chance de vivre ce moment. Carole n’est pas quelqu’un de blasé, elle nage dans le bonheur, ce qui, (entre autres), énerve beaucoup Astrid !

 

Un mot aussi de Battistu, le commandant du voilier. Quel personnage !


À l’origine, nous étions partis sur un skippeur yougoslave mais ça ne fonctionnait pas. La croisière ayant lieu en Corse, son origine s’est imposée d’elle-même ! Moi qui connais bien cette île, je ne voulais pas tomber dans la parodie du type très attaché à ses racines. Je voulais un rôle plus nuancé et je me suis souvenu de Jean-Philippe Ricci que j’avais vu dans Un prophète ou Mafiosa et ça m’a paru évident. Encore fallait-il qu’il accepte de jouer la comédie ou plutôt qu’il s’en sente capable. Nous avons fait des essais et c’était parfait, immédiatement. Jean-Philippe a un physique impressionnant, une stature, mais dès qu’on le place dans le registre du rire, ça fonctionne, comme souvent d’ailleurs avec ces acteurs venus d’univers plus sombres. D’ailleurs, lui qui avait peur de se confronter à Daniel ou François par exemple a été immédiatement accepté, comme une cooptation…

 

Battistu a une autorité naturelle mais c’est aussi quelqu’un de doux, qui aime jouer de la guitare le soir sur le pont : un gentil mec, un peu lassé d’emmener des touristes au même endroit chaque semaine.

 

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Mon opinion

 

Un formidable trio d'actrices face à trois excellents comédiens. Trois couples d'horizons divers et, sans surprise, l'intrigue se dévoile dès les premières minutes. Tout va vite, et l'invraisemblable prend le pas sur ce qui aurait dû rester dans la dérision.

 

Sans aucune finesse, quelques répliques dans la bouche des comédiennes arrivent toutefois à arracher un sourire. Elles se déchaînent et leur talent suffit. Elles s'en tirent malgré un cabotinage quelque peu excessif.

 

Faute d'une solide direction d'acteurs, les trois principaux protagonistes s'amusent sous nos yeux sans nous entraîner dans la folie de cette aventure.

 

Les effets spéciaux qui se voudraient impressionnants n'ont rien de spectaculaires. La photographie numérique de l'ensemble des arrières-plans est particulièrement ratée.

 

Un film sur l'amitié. Un de plus. Sur ces retrouvailles qui virent au règlement de compte avant la réconciliation, ou pas. Bref, rien de très nouveau.

Entre amis
15 avril 2015 3 15 /04 /avril /2015 18:37


Date de sortie 15 avril 2015

 

En équilibre


Réalisé par Denis Dercourt


Avec Albert Dupontel, Cécile de France,

Marie Bäumer, Patrick Mille, Vincent Furic, Mélanie Malhère, Christophe Briand


Genre Drame


Production Française

 

Synopsis

 

Marc (Albert Dupontel) est cascadeur équestre.

 

Un grave accident sur un tournage lui faire perdre tout espoir de remonter un jour à cheval. Florence (Cécile de France) est chargée par la compagnie d'assurances de s'occuper du dossier de cet homme brisé.

 

Cette brève rencontre va bouleverser leurs équilibres...

 

En Équilibre - Albert Dupontel

 

Albert Dupontel

Entretien avec Denis Dercourt

relevé sur www.unifrance.org

 

D'où est née l'idée d'adapter le livre de Bernard Sachsé ?


Lorsque les producteurs de Mandarin Cinéma me l’ont fait lire, je me suis tout de suite senti très proche du sujet. Peut-être parce que, lorsqu’il est devenu paraplégique à trente ans Bernard Sachsé était un cascadeur qui vivait du cachet, comme je l’avais fait moimême longtemps en musique. La peur de l’accident, qui empêcherait d’exercer l’activité à laquelle vous vous consacrez depuis votre plus jeune âge, est une constante chez les musiciens. Plus profondément, ce thème d’un homme qui se reconstruit avait une forte résonance en moi. Dès le départ j’ai su que, pour l’élaboration du récit, je lui associerais le thème de la rencontre.

 

C'est la première fois que vous vous attaquez à une figure imposée.


J’ai beaucoup aimé cette expérience. C’est intéressant de se confronter à un autre univers, d’autres désirs. Je ne veux pas que l’univers de mes films se fige, et je cherche autant que je peux à élargir la palette.

 

Comment avez-vous travaillé avec Bernard Sachsé ?


Je l’ai rencontré plusieurs fois en début d’écriture. Bernard a beaucoup de charisme, c’est aussi quelqu’un de très positif, qui ne s’apitoie jamais sur lui-même. Pourtant j’ai dû cesser assez rapidement de le rencontrer, pour pouvoir mieux imaginer mon récit. Bernard a accepté cette prise de distance.

 

Tout en étant fidèle au personnage de Bernard Sachsé, le film prend en effet beaucoup de libertés par rapport au livre, et devient finalement très personnel.


Sur mes quatre jambes est le récit du parcours de cavalier de Bernard Sachsé, c’est le document qui m’a permis de construire le personnage de Marc.

Mais le personnage de l’assureuse est entièrement fictionnel – même s’il est inspiré du combat que Bernard a dû livrer contre les compagnies d’assurances.

 

Après son accident, Marc doit en effet se livrer à un véritable bras de fer avec les assurances qui tentent par tous les moyens de limiter leurs responsabilités ....


Dans leur livre, Bernard Sachsé et Véronique Pellerin retracent brièvement le combat que Bernard a dû livrer contre ces compagnies - combat qui a duré plus de dix ans et qu’il a heureusement fini par gagner. Ce ne sont que quelques lignes, mais très instructives. Elles ont orienté mes recherches au moment où je construisais la narration. Sans chercher à dénoncer le monde des assurances et la double peine encourue parfois par les accidentés, le film entrouvre une porte sur certaines pratiques sauvages de ce milieu. Scénaristiquement, cela permettait aussi d’apporter une pointe de thriller au sujet. Je voulais que la mise en tension provoquée par les scènes de l’accident au début soit maintenue tout au long du film

En équilibre

Dans le film, le héros parvient à surmonter son handicap en remontant à cheval et en devenant un champion accompli. Il aide également Florence à renouer avec sa vocation de musicienne. Ces trajectoires d'accomplissement individuel sont importantes dans En Équilibre.


Le postulat était que des deux personnages, le plus blessé n’est pas forcément celui qu’on croit. On comprend assez vite que Marc ne renoncera pas à sa passion. Alors que Florence en revanche, a en quelque sorte démissionné. Sa blessure est plus profonde. Et c’est au moment où Marc lui permet de surmonter ses peurs et de dépasser son traumatisme, que se noue véritablement leur histoire. Peut-être plus qu’un film d’amour, j’ai travaillé avec l’idée que En Équilibre devrait être un film d’émotion, où il se raconte quelque chose sur le passage du temps. C’est le temps de cette rencontre qui va changer Florence et Marc, les révéler à eux-mêmes. C’est ce qui les remet "en équilibre". Bien sûr, au point de vue narratif, ce genre de travail implique de toujours rester attentif à ne pas laisser de prise au cliché. Le mari, par exemple, ne devait pas être un crétin. L’héroïne l’aime sincèrement. Il est seulement à notre image - normal et raisonnable.


Celui qui est exceptionnel est le personnage interprété par Albert Dupontel.

 

Albert Dupontel est d'ailleurs lui-même assez exceptionnel dans ce rôle.


Lors de notre première rencontre, Albert m’a raconté qu’il avait failli rester handicapé à la suite d’une maladie, lorsqu’il avait 25 ans. C’est une des raisons pour lesquelles, dès la lecture du scénario, il a si bien compris le personnage de Marc. À cette époque, Albert ne souhaitait plus être acteur. "Mais là je comprends la colère du personnage, je n’aurai pas besoin de composer !", m’a-t-il dit quand il a accepté le rôle.


Dès le départ il avait été convenu que ce serait lui qui assurerait toutes les cascades du film, en particulier celles à cheval.

 

En Équilibre - Albert Dupontel

Pour les scènes de la plage et de l’accident, ainsi que pour les séances de dressage dans le manège, il s’est entraîné plusieurs mois. Ce qu’il réussit à faire relève de l’exploit. Les figures de voltige sur la plage, par exemple, étaient tellement dangereuses que pour les besoins de l’assurance du film, nous avons dû les tourner le dernier jour.

 

 

 

Ces scènes de cascades sont effectivement très impressionnantes ! De même que la séquence en voiture, lorsque le héros réceptionne son véhicule spécialement conçu pour son handicap. On avait peu l'habitude de ces scènes d'action dans vos films ...


Il était important qu’on ressente l’énergie intacte du personnage, qui vient tout juste de sortir de l’hôpital. Il fallait qu’il y ait des scènes exutoires pour cette énergie.

 

Vous ne vous appesantissez pas sur ces scènes. Pourtant la tension qu'elles dégagent reste très présente tout au long du film.


J’ai toujours pensé qu’il valait mieux se montrer économe avec ce genre de scène. Comme cela, d’une certaine manière, on les prolonge : le spectateur garde leur élan en tête, et ensuite il "fait le travail". C’est comme si le spectateur continuait en lui-même le mouvement enclenché par le film. En ce qui me concerne, en tant que spectateur, j’aime entretenir ce type d’échange avec les films, j’aime les "compléter".

 

Par contraste, les personnages dans le film ont toujours beaucoup de tenue.


En Équilibre - Cécile de FranceUn cavalier, une musicienne doivent avoir de la tenue. Après six mois de travail auprès de Bernard Sachsé, Albert Dupontel avait adopté son port de tête, sa manière de croiser les bras. Après cinq mois de répétition, Cécile de France, qui n’avait pourtant jamais pratiqué le piano de sa vie, a acquis une posture de musicienne.

Dans le film, elle se déplace et joue comme une pianiste !

Comment a-t-elle fait ?


Lorsqu’ils interprètent des musiciens dans mes films, je demande aux acteurs qu’ils s’entraînent suffisamment longtemps à l’avance pour pouvoir jouer eux-mêmes les morceaux – je ne veux pas faire de trucages sur les mains. L’étude d’exécution transcendante de Liszt que joue Cécile de France dans le film, est une des plus difficiles du répertoire. Pour la scène de l’audition nous n’avons pas coupé pendant les prises, Cécile jouait à chaque fois l’étude jusqu’au bout. On m’avait prévenu avant le tournage que Cécile de France était une très grande travailleuse, et je dois dire que j’ai été bluffé. C’est d’ailleurs peut être une des raisons pour lesquelles la musique a pris une telle importance durant le tournage. À partir du moment où j’ai vu ce que Cécile était devenue capable de faire au piano, j’ai eu envie de nouvelles scènes avec elle. Elle était d’accord, et nous avons développé son personnage ensemble.

 

Pendant le tournage ?


Oui. Il n’était notamment pas prévu qu’elle repasse de concours à la fin du film. Au moment de tourner la prise, Cécile n’était pas sûre de mon idée."Comment peut-elle repasser cette épreuve après ce que lui a dit son professeur de piano ?", me demandait-elle.
Lorsque je lui ai expliqué que cela ne voulait pas dire que Florence allait devenir professionnelle mais qu’elle accomplissait ce geste pour elle-même, Cécile a accepté tout de suite la nécessité de la scène. Nous avions ce genre de discussions, qui permettaient d’enrichir le personnage de Florence. Avec une actrice de ce niveau, qui possède une telle intuition, il faut être très à l’écoute, parce qu’à travers elle c’est le personnage qui parle.

 

On a l'impression de découvrir Cécile de France dans un nouveau registre.


En Équilibre - Cécile de FranceJe savais que Cécile a une large palette de jeu, et qu’elle aime aussi aborder de nouveaux territoires, interpréter des types de personnages qu’elle n’a encore jamais faits. Ça a été un bonheur d’enrichir avec elle les nuances du rôle de Florence Kernel. Pour un réalisateur, voir le personnage se déployer bien au-delà de ce que vous aviez osé entrevoir à l’écriture, c’est véritablement un moment magique.

 

 

Cécile a fait durer cette magie jusqu’à la dernière prise.

 

Réécrire le film en cours de réalisation est-il une pratique courante chez vous ?


J’ai presque toujours procédé ainsi. Je n’aime pas que le scénario reste figé. Le dernier tiers de La tourneuse de pages  ne correspond absolument pas, par exemple, à ce qui était indiqué dans le scénario. Je me souviens d’une master-class auprès d’étudiants de la Fémis. Je leur avais donné à lire le scénario avant de voir le film. Je les entends encore protester : "Vous ne nous avez pas donné le bon script, ça n’a rien à voir avec votre film !"

 

Comment gère-t-on ces bouleversements sur un plateau ?


Dès le départ, je préviens l’équipe : "Attention, je vais bouger, il y aura du nouveau". Comme je me débrouille pour ne pas trop dépasser sur mes journées de tournage, cela ne pose pas de problèmes aux producteurs. J’aime tourner vite, je crois beaucoup à la rapidité - toujours ce souci d’aller à l’encontre de l’écriture. Je fais peu de prises, souvent une seule par plan pour garder une sorte de vibrato et instaurer une tension sur le plateau, et, vite, je passe à la scène suivante. Dans le cours même de la narration, j’aime que les personnages restent "sur le fil". C›est peut-être pour cela que mes films excèdent rarement une heure trente.

Le film se déroule entièrement à l'Ouest de la France, notamment dans les environs de Saint Malo ...


J’ai vécu là plusieurs années, c’est une région que je connais bien. Je pouvais puiser dans ces décors sans avoir à faire de trop longues recherches. Et aussi, je pouvais décrire cet arrière-fond social dans lequel évolue Florence Kernel, parce que c’est un milieu que j’ai eu souvent à observer.

 

Est-ce cet ancrage du film "à l'Ouest" qui fait qu'il véhicule pour le spectateur un certain type de références cinématographiques.


La géographie du tournage joue presque obligatoirement un rôle dans les choix des références de travail. Au stade de l’écriture c’était plutôt un film anglais qui m’avait servi de fil conducteur : Brève rencontre de David Lean. Mais au moment du tournage, j’ai demandé à mes collaborateurs de regarder Coming home, de Hal Ashby, qui se déroule sur la côte ouest des États-Unis. De toute façon ce n’étaient pas les mêmes références qu’avec mes deux films précédents, tournés en Allemagne.

 

Il y a dans votre film des moments de pure comédie. Par exemple quand Florence, assureuse, venue amadouer son client, se retrouve sommée de monter le cheval de Marc en talons aiguilles.


C’était le premier jour de tournage de Cécile de France. On était d’accord avec elle que, puisqu’elle n’avait jamais pris de cours d’équitation de sa vie, il était mieux pour le rôle qu’elle reste dans cet état "d’innocence ". Ce jour-là, le cheval était un peu nerveux et il a fait une embardée. En même temps, ce moment furtif de panique visible à l’écran est un avantage pour la scène.

 

 

Il y a aussi cet autre passage dans lequel marc fait passer Florence pour une pianiste célèbre aux yeux de ses amis éberlués, lors d'un déjeuner en bord de mer.


C’est la dernière fois qu’ils vont se voir, ils le devinent sans doute. Ils prennent le parti de s’amuser. Et bien sûr, cette complicité pousse l’émotion d’un cran supplémentaire.

Bernard Sachsé était conseiller équestre durant le tournage. Quel effet cela fait-il de travailler devant son modèle. Est-ce inhibant ?


Il aurait pu s’arquebouter sur certains points de vraisemblance technique. Mais ça n’a jamais été le cas et lui et moi n’avons eu aucun mal à nous accorder. La vérité aurait voulu qu’il y ait deux types de chevaux différents : celui qui effectue les cascades, avec lequel Marc a son accident, et celui monté en compétition de dressage, à la fin du film.
J’ai choisi de tricher, avec l’assentiment de Bernard Sachsé bien sûr : du point de vue narratif, c’était plus intéressant de réunir les deux chevaux en un seul, et de fabriquer ce personnage qu’est Othello, sur lequel on peut projeter beaucoup de choses, notamment la culpabilité de l’accident. Aujourd’hui, je suis très heureux de la réaction enthousiaste du monde équestre à l’égard du film. Les films comportant un tel aspect technique sont toujours un pari, on n’a pas envie de décevoir.

 

En même temps, les scènes entre le héros et son cheval dégagent beaucoup de sensualité.


Je suis frustré par la manière dont les chevaux sont mis en scène dans la plupart des films : ce sont bien souvent des images d’Epinal, qui ne correspondent pas à la réalité du cheval. Pour En Équiibre, avec Bernard Sachsé et le chef opérateur Julien Hirsch nous avions les tableaux de Géricault en tête. Nous voulions filmer les chevaux comme nous allions filmer les acteurs, caméra à l’épaule, au plus proche des corps. Et puis il y a le fait que les scènes équestres, dans ce film, sont presque toujours des scènes de travail équestre. C’est cet aspect de travail que je désirais privilégier. Je les ai filmées dans le même esprit avec lequel j’ai toujours filmé les scènes de musique dans mes films précédents. Il est connu que l’art de la musique et l’art équestre offrent de nombreux parallèles, jusque dans les termes utilisés. Ces sont deux arts exigeants, qui demandent de l’abnégation. Ils ne peuvent pas s’accomplir sans passion. Ce n’est pas le sujet
principal du film, mais cela accompagne son déroulement. Tout au long du film on devait sentir cette passion qui affleure, elle allait lui donner sa vibration, jusqu’aux scènes finales.

En équilibre

Mon opinion

 

L'amour du cheval et de son cavalier.

 

Cette relation toute particulière, quasi exclusive est magnifiquement mise en images. Albert Dupontel, à la fois bourru, touchant, têtu ou amoureux, est excellent et réserve quelques moments particulièrement savoureux. La relation avec son "employé" interprété par Vincent Furic, plus un ami, qu'un lad ou palefrenier, est bien sentie en pareille circonstance. Cette relation de confiance réciproque aurait mérité un développement plus approfondi pour épaissir le récit.

 

Volontairement, le scénario n'a pas creusé le combat que Bernard Sachsé à dû mener pendant plus de dix ans avec sa compagnie d'assurances. Le respect dû aux sinistrés, face aux devoirs des assureurs, aurait peut-être permis d'épicer l'ensemble. Le réalisateur a déclaré : "Sans chercher à dénoncer le monde des assurances et la double peine encourue parfois par les accidentés, le film entrouvre une porte sur certaines pratiques sauvages de ce milieu."

 

Quelques minutes avec l'excellente Marie Bäumer, sont insuffisantes. L'histoire en pâtit et l'ellipse finale tombe à plat.

 

Cécile de France, parfaite et touchante, nous entraîne dans cette histoire avec une belle énergie. Beaucoup de sensibilité aussi. Entre le marteau et l'enclume, le couple qu'elle forme à l'écran avec Albert Dupontel, marie l'eau et le feu avec conviction.

 

De très belles images de la Bretagne une nouvelle fois mise à l'honneur dans ce film, et l'histoire s'inspirant très librement de la vie du cascadeur Bernard Sachsé, ne devraient pas manquer de ravir les amoureux des chevaux et de la Bretagne.

En équilibre
13 avril 2015 1 13 /04 /avril /2015 16:43

   
Date de sortie 18 mars 2015

 

Still Alice


Réalisé par Richard Glatzer et Wash Westmoreland


Avec Julianne Moore, Kristen Stewart, Alec Baldwin,

Kate Bosworth, Hunter Parrish, Shane McRae, Seth Gilliam


Genre Drame


Production Américaine

 

Pour son interprétation, Julianne Moore

a obtenu plusieurs prix de la Meilleure Actrice aux :

   
- Screen Actors Guild Awards 2015
- Independent Spirit Awards 2015

- Golden Globes 2015

- BAFTA Awards 2015

- l'Oscar de la Meilleure actrice en février 2015

 

Synopsis

 

Mariée, heureuse et mère de trois grands enfants, Alice Howland (Julianne Moore) est une professeure de linguistique renommée à l’Université de Columbia.

 

Pour commencer ce ne sont que des broutilles auxquelles personne ne prête attention : lors d’une conférence qu’Alice Howland donne à l’Université, elle ne trouve pas un mot.

 

Peu après, en faisant son jogging, elle perd l’orientation.

 

Quand on lui diagnostique les premiers signes de la maladie d’Alzheimer, les liens entre Alice et ses proches sont mis à rude épreuve.

 

Grace au soutien, de sa famille, John (Alec Baldwin), son époux et leurs trois enfants (Kate Bosworth, Hunter Parrish et Kristen Stewart) et son incroyable volonté elle réussit à continuer sa vie de manière consciente et à se réjouir de la singularité de chaque moment.

 

Effrayant, bouleversant, son combat pour rester elle-même est une magnifique source d’inspiration.

 

Still Alice - Julianne Moore et Alec Baldwin

 

Julianne Moore et Alec Baldwin

Still Alice est adapté du roman L’Envol du papillon, écrit par Lisa Genova.

 

L’envol du papillon est le premier roman de la neuroscientifique Lisa Genova. Il est paru en 2009 aux éditions américaines Simon and Schuster.


Le roman s’est trouvé d’emblée sur la 5ème place de la liste des bestsellers de la New York Times et s’y est trouvé durant 40 semaines. Il a été vendu jusqu’à présent en 1,8 millions d’exemplaires et a été traduit à travers le monde en 25 langues.

Le livre de poche a été réédité pour 41ème fois.


Lisa Genova a obtenu pour son roman de nombreux prix et des honneurs. Entre autres, il a été nommé en 2009 Target Book Club Pick, Barnes & Noble Discover Pick et Indie Next Pick et s’est trouvé au 6ème rang de la liste des Top Book Group Favorites de Reading Group Choices.


Le livre est réédité à l’occasion de la sortie du film

 

Richard Glatzer et Wash Westmoreland travaillaient ensemble depuis plusieurs années.

 

Richard Glatzer et Wash Westmoreland ont marqué l’histoire du festival de Sundance quand leur film Quinceañera, a gagné le Grand prix du jury mais également le prix du public.

Le drame a été récompensé à de nombreuses reprises, entre autres par le Humanitas Screenwriting Award et le John Cassavetes Spirit Award.

Le film relate l'histoire de Magdalena, une jeune fille de la communauté mexicano-américaine d'Echo Park, un quartier de Los Angeles, qui prépare sa quinceanera, la célébration traditionnelle organisée à l'occasion de ses quinze ans.

 

Le duo de réalisateurs prenait ensuite la responsabilité, en tant que producteurs exécutifs pour la chaîne MTV, du biopic Pedro consacré à l’activiste de la lutte contre le SIDA, Pedro Zamora. Le film a été présenté lors de sa première diffusion par le président Bill Clinton, et dans les festivals du film de Toronto et de Berlin.

 

Richard Glatzer et Wash Westmoreland  ont réalisé trois films indépendants, The Fluffer en 2001, Echo Park, L.A. (Quinceañera) en 2006 et The Last of Robin Hood en 2013, et collaborent avec Still Alice pour la quatrième fois.

 

Richard Glatzer, Wash Westmoreland, Kristen Stewart, et Julianne Moore

 

Richard Glatzer et Wash Westmoreland aux côtés de Kristen Stewart et Julianne Moore

des amies de longue date bien avant le tournage de Still Alice

 

Richard Glatzer, qui avait coécrit et coréalisé avec son mari Wash Westmoreland, Still Alice, est décédé le 10 mars 2015 à Los Angeles.

Propos du réalisateur Wash Westmoreland


En décembre 2011 Richard et moi ont reçu un appel de Lex Lutzus et James Brown, un duo de producteurs anglo-australien. Les deux nous ont demandé de jeter un oeil sur un roman qui pourrait éventuellement être adapté au cinéma. C’était une de ces occasions dont on se délecte en tant que cinéastes. Mais quand nous avons appris de quoi retournait le thème du livre, nous avons tout de même hésité. L’histoire d’une femme brillante qui au zénith de sa vie reçoit le diagnostic de l’Alzheimer, résonnait comme un film sur la maladie, sur le deuil et sur la perte. Et ceci nous semblait très éloigné de notre propre vécu. Quelques mois plus tôt, Richard avait consulté à Los Angeles un neurologue après avoir été confronté subitement avec quelques menues difficultés de langage. Le médecin en jetant un regard dans sa bouche et sur sa langue bizarrement crispée lui disait : "Je crains qu’il s’agisse de SLA". (Sclérose latérale amyotrophique ou maladie de Charcot)
Dans les mois qui s’en sont suivis nous avons passé beaucoup de temps à nous faire une raison de ce diagnostic, de manière médicale et pratique de même qu’émotionnelle. En lisant les premiers chapitres de Still Alice nous étions frappés à quel point quelques-unes des expériences étaient proches des nôtres : le neurologue que consulte Alice au début pose les mêmes questions qu’a entendues Richard lors de son premier examen quand on soupçonnait encore une attaque cérébrale. De même, nous ne connaissions que trop bien cette angoisse croissante au fur et à mesure qu’approche le diagnostic définitif, et ce sentiment d’être terrassé en plein vie. C’est pour cela que nous nous posions sérieusement la question si nous voulions prendre sur nous de tourner ce film.

 

Evidemment Alzheimer et SLA sont deux maladies fort différentes. Elizabeth Gelfand Stearns, la partenaire de production de Maria Shriver nous l’a dit de façon très juste lors d’une rencontre : "Au fond les deux maladies sont le contraire l’une de l’autre. Alzheimer s’attaque à la perception et à la mémoire, tout en ménageant au début le corps. SLA au contraire laisse indemne la raison, tandis que le corps… " Elle s’est interrompue pour ne pas nous offenser. Mais pourtant il y a des parallèles entre les deux maladies : les deux sont létales, sans remède et ont pour conséquence d’isoler le patient du reste du monde. Et surtout, les deux maladies minent la sensation pour sa propre identité, pourquoi il est d’autant plus important de se tenir à soi-même.


Dans tous les cas, nous ne pouvions plus mettre le livre de côté. L’histoire est incroyablement captivante, et accessible émotionnellement grâce au style d’écrire très honnête de Lisa Genova. Plus nous lisions ce livre, plus il nous est apparu nécessaire de choisir pour l’adaptation la même tonalité claire et directe. Le roman jette un regard très détaillé sur les conséquences quotidiennes que la perte de mémoire d’Alice a sur sa vie professionnelle, sociale, de tous les jours et finalement aussi sur la dynamique de la famille.


Still Alice. Kristen Stewart"As-tu vue le film‚ Voyage à Tokyo ?" a demandé Richard à Kristen Stewart lors de notre première rencontre à travers son App linguistique sur l’iPad. "Non, je ne l’ai pas vu" a-t-elle répondu. "Mais je vais le rattraper". Le chef d’oeuvre d’Ozu de 1953 est depuis longtemps l’un des films favoris de Richard et de moi-même.

 

 

 

Je j’avais vu pour la première fois en tant qu’étudiant à l’Université Fukuoka au Japon. Et Richard lui a témoigné de son respect dans son premier long métrage Grief réalisé en1993. Le film s’oppose à toute sentimentalité et gagne, de par sa retenue, une force émotionnelle incroyable. Ozu, avec sa structure narrative inspiré du Roi Lear, donne une vision universelle comment une famille avec trois enfants fait face à la maladie et à l’âge. Ceci se reflète de manière merveilleuse dans le livre de Lisa Genova. Nous sommes tous deux tombés amoureux de la protagoniste. Alice est en quelque sorte un personnage incroyablement inspirant : dans da persévérance, dans son volontarisme, dans sa manière de ne rien encaisser. Peu importe ce que la maladie a pour conséquence, elle est fermement décidée d’y faire face avec pragmatisme. Je ne sais plus dans quel chapitre c’est arrivé. Mais dans notre imagination Alice avec ses boucles brunes avait subitement des cheveux roux comme le feu.

 

Still Alice - Julianne MooreJ’ai demandé à Richard :

"Qui pourrais-tu t’imaginer dans ce rôle" et il a tapé "Julianne Moore" dans son application. Plus nous en parlions, mieux nous apparaissait cette distribution. Julianne ne pouvait pas seulement incarner l’intelligence étincelante et la complexité d’une professeure de linguistique, mais aussi la fragilité et la naïveté dans les stades plus avancés de l’histoire.

 

Nous savions qu’elle serait capable de rendre visible dans chaque nuance le déclin de cette femme. Elle est vraiment l’une des meilleures actrices du moment sur cette planète Nous l’avions rencontré quelques années plus tôt pour un autre projet. À l’époque nous l’avions sollicitée avec assiduité et devions attendre des semaines durant pendant lesquelles elle pesait le pour et le contre. Elle s’est finalement décidée contre le rôle. Cette fois, c’était différent. Nous lui transmettions un message concernant le projet et elle avait lu le livre avant même que le scénario ne lui parvienne. Un jour plus tard, nous nous sommes entretenus par Skype. En quelques secondes elle a dit oui.


Tandis que nous lisions les derniers chapitres du livre, nous commencions déjà à réfléchir aux aspects visuels du film. La chose la plus importante pour nous était la subjectivité de l’expérience d’Alice. Le public devait comprendre sa vision des choses et avoir une vision de sa vie intérieure que les autres personnages n’ont pas forcément. À cet effet, nous avions besoin d’une prise de vues personnelle et intime, de même qu’un montage qui correspondent bien à sa forme, son état d’esprit et sa perception. Nous avions la chance de pouvoir engager deux français d’exception pour ce projet : le chef opérateur internationalement reconnu, Denis Lenoir, ainsi que le monteur Nicolas Chaudeurge qui avait travaillé sur l’un de nos films préférés, Fish Tank. Les deux ont partagé notre vision de ce à quoi le film devait ressembler. Avec leur travail les deux ont énormément pu soutenir la prestation de Julianne Moore. Le même travail est vrai pour la décoration, les costumes, la coiffure et le maquillage. Tout devait toujours correspondre intimement avec les différents stades de la lutte d’Alice contre sa maladie.

 

Still Alice - Kristen Stewart et Julianne Moore

 

Kristen Stewart et Julianne Moore


Sous la direction de Pamela Koffler et de Christine Vachon, les infatigables productrices de la société Killer Films, et grâce au financement par Marie Savare et BSM le projet a pris forme à vue d’oeil. La période de préparation coïncidait précisément avec l’hiver le plus rude que New York avait connu depuis 20 ans. J’étais venu sur la côté Est pour superviser la planification tandis que Richard était resté dans la ville ensoleillée de Los Angeles. Quand je suis parti, il avait justement arrêté de conduire lui-même une voiture. Et quand il est finalement arrivé à la pré-production, à peine pouvait-il encore bouger ses mains et ses bras. Il n’était plus à même de s’habiller ou de manger tout seul et il ne pouvait écrire qu’avec un doigt dans une position très particulière. Obstinément il était néanmoins tous les jours sur le plateau et a mis en scène le film en faisant fi aux difficultés physiques inimaginables. D’une certaine manière toute la production a été prise par la sensation d’une signification plus profonde. Car au fond, c’était justement de ce que traitait le film. Devant nos yeux nous pouvions l’observer. Tout un chacun sentait qu’une chose particulière se déroulait là et tous supportaient avec patience les longues journées de travail.


La fin du roman est d’une grande force et en même temps inattendue. Pour Richard elle était complètement inattendue. Il était renversé quand il l’a lu et émotionnellement submergé. Moi, j’étais encore en arrière de quelques chapitres et je n’étais pas encore prêt.

 

Mais en lui regardant dans les yeux j’ai tout de suite compris. "Il me semble que nous ferons le film", lui ai-je dit.


Propos recueillis à Wash Westmoreland, Los Angeles, le 1er septembre 2014

 

 

Sources

www.frenetic.ch

Mon opinion

 

Très difficile de parler de film.

 

Traiter d'un sujet tel que la maladie d'Alzheimer, en étant victime d'un autre mal tout aussi incurable, telle a été la dernière volonté de Richard Glatzer, décédé en mars 2015.

 

Coscénariste et coréalisateur avec son époux Wash Westmorelan, Richard Glatzer a eu la ténacité, le courage aussi, d'aller jusqu'au bout de leur entreprise commune  malgré ce mal qui le rongeait, et le privait de ses fonctions essentielles.

 

Adapté du bestseller de Lisa Genova, le film ne sombre à aucun moment dans un pathos larmoyant.

 

La photographie de Denis Lenoir est magnifique.

 

Si la réalisation est sans surprise elle n'en reste pas moins d'une grande finesse. Et plus que tout, un témoignage frappant de véracité.

 

Certaines scènes sont très douloureuses. Celle, entre autres, dans laquelle Alice, encore consciente, se trouve  "face à elle-même" via son ordinateur pour "se" laisser ses propres consignes à exécuter quand viendra le moment inéluctable. D'autres passages sont bouleversants. En particulier les scènes en famille, ou plus encore, avec sa fille rebelle, interprétée par Kristen Stewart. Les dernières images sont magnifiques d'amour et d'émotions mélangés.

 

La merveilleuse Julianne Moore s'impose dans ce rôle difficile avec une grande intelligence, une délicatesse toute particulière et force l'admiration.

Still Alice

 

Welcome

 

"Le bonheur est la chose la plus simple,

mais beaucoup s'échinent à la transformer

en travaux forcés !"

 
François Truffaut

 

 

 

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